J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

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Douglas
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 1 mars 2023 06:06

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Hugh Masekela – The Chisa Years 1965-1976 (Rare And Unreleased) (2006)

Hugh Masekela est un trompettiste, bugliste et cornettiste sud-africain de jazz. C’est une figure bien connue qui a enregistré quelques succès et a fréquenté quelques grands noms de la musique de passage en Afrique du Sud, mais il s’est également intéressé à la musique d’Afrique de l’Ouest et plus particulièrement à la musique de Fela, et s’est beaucoup rapproché de Dollar Brand aka Abdullah Ibrahim.

Cet album est un peu particulier car il est composé d’inédits, de pièces assez rares qui ont été compilés sur ce double LP en deux mille six, une réédition a été effectuée en deux mille dix-huit, c’est celle-ci que je possède. Il serait abusif de parler de « jazz » ici, nous sommes plutôt centrés sur de la musique sud-africaine moderne, au travers de nombreuses formations dans lesquels Hugh Maselela a joué.

Les voici telles qu’elles apparaissent, dans le désordre, « Ojah With Hugh Masekela » formation d’Afrique de l’ouest, « Letta Mbulu » qui joue quatre titres, « Baranta Featuring Miatta Fahinbulleh » qui en joue cinq, « The Zulus » sur trois pièces et le « Johanesburg Street Band » pour « Awe Mfana », soit cinq formations au total.

C’est une musique joyeuse, festive, de « World Music » titre l’insert à l’intérieur de la pochette. On trouve des influences nombreuses propres à la musique noire, Hugh Masekala a collaboré avec Bob Marley, nous ne sommes donc pas surpris de trouver un reggae, l’excellent « Witch Doctor ». On peut citer également le très efficace « Mahlalela » qui donne irrésistiblement envie de bouger, ou encore « Ahvuomo » et ses chœurs, avec Emile Walsh à la guitare.

La musique est essentiellement électrique, basses, guitares, claviers qui se mélangent avec les cuivres et les chants. Ces derniers sont essentiels, souvent avec chœurs associés, il faut évidemment compter également avec les percus pour que la fête soit complète. C’est là toute la magie de cette musique pleine de joie de vivre et de rythmes dansants.

Mahlalela


Witch Doctor


Afro Beat Blues


Macongo - Hugh Masekela & Letta Mbulu (RARE & UNRELEASED)
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Message par Douglas » jeu. 2 mars 2023 06:34

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Gil Evans Orchestra – Parabola (1979)

Je viens à l’instant de visionner une courte émission de télé avec un mini concert de Gil Evans d’une durée d’environ une demi-heure et les souvenirs sont remontés. Je pose cet album sur la platine et l’enchantement continu, en effet certains musiciens sur la vidéo jouent également sur cet album, et pas des moindres.

Gil Evans bien sûr au piano électrique et acoustique, Steve Lacy au soprano, Arthur Blythe à l’alto, Lew Soloff à la trompette et au bugle ainsi que Earl Mc Intyre au trombone et Peter Levin aux claviers. Il y a également sur l’album Don Pate à la basse et Noel Mc Ghee à la batterie.

Je me souviens avoir acheté cet album à sa sortie, je l’aimais beaucoup et l’écoutais avec un grand plaisir, mais j’avais été un peu contrarié par une critique plutôt négative sur jazz Mag ou Jazz Hot, je ne me souviens plus. Toutefois ça n’atténua mon engouement pour cet album que j’étais prêt à aimer contre l’avis de la terre entière s’il le fallait !

Déjà les solistes sont fabuleux, même impression sur le concert télévisé, Lew Soloff magnifique, Steve Lacy grandiose, Arthur Blythe également et Earl Mc Intyre superbe, les quatre alignés, chacun face à son micro, attentifs les uns aux autres, attachés au même projet, avec, face à eux, en biais, Gil Evans qui joue du piano d’une main tandis que de l’autre il montre les directions…

Le répertoire est magnifique également, on y trouve deux pièces d’Hendrix, « Up From The Skies » et « Stone Free », ce dernier occupe la face trois à lui seul, sa durée est de vingt-deux minutes. On se souvient que Gil Evans a consacré un album entier au géant, « Plays The Music Of Jimi Hendrix » sorti quelques années plus tôt.

Les pièces de Gil Evans sont également remarquables, on parle d’un arrangeur hors norme quand on l'évoque, il collabora longtemps avec Miles Davis. Ici il présente « Waltz » qui ouvre l’album de façon brillante, il joue également « Parabola » sur la face deux, qui se traîne un peu et intègre une bulle d’électro, peut-être ce qui contraria le critique coincé ou irritable ce jour-là…

L’album se ferme sur « Variation » qui frôle les vingt-cinq minutes sur la face quatre, propice évidemment aux improvisations, sous la direction d’un Gil qui dirige savamment son orchestre, un titre magnifique, d’une belle ampleur, lyrique et grandiose, tout en explosion contenue, en fait, et pour résumer : tout ce que j’aime, une pépite éternelle, un truc immortel qui sera vénéré encore dans des siècles, quand les gens l’auront enfin bien écouté, même sans psychotrope ! Un au revoir sur un grand souvenir.

C'est sorti sur l'immense label Italien et défunt, "Horo", qui a laissé derrière lui tant de trésors toujours enfouis.

Gil Evans - Waltz


Gil Evans - Parabola


Gil Evans - Stone Free


Gil Evans - Variation
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par nunu » jeu. 2 mars 2023 20:12

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Complete Live at Plugged Nickel 65

L'un des sommets de Miles et le sommet de ce quintet qui aura fait 6 albums studio + ce live ensemble. Apres le départ de Wayne Shorter, Ron Carter et Herbie hancock en sont les deux derniers survivants. Ce quintet est l'un des plus grands ayant existé. Exceptionnel Live que tout amateur de jazz ce doit d'écouter une fois dans sa vie

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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » ven. 3 mars 2023 06:22

nunu a écrit :
jeu. 2 mars 2023 20:12

Complete Live at Plugged Nickel 65

L'un des sommets de Miles et le sommet de ce quintet qui aura fait 6 albums studio + ce live ensemble. Apres le départ de Wayne Shorter, Ron Carter et Herbie hancock en sont les deux derniers survivants. Ce quintet est l'un des plus grands ayant existé. Exceptionnel Live que tout amateur de jazz ce doit d'écouter une fois dans sa vie
Je ne connais pas ce coffret, mais il est vrai que cette période est très intéressante. Il est à noter que Wayne Shorter est de la partie, il est crédité sur Discogs, avec Tony Williams apparemment.

