
Ce double Cd représente assez bien ce que fut la musique de Don Cherry à un tournant de sa vie, captée ici à Châteauvallon en 1972, un événement alors diffusé en direct à la télé, ce qui montre qu’elle n’était pas si sclérosée que çà, la télé à papa.
Don Cherry prend un virage musical d’importance, il abandonne la trompette de poche, ses vieux amours, le jazz et le free, et le voici devenu chanteur, pasteur, joueur de piano et d’harmonium. Dilué dans « l’Organic Music Theater » il livre ici une performance étonnante très typique de la période hippie, Peace & love, à la recherche d’un idéal universel et communautaire.
Cet engagement de vie au travers de son art est évidemment un choix engagé, reflet d’une époque pleine d’idéaux dont certains se moquent aujourd’hui, le cynisme l’ayant finalement emporté sur une certaine naïveté, mais qu’importe, car à Châteauvallon c’était soir de fête !
Les voici rassemblés sur la scène, venus d’un peu partout, Don Cherry (piano, harmonium, tanpura, vocals), Naná Vasconcelos (berimbau, percussion), Christer Bothén (donso ngoni, piano, light percussion), Doudou Gouirand (soprano saxophone, alto saxophone, light percussion) et Moki Cherry (tanpura, vocals). On remarque la présence de Naná Vasconcelos qui annonce le groupe « Codona », la présence du français Doudou Gouirand et celle de l’épouse de Don Cherry, « Moki » qui a également organisé la scène et les décors avec ce style si particulier qui se déploiera également sur nombre de magnifiques pochettes.
Une musique, avant tout reflet des voyages au travers du monde, des rencontres avec les hommes et les femmes, et aussi avec les cultures, différentes, particulières, avec des parties communes aussi. Beaucoup de traditionnels sont chantés, des ragas, des chants brésiliens, des litanies africaines. On a souvent parlé de world music, et encore plus souvent aujourd’hui, pour réfuter le terme. Mais alors, en 1972, ces mots avaient une signification bien réelle, comme chantés ici, sur cet album, ils représentent ce que désigne vraiment ces deux termes : « World Music », telle qu’elle a été conçue par le plus grand messager du genre.