J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

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whereisbrian
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par whereisbrian » mer. 17 janv. 2024 08:55

Douglas a écrit :
mer. 17 janv. 2024 04:54
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Tony Allen – There Is No End – (2021)
(Plusieurs pochettes selon les versions)

Tony Allen nous a quitté en avril deux mille vingt, bien qu’il soit un roi de l’afrobeat il avait laissé dans les tuyaux ce curieux enregistrement qui est sorti un an après son départ, ici pas vraiment de musique africaine mais plutôt un mélange de musique moderne, avec du rap, du hip-hop, de la musique de djeunes, très actuelle, en tout cas pas prévue pour un gars comme moi, et pourtant, je ne peux pas dire que j’aime pas, bien que le jazz ne soit qu’une influence perdue au milieu d’autres…

Déjà Tony il assure côté batterie, c’est du solide bien que tout se mélange dans ce bazar soul-électro, il y a de grosses basses et des claviers qui grouillent. Il y a des invités à tour de bras, des chanteurs, rappeurs ou chanteuses, rappeuses à chaque titre, de quoi identifier les pièces avec le nom de l’intervenant, comme « Sampa The Great », ou « Zelooperz », « Lava La Rue », « Danny Brown », « Ben Okri & Skepta » ou « Jeremiah Jae » pour n’en citer que quelques-uns.

Dans ce grand mix ma culture est nulle, bien que le bain sonore soit très réussi et pas pour me déplaire, mais ça parlera sans doute à d’autres, plus qualifiés. Côté qualité c’est pas étal, c’est plutôt ski de bosses avec des hauts et des bas, mais jamais très bas non plus, l’album passe en entier assez rapidement, il dépasse à peine les quarante minutes d’ailleurs, ce qui reste honorable pour un album posthume d’un gars de quatre-vingts piges, branché à la musique d’aujourd’hui.

Il est dit que Tony avait terminé l’enregistrement de sa partie avec le producteur français Vincent Taeger et le copro Vincent Taurelle, ensuite le destin sépara l’âme disparue des autres, qui s’affairèrent pour terminer le travail avec ce qui était prévu, c’est l’histoire qui fut racontée. Ce qui est sûr c’est que Tony n’entendit cette musique que dans son esprit, lorsqu’il en dessina l’esquisse, dégrossit l’ébauche.

Alors soyons heureux de profiter de cette musique boulimique et pleine de vie !

Tony Allen - Stumbling Down (Official Visualizer) ft. Sampa The Great


Coonta Kinte


Tony Allen - One In A Million (Official Visualizer) ft. Lava La Rue


Tony Allen - Cosmosis (Official Clip) ft. Skepta, Ben Okri
J'avais vu Tony Allen au festival Algues Aux Rythmes près de Vannes, un super souvenir.
Je préfère l'album The Source.
Le jeu de charley :rollin:

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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 17 janv. 2024 14:54

whereisbrian a écrit :
mer. 17 janv. 2024 08:55
[

J'avais vu Tony Allen au festival Algues Aux Rythmes près de Vannes, un super souvenir.
Je préfère l'album The Source.
Le jeu de charley :rollin:
C'est moins bien mais j'ai assisté à un concert télévisé avec Jowee Omicil, c'était effectivement très bon !

Je préfère également The Source, dont j'avais parlé un peu:
Douglas a écrit :
mar. 16 mai 2023 04:44
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Tony Allen – The Source (2017)

Voici un album de la maturité pour Tony Allen, et même d’une certaine consécration car il enregistre pour la première fois de sa vie pour Blue Note, le mythique label qui fit tant pour le jazz, le sortant des heures sombres en créant la légende…

L’enregistrement de l’album ne passe par aucune source digitale, du coup on le qualifie de « live », mais au « Midilive Studio » de Villetaneuse, en France. Il est vrai que le son est très bon et semble très « authentique » pourrait-on dire. Il y a donc un peu de France ici, également par les musiciens présents.

Si certains ne connaissent pas Tony Allen, il leur suffit de savoir qu’il fut autrefois le batteur de Fela Kuti, il peut revendiquer une certaine paternité dans l’afrobeat, nul ne le contestera, ce serait déjà une référence pour n’importe quel musicien au monde, mais depuis, Tony Allen a écrit un grand nombre de pages, et sa discographie plaide pour lui…

Cet album-ci, bien que le musicien atteigne les soixante-dix-sept printemps lorsqu’il l’enregistre, est assez spécial, par sa fougue et sa qualité. Tony signe tous les titres, certains avec le saxophoniste soprano Yann Jankielewiez, d’autres encore à trois, avec Jean Philippe Dary ou Indy Dibongue. Toutes les compos sont bondissantes et imprégnées de l’afrobeat, de la soul et du funk, qu’on se le dise ça groove ici…

Mais l’invité d’honneur est un peu une surprise, bien qu’il ne manque pas de talent, Damon Albarn lui-même au piano, bon, sur un titre seulement, l’excellent « Cool Cats », mais ça mérite d’être signalé, ailleurs c’est Jean Philippe Dary aux claviers, il y a des pièces avec orgue également.