Si je tombe sur un exemplaire à prix raisonnable ou s'il y a une réédition je penserais à me le procurer car tu donnes envie...

A propos de Wayne Shorter, ce n'est pas l'album le plus emblématique, mais on peut lui prêter une oreille...
Douglas a écrit :
dim. 19 avr. 2020 06:21
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Il est difficile de trouver un homme de plume, pas un homme-volant, mais un journaliste par exemple, qui dise du mal de Wayne Shorter. Je n’en ai pas souvenir et, sur cet album, ça risque pas d’arriver : il est absolument parfait. Du début à la fin, rien ne dépasse, mais rien ne lâche non plus, juste parfait, étal, ça commence haut, ça continue haut et ça finit haut, en altitude, jamais on ne voit, même de loin, le niveau de la mer.

D’ailleurs il s’écoule dans le registre mid-tempo, ou la ballade, il peut très bien convenir au prélude à la sieste, il saura vous accompagner dans votre sommeil et peut-être même ne vous réveillera-t-il pas lorsqu’il arrivera à son terme. C’est un bon compagnon de songe.

Mais il peut faire mieux, si par hasard, là où vous faites d’habitude votre sieste, se trouve une personne de compagnie et de tendresse, il saura également accompagner vos ébats, avec une entière discrétion, en distillant une atmosphère chaude et sucrée propre au stimuli, so sexy « 502 Blues » … C’est un bon compagnon de la passion.

Mais il peut faire mieux, car c’est également un bon compagnon de route, et, au bout de la route, il peut encore vous rendre des services. Peut-être un virage, ou un glissement, ou toute autre sortie de route inévitable, il saura trouver le ton, lors de la cérémonie, pour apaiser les cœurs et réconforter les proches, ce qui est beaucoup. Et là, tout finit et s’échappe en fumée. C’est un bon compagnon de crémation.

Avec outre Wayne, Herbie Hancock dans le rôle du pasteur, Réginald Workman dans les cordes et Joe Chambers dans le rôle de la lampe.
(Sinon, le dernier titre « Chief Crazy Horse » est un hommage à Coltrane).

Adam's Apple (Remastered)


Footprints (Remastered)


Chief Crazy Horse (Rudy Van Gelder Edition/2000 Digital Remaster/24 Bit Mastering)


502 Blues (Drinkin' And Drivin')
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » ven. 3 mars 2023 06:31

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Lakecia Benjamin – Phoenix (2023)

Le quatrième opus de Lakecia Benjamin « Phoenix » vient d’arriver dans la boîte, au format Cd. Son précédent album « Pursuance: The Coltranes » était très bon, et même un peu plus que ça, la leçon de saxophone en provenance du maître s’entend d’ailleurs sur le morceau titre « Phoenix », même s’il est restitué à l’alto.

Le titre suivant, « Mercy », un peu sirupeux et chanté par Diane Reeves, se drape de cordes et figure un tournant funeste s’il ouvre une voie nouvelle et marque un virage artistique, malgré sa qualité d’exécution. Pour autant il semble seul dans son genre ce qui rassure…

Pour autant le voyage n’est pas sans surprise, sirène de voiture au démarrage, puis la voix d’Angela Davis sur le titre d’ouverture (et de fermeture – Radio Edit) l’excellent « Amerikkan Skin », très colemanien . Vibrante sonnerie téléphonique lors de l’intro de « Jubilation » qui consiste en un « spoken word » dit par Sonia Sanchez en même temps que Ivan Taylor joue un très beau solo de contrebasse.

On le voit, les pistes se suivent sans se ressembler, « Peace Is A Haiku Song » se profile en quartet sax, piano, basse, batterie et toujours la voix de Sonia Sanchez qui poursuit le spoken word, on glisse ensuite vers un « Moods » très hard bop, retenant toutes les lois du genre, énergique à souhait.

Puis une ballade, « Rebirth », même chose, les codes sont toujours là, une impression de voir défiler un catalogue, c’est du trois étoiles très certainement, habile et bien mené. Arrive « Coltrane », un hommage en même temps qu’une inspiration, une des meilleures pièces ici, pour ainsi dire une « vignette » qui représente sans doute la musique modale à la sauce jazz.

Tout cela ressemble à un parcours très réussi, les styles plus ou moins modernes sont visités et mis en valeur, sans parler de Wayne Shorter réanimé sur « Supernova », et l’hommage à « Basquiat », tempo rapide et le rappel d’Ornette encore, mais c’est ce qu’on aime en fait, ces réminiscences qui remontent de loin, l’air de rien, histoire de chatouiller le cerveau reptilien…

Amerikkan Skin


Phoenix


Trane


New Mornings
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » sam. 4 mars 2023 06:28

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The Stark Reality – Discovers Hoagy Carmichael's Music Shop (1970)

A l’origine un album qui se destinait à être typé jazz, puisqu’il était destiné à réinterpréter des thèmes de ce style, composés initiallement à destination des enfants, par le compositeur dont le nom figure dans le titre, « Hoagy Carmichael ».

Et puis voilà, nous sommes en mille neuf cent soixante-dix, la fièvre psychédélique, le « Flower Power », des hippies partout, et le monde qui devient fou, le résultat est là : un incroyable album qui mélange le jazz et sa liberté avec l’électricité, la musique psyché et l’esprit de la révolution qui bouleverse toutes les valeurs, quand on pense que ces bandes avaient, au départ, un dessein éducatif !

