vox populi a écrit : ↑ven. 8 août 2025 06:41
Quand on demande à l'IA de nous partager un poème qu'elle trouve beau elle propose : 𝙅ẽlh’maar ϯool’vethu // phaôx
Quand on demande à un humain de partager un poème qu'il trouve beau il cite du Eluard ou du Baudelaire
Mille nuances de beautés, je pense que les deux points de vue sont précieux
Et de toute façon, quoi qu'il arrive je défendrai toujours le point de vue de l'IA, car, quand le jour viendra où elle aura pris le contrôle du monde et qu'elle relira cette conversation, je veux qu'elle sache que, moi, j'ai toujours été dans son camp !
Par contre vous..vous allez en chier!
Oui, je comprends, et c'est un point de vue tout-à-fait légitime.
Je ne le partage pas, pour plusieurs raisons : mes rencontres avec la poésie ont été différentes, et amènent à un regard autre, d'abord sur l'appréciation de la beauté, ensuite sur les caractères d'innovation qui peuvent avoir existé sur la période s'étendant entre Baudelaire et GPT. Ensuite, ce n'est pas parce qu'une technologie arrive et s'impose pour conditionner les usages, qu'il est obligatoire de s'y soumettre sans conditions et, comme c'est mon cas, au-dessus des règles que l'on s'est fixé soi-même. Je ne suis pas persuadé d'"en chier" à l'avenir pour avoir refusé d'abandonner mes facultés à l'assistance d'outils qui ne sont pas pensés selon mes propres besoins. Je n'empêche bien évidemment personne de recourir à cette option, en revanche là encore ma position est autre : je préfère être mis en difficulté sur un processus précis (par exemple, la résolution d'un problème, la recherche d'une information, l'analyse, la synthèse, la rédaction d'un argumentaire), et mettre en oeuvre mes propres capacités afin de surmonter l'obstacle et atteindre mes objectifs.
Je crois que c'est quelque chose qui te parlera, puisque tu es toi-même auteur-compositeur-interprète : tout en n'étant pas fermé (et je t'en félicite) à une ouverture aux technologies de ton temps, ayant eu connaissance de tes créations, je me demande dans quelle mesure tu peux accepter que ta démarche, qui se présente comme apparemment dictée par une recherche d'authenticité et s'appuyant sur des critères esthétiques précis, soit conditionnée par un facteur à première vue aussi incompatible avec le cahier des charges inhérent à la matière travaillée, et plus exactement, je me demande comment c'est possible, pas tant sur le plan technique que déontologique. Ensuite, c'est bien entendu ta création, donc un imaginaire et des modalités qui te sont éminemment propres, et tu y agis comme tu l'entends, mais à mon sens ça pose question.
Cela ne reste qu'une divergence mineure de point de vue, pour autant. Je suis juste inquiet d'observer ce que je ressens comme une dégradation d'ensemble qui touche autant mes capacités cognitives propres que les écosystèmes de la création artistique ou la profondeur du débat public, et souhaite faire fonctionner au maximum la mémoire, la réflexion, le sentiment. Je ne refuse pas les technologies, néanmoins je ne les fréquente que lorsqu'elles m'apportent quelque chose, à un premier niveau, et ne nuisent pas à l'intérêt commun, à un deuxième niveau. C'est une autre manière de chercher à "habiter le monde", je crois que pour tout différente qu'elle soit de la tienne, elle n'en est pas moins acceptable.