Présente également, une section de souffleurs, cuivres et anches mélangés, ils sont cinq au total, fougueux à souhait, dont le tromboniste et tubiste Daniel Zimmermann, qui a sorti récemment un hommage à Gainsbourg de qualité. Le Camerounais Indy Dibongue est à la guitare et Mathias Allamane à la basse.

Tous ces musiciens, la plupart parisiens, ont l’habitude de se côtoyer, la complicité est évidente et s’affiche tranquille, ça embraye à la perfection et le vieux Tony n’a plus qu’à donner l’impulsion et déposer son sourire sur ses lèvres, ça tourne !

Un bel album bien groovy !

Moody Boy


Push And Pull


On Fire


Cruising
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » jeu. 18 janv. 2024 03:57

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Baptiste Trotignon – Brexit Music – (2023)

J’ai longtemps hésité avant de l’acheter celui-ci, bien que je connaisse le talent de Baptiste Trotignon, il en est pétri et plutôt surdoué même. Enfin il a fini par arriver at home, ce « Brexit Music » entièrement consacré à l’interprétation de Hits pop britanniques.

Alors rien que l’énoncé des pièces et des auteurs situe l’enjeu, deux titres des Beatles, « Drive My Car » qui ouvre l’album et « Here Come the Sun », les Stones avec « Mother’s Little Helper », Pink Floyd avec « Money » et « Interstellar Overdrive », Bowie et son « Life On Mars? », The Police et « Message in a Bottle », Radiohead avec « Karma Police » et « Fake Plastic Trees ».

Je cite pas tout, mais il y a encore Led Zep, Costello, Wyatt et l’affreux Queen (sans vouloir vous fâcher). On reconnaît forcément à peu près tout et franchement c’est plutôt bien réussi. On comprend assez vite que Baptiste a grandi avec ces musiques et qu’il en est imprégné, la sélection est tout de même sans risque, je pense que le plaisir de jouer ces titres est à l’origine de ce projet et qu’il ne faut pas voir le mal ou l’appât du gain partout, parce que, pour les droits d’auteur c’est niet !

Ils sont trois, Baptiste au piano, Matt Penman à la basse et Greg Hutchinson à la batterie, je dois dire que c’est tout de même un sacré trio à la chasse aux standards d’aujourd’hui, les interprétations ajoutent parfois beaucoup comme sur « Almost Blue » d’Elvis Costello, magnifié. Le « Mother’s Little Helper » est lui aussi réinventé : c’est là tout le charme de ce disque, les musiciens ne disparaissent pas derrière les interprétations, mais les subliment.

« Life on Mars ? » devient une chouette ballade innocente et charmante, « Interstellar Overdrive » est également magnifique, énorme et mystérieux, ainsi que « Maryan » très beau également. Côté prise de son c’est du tout bon, alors il suffit de se laisser embarquer dans ce voyage dans le temps pour se sentir bien, nostalgie tu nous tiens !

Finalement un bel album qui trouvera sa place chez vous…

Baptiste Trotignon - Drive My Car (Official Video)


Baptiste Trotignon - Money (Audio)


Baptiste Trotignon - Karma Police (Audio)


Baptiste Trotignon - Mother's Little Helper (Audio)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » ven. 19 janv. 2024 04:48

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Jowee Omicil - SpiriTuaL HeaLinG: Bwa KaYimaN FreeDoM SuiTe – (2023)

J’ai passé commande de cet album il y a environ un mois, mais il n’arrivait pas, faute de ne pas avoir été expédié, mais, la patience aidant, il est enfin arrivé. Jowee Omicil fait partie des musiciens que j’ai découvert au travers de retransmissions de concert, et je sais qu’il peut être génial !

En deux mille dix-huit je m’étais procuré l’album « Love Matters », mais une partie de la magie n’était plus là, l’album étant un poil inégal, je n’insistais donc pas… Mais voilà qu’en décembre, Fred Goaty du journal Jazzmag écrit une belle chronique à propos de cette sortie et l’envie revient.