Déjà, trois Lps bien remplis, je possède la réédition de deux mille quinze qui m’a fait découvrir cette belle œuvre, car, bien entendu, commercialement ce fut un flop ! Le leader du band se nommait Monty Stark, il jouait du vibraphone et chantait, il y avait aussi un guitariste qui devint sacrément fameux, John Abercrombie lui-même qui offre une prestation exceptionnelle et miraculeuse, Phil Morrison est à la basse électrique et Vinnie Johnson à la batterie.

Ces deux derniers ont du funk et du groove qui coulent dans le sang, ils ne sont pas pour rien dans cette réussite trépidante, pleine de feeling et de rebondissements. Les airs enfantins, charmants et naïfs se gorgent d’épices et de fumée, d’électricité et de d’acidité, voilà ce qu’on découvre dans le magasin de musique de Hoagy Carmichael.

Et puis il y a Monty Stark et son vibraphone passé à la moulinette des pédales fuzz, ça déjante bien d’autant que John Abercrombie ne lésine pas avec la Wah-Wah, c’est assez démentiel quand on y pense, une telle musique, dans un tel cadre ! Imaginez-vous que cet ovni est paru sur « AJP Records », le label du musicien de jazz Ahmad Jamal !

Quelques pièces qui se mettent en évidence, « Junkman's Song », « Thirty Days Hath September », « Comrades », « Rocket Ship », « Bustin' Out of Doors », mais on ne s’ennuie absolument jamais ici…

Junkman's Song


Comrades


Thirty Days Hath September


Bustin' Out Of Doors
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Re: J A Z Z - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » sam. 4 mars 2023 20:15

Difficile de ne pas y penser...
Douglas a écrit :
sam. 11 avr. 2020 14:16
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« Speak No Evil » est le troisième album de Wayne Shorter sur Blue Note, il est sorti en 1966. Pour cet album Wayne a reçu l’assistance de deux autres membres du quintet de Miles Davis dont il fait partie, Ron Carter à la basse et Herbie Hancock au piano. Dans le rôle de Miles on trouve Freddie Hubbard à la trompette et, à la batterie, le grand Elvin Jones himself !

Un album qui a été très souvent loué, sans doute avec raison, tant mieux, il a été enregistré la veille de Noël. Nous sommes cependant en plein hard bop le plus souvent, avec une répétition des thèmes en double au début et à la fin des morceaux ce qui, à mon avis (très humble) alourdit un peu les pièces, heureusement ça s’envole après, les solos sont souvent remarquables et parfois sublimes. On peut penser que le public qui sifflait Coltrane à Antibes quand il interprétait « A Love Supreme » devait adorer « Speak No Evil ». Il faut dire qu’il contient le très tendre « Infant Eyes » composé par Wayne à l’intention de sa fille, l’album est d’ailleurs assez familial avec son épouse au premier plan de la pochette…

Bon, c’est juré, je ne dirai pas de mal de cet album dont je me suis procuré la réédition française en quatre-vingt-trois avec ce drôle de Obi où figure une série de photos de pochette appartenant à cette grande vague de réédition, il y en eût d’ailleurs une autre au milieu des années soixante-dix avec, cette fois, de nouvelles pochettes stylisées par les éditeurs français.

Elvin, Herbie et Ron sont tout de même grandioses ici et nos souffleurs très au niveau, haut !

Speak No Evil (Remastered 1998 / Rudy Van Gelder Edition)


Infant Eyes (Remastered1998/Rudy Van Gelder Edition)


Wild Flower (Remastered1998/Rudy Van Gelder Edition)


Fee-Fi-Fo-Fum (Remastered1998/Rudy Van Gelder Edition)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » sam. 4 mars 2023 20:19

Douglas a écrit :
dim. 8 janv. 2023 05:48
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Wayne Shorter – Emanon (2018)

Emanon est un livre-disque contenant trois Cds et une BD faite de papier épais, avec une reliure d’excellente qualité, c’est du costaud ! Il faut savoir que Wayne Shorter est un fan de BD. Il en a lui-même écrit pendant son adolescence et il continue à en lire, celle-ci est co-écrite par lui et Monica Sly, et illustrée par Randy DuBurke connu pour ses publications chez Marvel. Éclairons tout de suite le mystère du nom de l’album, Emanon se lit de droite à gauche « no name », voici déjà une énigme éclaircie.

Wayne Shorter joue du saxophone soprano et ténor, il est entouré de Danilo Perez au piano, John Patitucci à la contrebasse et Brian Blade à la batterie. Le premier Cd est assez particulier puisque la formation est complétée par l’Orpheus Chamber Orchestra, un grand orchestre à cordes et à instruments à vent. Ils interprètent quatre thèmes, « Pegasus », « Prometheus Unbound », « Lotus » et « The Three Marias ».

Sans surprise, ces versions symphoniques ne sont pas ce que je préfère, bien qu’elles s’écoutent sans déplaisir et démontrent une certaine énergie, le quartet « Jazz » est cependant relégué au second plan, bien qu’il éclaire la partition avec, de temps en temps, de magnifiques solos souvent très brillants. Par ailleurs la fusion est parfois très réussie comme sur « The Three Marias ».

Les deux Cds suivants sont des enregistrements du quartet live au « Barbican » de Londres. Sur le second Cd deux titres seulement sont présents, « The Three Marias » qui bénéficie d’une très longue version de plus de vingt-sept minutes, faisant plus que doubler celle enregistrée en compagnie du grand orchestre. On se doute que cette version est d’emblée plus libre, ouverte aux improvisations, aux échanges entre musiciens, s’échappant de la contrainte de l’écriture, ainsi la pièce semble presque nouvelle, soumise aux lois du jazz, permissives et libres, ouvrant des espaces nouveaux, sans cesse, dans la liberté de chacun et le respect de tous. Le final de la pièce est intense et nous ramène à la version symphonique, presque tendue et dramatique.

La seconde pièce est « Lost And Orbits Medley » qui remonte historiquement jusqu’à « Orbits » qui ouvrait le « Miles Smiles » De Miles Davis sorti en mille neuf cent soixante-sept. Depuis de l’eau a coulé sous les ponts et ce medley est une sorte d’historique de ce morceau qui a accompagné Wayne Shorter au fil de son évolution. La pièce est très ouverte et brillante.

Le dernier Cd est toujours en provenance du concert de Londres, on retrouve ici deux pièces issues de la suite « Lotus » et « Promotheus Unbound », ces deux titres sont également revisités et le second est considérablement allongé, il double sa durée. Cette lecture jazz est également très stimulante.

C’est d’ailleurs l’écoute de ces pièces qui a guidé l’inspiration de Randy DuBurke lorsqu’il a créé le « comix ». Ainsi l’histoire dessinée obéit à la seule règle du ressenti, créant des mondes parallèles qui se superposent, le récit avance par saccade, ne se souciant pas de réalisme narratif. Il est conseillé de lire l’introduction signée d’Esperanza Spalding pour appréhender cet univers-là, où la science-fiction débouche sur la philosophie.

Emanon-noname voyage entre les quatre mondes du multivers, où il franchit des étapes à travers des épreuves, des combats, qui lui permettront de mieux se connaître. Un programme original soutenu par ce bel objet, perso j’ai acheté le mien d’occasion, car l’objet neuf est onéreux, et il serait dommage de se priver d’un tel plaisir. « Emanon » a d’ailleurs reçu le prix du « Meilleur album instrumental de jazz » aux Grammy Awards, cette année-là.

Pegasus (The Wayne Shorter Quartet With Orpheus Chamber Orchestra)


Wayne Shorter - Lotus


Prometheus Unbound (The Wayne Shorter Quartet Live In London)


The Three Marias (The Wayne Shorter Quartet Live In London)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » dim. 5 mars 2023 05:44

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Arthur Doyle & Sunny Murray - Live At Glenn Miller Café (2001)

Un album devenu assez difficile à trouver, enregistré par le sympathique label « Ayler Records ». A l’époque le label était Suédois, désormais il est géré par Stéphane Berland, un compatriote passionné. Cet album est intéressant à plus d’un titre, contrairement à ce que sous-entend la pochette, il n’y a pas de formation en trio. Sunny Murray est le seul qui figure sur toutes les pièces de l’album. Il accompagne le saxophoniste suédois Bengt Frippe Nordström qui joue du saxophone alto sur les trois premiers titres, ensuite il joue en duo avec Arthur Doyle au saxophone ténor, à la flûte et… au chant serait peut-être un peu trop dire, disons plutôt à l’effort vocal.

Bengt Frippe Nordström est le premier saxophoniste suédois à jouer free dans son pays, dans un style inspiré par Albert Ayler, en cela il est d’ailleurs assez proche de Doyle. C’est un des rares enregistrements qui permet de l’entendre, lorsqu’il joue au Glenn Miller Café il est déjà malade, il décèdera quelques mois après ces concerts.

Arthur Doyle c’est autre chose, il a joué avec Pharoah Sanders, Sun Ra, Bill Dixon, Milford Graves, Frank Lowe et Noah Howard, c’est aussi un ami de longue date de Sunny Murray. Il joue free, avec lyrisme et même un certain goût pour la mélodie, il joue avec une liberté totale et sans limite, avec un énorme son, tout comme Ayler, sa puissance était phénoménale, hélas les enregistrements ont du mal à restituer cet aspect de sa musique : les micros et les magnétophones s’affolaient sous le souffle du ténor ! Il faut parler du « chant » également, parfois on pourrait croire qu’il est ivre, mais je préfère penser qu’il est devant le micro comme un enfant, gardant son naturel et sa naïveté…

Je ne présente pas Sunny Murray, géant de la batterie qui a révolutionné l’instrument, magnifique avec son jeu de cymbales unique et innovant ! Malgré ses qualités ce n’est pas le meilleur album pour entendre Arthur Doyle, à son zénith il avait quelque chose d’immense, mais voici tout de même cinquante-cinq minutes de bon free…

Video recording by Pia Ström at Glenn Miller Café, Stockholm on March 28, 2000. Sunny Murray in "Gohst" before Frippe asked: "OK Sunny, make an introduction!" and then they played 3 of "Frippe´s" "Spontaneous Creations".
This was Bengt "Frippe" Nordström´s last performance. He died in Oct. 2000.
In the audience background are Sune Spångberg and Arthur Doyle.
The music is released 2001 on Ayler Records, aylCD-002.


Frippe at Glenn Miller Café


Ce n'est pas un extrait de l'album mais une autre prestation du duo au Museum of Art, Norrköping, Sweden le 25 mars 2000. Il faut cliquer sur "Regarder sur youtube"

Arthur Doyle & Sunny Murray
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » lun. 6 mars 2023 06:03

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Kan Digor – A New Gathering (1979)

Sorti un mois plus tard il aurait ouvert les années quatre-vingts, au lieu de quoi il termine les glorieuses années soixante-dix qui firent beaucoup vibrer les amateurs de bonne zique. Justement, la formation « Kan Digor », qui signifie « Chant Ouvert » en breton, apporte un son nouveau, une personnalité peu présente dans le champ des possibles.

Il faut tout de même évoquer un album dont on a déjà parlé dans le coin, « Après La Marée Noire - Vers Une Musique Bretonne Nouvelle » de François Tusques, sorti cette même année, car, vous l’avez deviné, la caractéristique principale de la formation Kan Digor c’est de promouvoir une sorte de mélange entre jazz et musique traditionnelle bretonne.

L’histoire a débuté en soixante-quatorze quand le sonneur Pierre Gallais et le batteur Bertrand Le brun se sont rencontrés. Ce dernier est journaliste, il écrit sur des quotidiens régionaux et intervient également lors de chroniques radiophoniques. Par ailleurs il a joué avec François Tusques et son « Intercommunal free Dance Music Orchestra », la boucle est ainsi bouclée.

Kan Digor va donc naître principalement autour de l’idée d’improvisation, le groupe va beaucoup répéter et chercher sa marque, et là, pas de problème, il possède une véritable et profonde identité dont les racines plongent à la fois dans le jazz et dans la musique traditionnelle bretonne, chaque musicien se situe sur ces deux bords, pour le meilleur.