Dès le début il annonce la couleur, Free Jazz, Jowee joue free et je fantasme déjà… L’attente fut longue, comme je l’indiquais plus haut, mais pour moi ça ira, le service est fait et bien fait, la « FreeDoM SuiTe » est une belle suite, un beau chant, celui de la liberté…

Il faut dire que Jowee est d’origine haïtienne, un peu canadien également, et il vit à Paris. Il se souvient sur cet album du premier soulèvement de ses ancêtres, à Bois-Caïman, le quatorze août mille sept cent quatre-vingt-onze les fugitifs ont tué un…porc, ont bu son sang, frappé les tambours et exhumé les hymnes, avant de lancer la seule révolution d’esclaves qui a abouti à une libération.

L’histoire est belle, le bref livret merveilleusement écrit, et la musique ici est magique. Vingt-trois pièces se succèdent pour n’en former qu’une seule, comme un long serpentin articulé. Tous les renseignements tiennent sur cette pochette écrite à la main, un brouillon qu’il faut déchiffrer avec une loupe, pour y voir clair et extirper quelques renseignements.

Jowee joue des saxs alto et ténor, de la basse clarinette, du cornet et chante un peu. Randy Kerber et Jonathan Jurion sont aux claviers, Jendah Manga à la basse électrique, Arnaud Dolmen et Yoann Danier à la batterie, voici l’équipe, mais rien n’est vraiment détaillé, pas grave…

Quelques titres qui mettent dans l’ambiance, « BashQuiat » en hommage au peintre, « Ambuscade », « Float Your Bateau », « Spirit yo Baq », « Echappé Blues », « Haricot Vert », « Beat Coin », « Urgence Code », « LaPrye », de quoi partager un peu d’aventure. La musique dans un tel contexte ne peut être que free, éprise de liberté et de justice, pleine d’espérance, d’ailleurs elle avance comme un cheminement…

Elle décrit l’histoire et s’y inscrit, les initiés trouveront les sens cachés et le chemin parcouru, les verrous qui ont sauté et la liberté tout au bout, qui arrive, avec déjà son lot de misère, inscrit dans l’histoire.

Ce chant est beau car il est de libération et de renouveau, il nous fait découvrir les cérémonies vaudou, les rites sacrés et les hommages aux ancêtres qui gouvernent le monde des esprits. Cet album c’est aussi tout ça, la petite fumée et la danse, la possession des corps par les esprits et la force du peuple qui conquiert sa liberté en se libérant de l’asservissement…

Magnifique album !

BasHquiat intrO


°HAricoT VerT° By Jowee OmiciL OfficiaL VideO Of "SpiriTuaL HeaLinG : Bwa KaYimaN FreeDoM SuiTe"


Call To Warzone


Échapé Blues
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » sam. 20 janv. 2024 05:04

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Evan Parker ElectroAcoustic Ensemble With Sainkho Namtchylak – Fixing The Fluctuating Idea – (2021, Inédit)

Cette parution de deux mille vingt et un provient d’un concert beaucoup plus ancien, donné au Festival International de Musique Actuelle de Victoriaville au Canada, le dix-neuf mai quatre-vingt-seize. Deux titres sont joués, le premier « Fixing » de près de quarante minutes et le second « Fluctuating » de trente-deux minutes trente-trois, tout se tient, bien serré sur un Cd.

L’ElectroAcoustic Ensemble s’est formé quatre années auparavant, il est mené par Evan Parker aux saxs soprano et ténor, Phil Wachsmann aux violons, alto et électronique, Walter Prati également à l’électro, Marco Vecchi à l’électro et au traitement du son. Barry Guy est à la basse, Paul Lytton aux percus et à l’électro, l’invitée du jour est la vocaliste Sainkho Namtchylak.

Elle est originaire de Tuva, un territoire autonome de la République de Russie, situé au nord de la Mongolie. Son chant est une synthèse hybride d’influences croisées, issue du brassage de cultures propre à cette région. Sur cet album son chant est décisif, il est très expérimental, puissant et typé. Peut-être ne plaira-t-il pas d’emblée, c’est selon, mais il est très expressif, provenant de l’intérieur de l’être, embarquant passions, cris et plaintes, sans compromission. A lui seul il peut vous faire aimer ou détester cet album. Elle pourrait se situer, à titre indicatif, entre Yoko Ono et Björk.

« Fixing » est donc une improvisation parfois un peu tendue, mais habituellement assez calme, bien que discordante entre la voix quand elle surgit du magma, et les ondes électroniques souvent tordues, comme un gargouillis parfois informe, ou au contraire ascétique et minimal. Les instruments plus usuels, percus, basse, sax ou violon apporte une certaine chaleur dans le traitement du son.