Vincent Guérin est à la contrebasse et Daniel Pabœuf joue des saxophones, ces quatre-là réunis forment ce quartet atypique en soixante-dix-huit et répètent beaucoup avant de se réunir en studio à Melesse. Il se font accompagner par un invité, Philippe Herpin qui joue de la clarinette basse et des saxophones et qui formera bientôt le duo « Anches Doo Too Cool » avec Daniel Pabœuf.

L’album sort en février quatre-vingts sur le label breton « Nevenoe ». La musique est souvent lyrique, improvisée à partir de thèmes, dont deux traditionnels, « Highland’s Dance » qui ouvre l’album et « Affreux Plin ». Deux titres sont signés de la formation, « De Houat à Houedic » et « A New Gathering » qui ferme l’album. Les deux autres compositions sont de Bertrand Le Brun.

On ne reconnait pas les rythmes entraînants et dansants de la musique bretonne, ni son côté ritournelle, répétitif, mais nous sommes au centre d’une musique nouvelle qui prend au jazz son goût des impros et sa liberté. En ce sens on peut parler de free, mais il faut plutôt souligner le côté très lyrique, échappant à la terre et à ses rythmes anciens, pour rêver et imaginer, s’inscrire dans une autre temporalité. La musique devient ainsi quelque chose d’étrange, peuplé de personnages mythiques nés dans la forêt de Brocéliande, enfin j’imagine…

01 Highland's Dance Trad Arrangement Kan Digor


02 De Houat à Houedic Kan Digor


03 Affreux Plin Trad Arrangement Digor


06 A New Gathering Kan Digor
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mar. 7 mars 2023 05:12

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Kan Digor - Kan Digor (1980)

Le second album de Kan Digor est sorti dans la foulée, sa pochette est magnifique et accroche l’œil d’emblée, ce portrait d’enfant avec ce chapeau distinctif, provenant probablement d’une image ancienne, pixellisée. Le quartet s’est à nouveau enrichi, avec Christian Lechevrotel au bugle et de Modeste Ratsimandresy aux saxophones soprano et ténor.

Il faut également ajouter, grâce aux notes de pochette, l’appoint de Pierre Chapry qui joue de la darbouka. Pour ceux du coin, la prod Nevenoe a pour adresse la Ferme de la Harpe à Villejean, un quartier de Rennes. Un seul thème traditionnel, le titre d’ouverture, « Black Poher », cette fois-ci on reconnaît davantage la musique bretonne, ses caractéristiques, son allant.

Les deux thèmes suivants sont signés Bertrand le Brun et virent côté jazz, c’est bien foutu, toujours ce lyrisme et un aspect « écrit » qui se sent, la musique se fait technique, les pièces sont très bien arrangées. La dernière piste de la face est signée de l’invité du moment, Modeste Ratsimandresy qui propose ce « Pipe Blues » qui permet à Pierre Gallais de s’exprimer avec sa cornemuse très à l’avant.

La face B s’ouvre sur la « Danse du Muadib », une des trois signée Pabœuf, elle voit les sons des anches et des cuivres se mélanger avec les sons de la cornemuse, très jazzy, et de belles improvisations. Ensuite la formation reprend « Gathering » en provenance de l’album précédent, agrémenté de nombreuses improvisations et d’enrichissements, vraiment très plaisant.

Les deux titres suivants sont à nouveau signés du saxophoniste, « Pour Ornette », un hommage à qui vous savez et « Croonardise », l’album vire très jazz, on ressent le plaisir évident de jouer. C’est le dernier enregistrement du groupe, d’après ce que je sais, seul Vincent Guérin, le bassiste, poursuivra une carrière de musicien professionnel, il est souvent très apprécié de ses confrères et a continué à enregistrer.

Malheureusement un seul extrait sur le tube!

Kan Digor - Croonardise (1980)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 8 mars 2023 04:48

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Don Cherry – Orient (1973)

Un album sorti au Japon sur le label Byg Records, très difficile à se procurer, pour ma part j’ai dû me rabattre sur le double LP Affinity de quatre-vingt-deux, en version anglaise, pour enfin l’écouter, depuis deux versions Cd sont parues, en quatre-vingt-dix et deux mille deux. L’album est assez fameux, la difficulté à le trouver sans doute, mais également les interprétations en live, avec un personnel de haut vol.

Deux concerts, l’un à Carpentras en août soixante-douze, et l’autre à Paris en avril soixante et onze. Le personnel est également changeant, Don, lui est toujours là, il joue de sa célèbre trompette de poche, de la flûte, du piano et il chante. A Carpentras il est accompagné par Han Bennink à la batterie, aux percussions, à l’accordéon et au chant. A Paris c’est Johnny Dyani qui tient la contrebasse et chante, et Okay Temiz (noté Tamiz sur la pochette) joue de la batterie et des percussions.

Il existe un film assez court, mais assez culte également, où l’on voit des extraits du concert de Paris avec les trois sur scène, c’est assez émouvant, j’ai trouvé. Chaque face est porteuse d’un titre, la face A ouvre avec « Orient part 1 &2 » qui donne son titre à l’album, un beau thème qui se déploie bien, avec un magnifique Han Bennink qui est brillantissime aux tambours et percussions, Mocqui Cherry, la compagne de Don, que l’on appelle habituellement simplement Moki, joue du tamboura, c’est propice à illustrer l’atmosphère de la pièce.

La seconde pièce « SI TA RA MA » est également passionnante, ceux qui l’ont vu en concert connaissent la façon de faire du leader qui joue des instruments alternativement, avec des espaces dédiés aux autres solistes également. Les thèmes sont souvent « aux petits oignons », souvent des pépites, ensuite c’est l’inspiration du moment qui préside, beaucoup d’improvisations et de sérénité.

La formation bénéficie partout où elle se produit d’une belle écoute de la part du public, souvent concentré et happé par les passages où la transe s’insinue avec force, assister à un concert de Don Cherry était une chance. N’oublions pas qu’il était une figure majeure de l’éclosion du free-jazz et, avant l’heure, un des premiers pratiquants de ce qu’on appellera la "world music". J’ai pour ma part eu la chance d’assister à une de ses prestations qui reste un inoubliable souvenir, malgré les substances qui, parfois, tendent à gommer le temps.

La face trois se nomme « Eagle Eye part1 & 2 », il est l’heure de rappeler que son fils était le musicien Eagle Eye Cherry, et que sa fille n’est autre que Neneh Cherry. Ceci mis à part c’est un vrai plaisir d’entendre Johnny Dyani, le SudAf qui a été souvent évoqué ici, Okay Temiz est un fameux batteur turc qui, au sortir de ses tournées avec Don Cherry gravera de très beaux albums également.

Le petit bémol ce sera pour la prise de son qui n’est pas au top niveau, d’un autre côté ça laisse bien transpirer la relation scène/public et là c’est un régal…

Pour moi cet album est hors catégorie, définitivement, mais je ne revendique pas l’impartialité.

Don Cherry - Orient


Don Cherry - Eagle Eye


Don Cherry Si ta ra ma
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Message par Douglas » jeu. 9 mars 2023 04:39

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Don Cherry – Organic Music Society (1973)

Magnifique pochette pour cet « Organic Music Society » de soixante-treize, album qui a marqué un tournant décisif dans la musique de Don Cherry, qui semble moins regarder vers le jazz que vers les musiques du monde. Don Cherry est alors installé en Suède où il vit de façon communautaire, son modèle de vie est tout de paix et de fraternité, mais aussi d’amour et de musique.

La première pièce de l’album est à cet égard très révélatrice, comparable à une litanie Indoue, telle qu’on pouvait l’entendre chez les « Hare Krishna» du Boul’mich à l’époque, ici c’est tout de même mieux, mais on entend ces voix qui font chœur, sur un rythme immuable et répétant un chant entêtant sur un tapis de percussions. Ça s’appelle « North Brazilian Ceremonial Hymn », Don Cherry est aux percus, Nana Vasconcelos au berimbau, Moki joue du tambura, et surtout tout le monde chante, mais ils sont encore beaucoup plus nombreux, sur cette pièce de juillet soixante-douze, ce soir-là, à Copenhague.

La seconde pièce, « Elixir » est enregistrée en studio, elle est signée Don Cherry et se partage entre psalmodie ethnique et emballement rapide au piano, une pièce assez jolie qui voit se succéder l’usage d’énormément d’instruments en provenance du monde entier… Un raga assez court termine la face en laissant une signature qui s’apparente à une prière.

Sur la face deux la « Relativity Suite » en deux parties accentue encore le trait, pour ceux qui connaissent l’autre version avec « The Jazz Composer's Orchestra » et Carlos Ward au sax alto et de Frank Lowe et Dewey Redman au sax ténor, ça n’a pas grand-chose à voir, Ici Don chante en faisant référence à l’africanité, des percussions en nombre, de multiples origines, bruissent en fond sonore, par-dessus viennent se greffer des paroles qui semblent improvisées.

La troisième face s’ouvre sur « Terry’s Tune », un des plus beaux thèmes de Don Cherry, écrit en hommage à Terry Riley, une autre version de ce thème est également présente sur la face quatre. C’est très beau avec un accompagnement au piano, de multiples flûtes et le chant de Don. « Hope » qui enchaîne est également un très beau thème, avec ce même accompagnement, cette face rare est extrêmement plaisante.

D’autant qu’elle se poursuit avec une reprise de « The Creator Has a Masterplan » de Pharoah Sanders et Leon Thomas, je n’irais pas jusqu’à affirmer qu’il y a un retour vers le jazz, bien que ça puisse être dit car il y a là une évidence, pourtant l’album conserve incontestablement la puissance de cette World Music qui en marque l’unité, comme une signature. La face se termine sur le très court « Sidhartha », à nouveau un beau thème de la part du très créatif Don.

La quatrième face s’ouvre avec le magnifique « Utopia & Visions », une nouvelle merveille signée Don, ça regorge de pépites par ici, pourtant l’album sera un peu boudé par la critique « jazz » et ses puristes, qui ne verront qu'errances et déstructurations. Ce n’est pas mon avis, j’ai même un très grand respect pour cet album en quête de simplicité et d’évidence, en même temps que d’une certaine universalité.

Don Cherry - Utopia and Visions


Hope


The Creator Has a Master Plan


Terry's Tune
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Message par Douglas » ven. 10 mars 2023 05:18

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Don Ayler – In Florence 1981 - Vol. 1 (1981)

Voici une rareté, non pas l’album en lui-même, encore qu’il ne coure pas les rues, mais en tant qu’album de la part de ce musicien, frère cadet d’Albert Ayler, trompettiste. II a joué dans le groupe Charles Tyler, puis, de mars 1965 à février 1968, dans celui de son frère Albert, participant à des albums majeurs. La disparition de son frère le perturba énormément et sa santé psychologique est restée assez fragile.

Et puis il y eut cette pause en mille neuf cent quatre-vingt-un, comme une période de paix, de calme et de lumière, pendant laquelle il donna des concerts à Florence, qui se concrétisèrent matériellement sous la forme d’une série de trois albums dont voici le premier.

Il est très bien entouré, de musiciens de haut vol, Abdul Rahim Mustafa aux saxos, Anthony « Tony » Smith au piano, Richard « Radu » Williams à la basse, Frank Doblekar au sax ténor, John Davis à la guitare et Jerry Griffin aux percussions. Don joue de la trompette, instrument qui s’imposa à lui, quand il abandonna le saxo, défait par l’exubérance de son frère.

Nous sommes au Théâtre Andromède de Florence, au mois de juillet, qui verra les seuls et uniques enregistrements existants, avec Don Ayler en tant que leader d’une formation de jazz. C’est lui qui a composé et arrangé les pièces pour le septet, il nous offre également de très beaux solos qui ne sont pas sans nous rappeler l’incandescence de ceux de son frère, même s'il s’inscrit assez généralement dans une structure post-bop de bon aloi.