La seconde pièce « Fluctuating » contient elle aussi des parties et une trame qui organise un peu l’avancée sonore. Sainkho ne fait plus partie de l’ensemble et la pièce s’organise de façon instrumentale, intégrant des silences ou des avancées à faible densité sonore. Il y a des passages percussifs, ou plus précisément des successions rapides d’ajouts sonores extrêmement brefs mais continus, introduisant petit à petit, une certaine force et une belle densité.

L’album est donc sans compromission, voué à l’improvisation totale, à la folie du temps qui passe, les pieds dans l’avant-garde et la tête dans les nuages, de quoi vous donner le tournis et vous plonger dans un espace/temps peu commun, soixante-douze minutes inhabituelles et déstabilisantes dans votre vie, de quoi remettre en question les habitudes et le train-train du quotidien…

Evan Parker ElectroAcoustic Ensemble With Sainkho Namtchylak – Fixing The Fluctuating Idea

1.Fixing 0:00
2.Fluctuating 39:41

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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » dim. 21 janv. 2024 04:42

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Le Tigre Des Platanes – Disappearing – (2013)

Le Tigre des Platanes est à l’origine un insecte nuisible venu d’Amérique, il s’est installé dans nos régions et décime les platanes dont il est friand. Mais ici il possède également l’accent toulousain, et recueille des musiciens que l’on connaît assez bien, pour qui suit ce fil régulièrement. Marc Démereau joue du sax baryton, de l’alto et des synthés, Mathieu Sourisseau est fidèle à sa guitare basse acoustique, Piéro Pépin joue de la trompette, du bugle et également des claviers, et le batteur est Fabien Ducombs.

C’est un album de reprises, bien sympa et souvent pêchues. Sept titres enlevés, judicieusement sélectionnés qui permettent à nos musiciens de bien s’éclater, et à nous d’en profiter également. Par exemple sur la seconde pièce signée John Parish, « How animals move/The Florida Recount », et bien, après un départ en douceur, les chevaux se lâchent, se débrident, et nous voici au milieu d’une cavalcade, crinière au vent, emportés pour le meilleur !

La troisième pièce est signée Butch Morris, « Spooning », très chouette également avec les deux souffleurs qui se donnent, baryton et bugle jouent de concert en se stimulant l’un, l’autre… Les thèmes sont choisis pour leur lyrisme et la puissance mélodique qu’ils envoient, ça fonctionne vraiment et cet album est très vite addictif.

La troisième pièce est un peu plus curieuse, rien d’étonnant puisqu’elle est signée par Fred Frith, Rebby Sharp et Skeleton Crew. « You may find a bed » en est le titre, un chouïa rock dans sa structure, avec des paroles chantées par Démereau, ça dérape un peu aux deux tiers de la pièce, où intervient une partie improvisée…

On se regonfle en énergie avec «Disappearing – Keep The Sharks From Your Heart » des excellents Sonny Sharrock, Olu Dara et Rip Rig and Panic, un truc assez funk, très solide, qui laisse également la place aux solos. Un autre titre de Parish un peu lent et étiré, avant que ne se referme l’album sur le tempétueux « Black Robert » de Dave Burrell qui gonfle comme une tempête !

Bref, un chouette album qui ne se prend pas la tête, mais qui est judicieusement mené par ce quartet de la ville « rôse » où, paraît-il, même les mémés aiment la castagne…

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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » lun. 22 janv. 2024 04:43

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Ivo Perelman, Matthew Shipp, Whit Dickey – The Clairvoyant – (2012)

Ça fait un bout de temps que je voulais vous le placer celui-ci, il m’avait tapé dans l’oreille, mais les actus de fin d’année, la liquidation des vingt-trois, et tout et tout… Il attendait donc que je le sorte à nouveau, il m’avait fait grande impression lors de précédentes écoutes, la cohésion magique entre les musiciens, un truc pas si ordinaire…

Pourtant un simple trio, mais un peu bancal car il n’y a pas de basse, mais ça ne s’entend pas, le cœur qui bat dans cette musique dispose d’énergie suffisante pour faire fonctionner tous les rouages, tout roule et coule, un flux génial et acéré, comme sur cette troisième pièce de folie, « Torture and Glory » ça s’appelle, un truc monstrueux, rare et d’une grande beauté, casse-gueule mais ça ne s’écroule pas, toujours sur la ligne blanche ou au bord du précipice, mais toujours du bon côté, celui qui permet de continuer la course folle, toujours plus loin, encore et encore, six minutes et trente secondes de folie-folle, le genre de truc qui ne s’oublie pas…

J’oubliais les présentations, Ivo Perelman saxophoniste ténor, Matthew Shipp pianiste et Whit Dickey, batteur. Les deux derniers ont beaucoup joué ensemble, et les deux premiers également, ils sont arrivés à un stade où tout se passe au feeling, sans parler, par anticipation, ils parlent le langage de la musique, c’est impressionnant, il suffit de fermer les yeux et de plonger pour entendre cette fusion en un seul, comme si ça allait de soi.