La première pièce occupe l’entièreté de la première face, elle se nomme « The Bebop Song » et dure un peu moins de seize minutes, ne pas s’attendre, malgré le titre, à un bop des années cinquante, mais une certaine sûreté est conservée. Les solos s’enchaînent bien et chacun se montre à bon niveau et même exceptionnel pour ce qui concerne Abdul Rahim Mustafa. Même le batteur Jerry Griffin a droit à sa minute de gloire en tant que soliste.

La seconde pièce « The African Song » est un peu différente, bien que d’une durée comparable, elle semble avoir une structure plus complexe et glisse volontiers vers la musique modale ou spirituelle. Le solo de Don est le premier dans la série, il utilise quelques glissements free bienvenus, des dérapages qui dynamisent la pièce et y mettent le feu.

Du coup la pièce n’est pas sans rappeler à nos souvenirs cette énergie libertaire primaire qui illumina le jazz autrefois, d’autant qu’Abdul Rahim Mustafa reste en grande forme, John Davis pendant son solo de guitare participe lui aussi à l’embrasement, seul Tony Smith au piano semble conserver la mesure.

L’album est vraiment très réussi, sur ce chemin de semi-liberté, il n’est que le premier d’une série de trois, souvent courue par les collectionneurs. Il faut le dire, cette série de trois réunie, est vraiment magnifique, il flotte l'esprit de ces anges qui tourmentèrent la fratrie Ayler, entre un sentiment de culpabilité et un autre de liberté, pas loin de là où nichent les démons tourmenteurs...

Je ne sais pas trop d'où sortent ces enregistrements youtube que je découvre, mais ils regroupent les trois albums, Quelle chance !

Don Ayler - In Florence 1981 (Full Album)

The bebop tune 00:00
The african song 15:44
Coltrane's blues 31:44
The indian song 47:47
The eastern son 01:05:57
Peace 01:24:13
Speech by Mr. Ayler 01:28:53
The japanese song: 01:31:31

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Message par Douglas » sam. 11 mars 2023 05:37

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Dominique Lawalrée – Brins d’Herbe (1978)

Toujours en fouillant dans mes albums, je tombe sur celui-ci, peu écouté finalement, je le pose sur la platine. Je sais qu’il n’est pas très courant et que l’artiste est aujourd’hui assez recherché, après qu’une compile ait été diffusée aux Etats-Unis qui a chatouillé l’oreille d’un certain public New-Yorkais, happy few branchés.

Impossible à classer Dominique, il aimait dire de lui qu’il était « un gros plein de sons », humour belge, lui qui ne quitta pas trop sa Belgique natale. La musique du gars n’est pas trop facile à situer, car ce qu’il aimait et composait n’avait pas l’habitude d’être répertorié, rangé, classé. C’est un pianiste, il aimait Eric Satie, les Beatles et Brian Eno qu’il avait plusieurs fois rencontré, mais tout ça ne compte pas.

Il compose, des petites pièces, et il les joue, il n’improvise pas, enfin pas dans ses enregistrements. Du coup on le classe dans l’ambient, ou dans le minimalisme, ou encore dans la musique liturgique, pourquoi pas ? Il est très croyant et fréquente les églises, avec son air illuminé.

Sa musique est jolie, belle, charmante, elle s’ouvre à la nature, à la beauté du monde dont elle fait partie, d’apparence simple, les pièces sont souvent courtes, quinze au total, serrées sur cet album, pour une durée d’une minute treize à trois minutes dix-neuf secondes, pour la plus longue. Ce sont des vignettes, des mignonettes ou un truc qui se termine en « -ette » et qui laisse un doux souvenir.

Dominique a énormément composé, des centaines de titres, cet album fait partie plutôt de ses débuts, les pièces se situent entre soixante-quatorze et soixante-dix-huit et sont apparues sur son propre label, « Walrus », avec le chiffre « 5 » qui pourrait indiquer son ordre de parution.

Il y a un petit avertissement au verso de la pochette qui dit « ce disque est un recueil de morceaux « faciles », musique sans prétention artistique ou commerciale ». Voilà c’est fait …

Bon y'a pas d'extrait sur le tube, mais ici il y a "Blues 1", "Blues 2" et "Blues 4", alors je vous mets "Blues3" qui appartient à un autre album, mais ça donne une idée de cette musique...

Dominique Lawalrée - Blues III
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Harvest » sam. 18 mars 2023 18:23

Je ne connaissais pas ce dernier. Merci. :chapozzz:

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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mar. 21 mars 2023 03:43

Harvest a écrit :
sam. 18 mars 2023 18:23
Je ne connaissais pas ce dernier. Merci. :chapozzz:
On peut trouver pas mal de liens sur le tube...
:)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mar. 21 mars 2023 03:50

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Abdullah Ibrahim ‎– Ekaya (Home) – (1983)

Un album enregistré au Van Gelder Studio, sous la supervision de Rudy Van Gelder lui-même, voilà qui donne confiance. En effet l’album est bien réussi, il faut dire qu’Abdullah Ibrahim, aka Dollar Brand, a réuni ici une belle palette de musiciens.

Carlos Ward joue du sax alto, Ricky Ford du ténor, Charles Davis du baryton, Dick Griffin du trombone, le bassiste est Cecil McBee et le batteur Ben Riley, avec le leader au piano ils sont sept, du coup le piano est un peu plus discret qu’en d’autres circonstances, mais c’est bien Abdullah qui compose et arrange les orchestrations, hormis la troisième pièce « Ntylo, Ntylo » signée par Mackay Davashe.

L’album s’ouvre avec « Ekaya », qui signifie « maison » dans plusieurs dialectes Sud-Africain, c’est une pièce ancrée dans les rythmes locaux, sur lesquels les saxophonistes s’affairent pour tisser des soli de feu, c’est très enlevé et propice à la danse, une pièce très vive et agréable, en fait la seule de cette face à procurer une telle envie de bouger. Il est à noter que « Ekaya » deviendra le nom du groupe accompagnant Abdullah Ibrahim.

« Sotho Blue » est beaucoup plus lyrique, une belle pièce dédiée au peuple « Sotho », du Lesotho, toute en douceur. Le dernier titre de la face est joué sur le mode de la ballade, un hommage au « Ntylo », petit oiseau distilleur de chant d’amour.

Sur la seconde face Abdullah continue son parcours itinérant, cette fois-ci nous commençons dans le coin de « Phomolong », un quartier noir de Soweto, encore un titre mid-tempo qui balance doucement, ça s’énerve un peu plus à l’étape suivante où les rythmes s’affolent… doucement, nous voilà à « Windhoek », la capitale de la Namibie, avant de terminer ce voyage à « Cape Town », la ville natale d’Abdullah, le titre est plein de tendresse et de nostalgie, c’est ce que chante la flûte de Carlos Ward et le sax de Ricky Ford…

Chacune de ces étapes est prétexte à une succession de solos de la part des intervenants, le plus souvent sur des rythmes balancés qui donne une couleur assez chaude à cet album-voyageur, thème récurrent de la part d’Ibrahim qui aime faire chanter les lieux, les villes ou même les pays. L’importance des racines sans doute, tout en étalant un sentiment d’une certaine joie de vivre, en quête de paix…

Abdullah Ibrahim - Ekaya (Home) - 01 Ekaya


Abdullah Ibrahim - Ekaya (Home) - 02 Sotho Blue


Abdullah Ibrahim - Ekaya (Home) - 04 Bra Timing From Phomolong


Abdullah Ibrahim - Ekaya (Home) - 06 Cape Town
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 22 mars 2023 03:22

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La Musique Est Dans La Rue : Paris (1975)

Voici un album en provenance du label « Expression Spontanée », ancré dans les années soixante-dix pour la plupart de ses albums, souvent situés côtés gauche, libertaires, alternatifs ou revendicatifs, ils sont un témoignage sonore capital, utile, qui restera comme un témoin de ces années-là.

J’ai quelques exemplaires de cette collection, mais assez peu, un album folk « 1er Festival Folk Lambesc Aout 70 », féministe, « Pour Des Chansons de Femmes », historique « Mai 68 » en deux LPs ou encore « Chants Staliniens De France », avec le portrait de Staline sur la pochette, chanson militante avec « Mass Devia », celui-ci j’ai dû le remplacer car très écouté, ou « La Fête Rouge », free jazz avec « Fête De Politique Hebdo Lyon 76 » et l’Opération Rhino, assez recherché celui-ci, et quelques autres, souvent folk.

Voilà, il faut également parler de celui que je vous présente « La Musique Est Dans La Rue » dont le principe est assez simple, des enregistrements de tous types, concernant les manifestations de rue, chanson, musique, spectacle, cirque qui sont collectés et témoignent de cette tradition très ancienne d’artistes des rues de Paris.

Voici ce qu’on peut lire au verso : « Nous soutenons tous les chanteurs des rues, quels qu’ils soient, car par leur activité, ils rejoignent tous ceux qui refusent de cautionner ce système où la seule valeur est marchande. Prenez le temps de les écouter. Arrêtez-vous pour les encourager à « tenir le pavé » face aux pressions de plus en plus menaçantes d’une société qui les ignore. »

L’album est vraiment très sympa, ce sont les rues où les lieux parisiens qui guident la visite, ça commence Rue Lepic avec la fanfare « Le Collectif Boom » qui balance un air pompier du temps d’avant, on va ensuite dans le couloir du métro station Pyrénées pour écouter un homme aveugle qui joue de l’accordéon et nous chante une vieille chanson, « Beau Mois de Mai », ou encore, Rue de Seine, un guitariste classique Irlandais.

Galerie du Port Royal un chanteur, accompagné d’un petit orgue de barbarie dont il tourne la manivelle, nous chante « Sweet Suzanne », une histoire d’amour contrariée. Boulevard Richard Lenoir se trouvent deux vieux musiciens qui jouent en duo pour subsister, le plus jeune a quatre-vingt-un ans, on nous précise qu’ils n’ont jamais quitté Paris.

Rue de la harpe un homme-orchestre passe le chapeau devant une queue à un cinéma, dans le couloir du métro Barbes, un vieillard aveugle joue maladroitement sur un « concertina Lachenal », on précise, « Chaque fois qu’une pièce tombe, il remercie mécaniquement bien poliment ».

J’arrête là, mais je suis très loin d’avoir fait le tour de toutes ces merveilles en votre compagnie, reste à signaler que chaque date et heure d’enregistrement sont également indiquées, les commentaires très riches au verso de la pochette nous présentent les artistes en quelques mots significatifs et choisis. Il y a ici ou là quelques plages où s’entendent les « cris de Paris », qui vous mettent bien dans l’ambiance. Des extraits jazz également, bien sûr…
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Re: J A Z Z - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » jeu. 23 mars 2023 04:47

"Opération Rhino" le retour...
Douglas a écrit :
mer. 3 juin 2020 18:40
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Je pense que par ici le label « Expression Spontanée » n’est pas inconnu et que certains possèdent quelques exemplaires sur leurs étagères, bien qu’il soit orienté plutôt folk, il existe cependant cet album de free, de « Création Collective » et « Musique Improvisée ». Des extraits de deux concerts sont présentés, le premier, en studio, à Paris le 12 mai 76 et le second à Lyon, quatre jours plus tard, pendant la fête de « Politique Hebdo ».

Malgré une prise de son parfois un peu imprécise et éloignée on a plaisir à écouter ce grand orchestre, avec quelques jazzmen français très connus et d’autres moins. Je m’en tiens à ceux qui ont la notoriété la plus grande car l’orchestre est très nombreux (dix-huit musiciens). Richard Raux, Itaru Oki, Jacques Berrocal, Raymond Boni, François Tusques, Pierre Bastien, Mino Cinellu et Gilbert Artman, les autres musiciens sont tout aussi bons mais leur nom sera sans doute moins évocateur.

Deux improvisations collectives se succèdent, la première à cheval sur les deux faces. Chacune d’elle est organisée autour d’une structure connue de tous et le tour des improvisations est décidé. Ce qui est à entendre est particulièrement enthousiasmant, une grande place est faite à Raymond Boni, il est regrettable que cet album reste unique et que ce projet sera sans suite.

Opération Rhino - Improvisation 1
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