La pièce numéro cinq se nomme « State of Grace », et c’est bien ce qui se passe en ces lieux, une sorte d’état de grâce, avec un Perelman souvent au bord de la rupture, drivé par Shipp qui fourmille d’idées, c’est un anticipateur exceptionnel, il est toujours au bon endroit mais on ne s’en rend pas compte, c’est un magicien, du coup c’est forcément plus facile, mais on ne voit jamais le tour arriver, ni le truc qui va avec, on le croit parti, barré, dans les calanques, et puis le voilà qui pointe son nez au bon moment, le sourire aux lèvres…

Perelman est toujours dans l’urgence, comme sur le périlleux « Silken Threads » où il nous refait le coup de « Torture and Glory », pitié messieurs, vous allez finir par avoir notre peau ! Bon il nous emmène encore dans une balade folle avec « The Expedients of a Primitive Being » qui s’échappe encore des lois gravitationnelles avant de nous déposer sur un coussin bien cosy…

La dernière pièce de ce magnifique album se nomme « Fear of Eternety », bien que désormais après avoir vu ce que nous avons vu et traversé ce qu’on a traversé, plus rien ne peut nous faire peur, ni les tourbillons, ni les magiciens, ni la grande grêle ou la gueule du grêlé, car tout va, et l’éternité, là devant nous, nous, les clairvoyants, nous la toisons !

The Clairvoyant


Torture and Glory


Silken Threads


The Expedients of a Primitive Being
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mar. 23 janv. 2024 03:23

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Ari Brown – Venus – (1998)

Nous voici sur Delmark Records avec ce bel album du chicagoan Ari Brown. Je vous avais déjà présenté son précédent en tant que chef de band, « Ultimate Frontier » de quatre-vingt-seize, qui était également très réussi. Ari est bien connu pour sa participation active au Ritual Trio de Kahil El Zabar qu’il anime avec goût et justesse.

Il a participé à bien d’autres aventures musicales, faisant partie de la célèbre vie d’artiste qui anime Chicago, particulièrement dans la sphère jazz, toujours très bouillonnante, aujourd’hui encore. Cet album évoque pas mal de monde, dès le premier titre « Oui Lee » dédicacé au pianiste Willie Pickens, avec lequel il a joué en Europe lors de la tournée d’Elvin Jones, d’où la présence de ce « oui » dans le titre, certaine une private joke qui anima l’ambiance fraternelle.

« Trane Exemple » est un hommage au grand homme, le titre suivant, « Roscoe » est dédié à Roscoe Mitchel qui jouit d’un énorme respect de la part de tous ses collègues musiciens, et le dernier coup de chapeau concerne la dernière pièce, « Rashaan In The Serengeti », vouée à Rashaan Roland Kirk, une autre grande influence pour Ari Brown, particulièrement pour ses incroyables talents de multi-instrumentistes.

Ari Brown joue, au fil des pièces, des trois principaux saxophones, Kirk Brown du piano, Joseph Ben Israel de la contrebasse et Avreeayl Ra de la batterie. Il y a également quelques invités de passage, deux percussionnistes et un autre contrebassiste sur la pièce liée au Serengeti. Ari Brown ne se rattache pas aux saxophonistes de free jazz, bien qu’il puisse évidemment jouer free, mais ce n’est pas ce qui l’attire d'emblée.

Il préfère une certaine tradition, comme l’indique le choix de ses modèles, par contre c’est un véritable expert musicien au son clair, où chaque note se détache et s’identifie. On le voit sur le livret jouer en même temps de deux saxophones, le ténor et le soprano, un peu à la façon de Rashaan Roland Kirk. Il ne recherche pas le vedettariat ni la mise en avant, se contentant d’apporter son savoir-faire et sa contribution. Mis à part « Quiet Time » il a tout composé sur cet album.

Parmi le répertoire joué, les pièces les plus significatives sont « Oui Lee », le long « Venus », avec son exotisme, « Oh What a World We’reliving In » et le superbe et terreux « Rashaan In The Serengeti » où il embouche les saxs en même temps…

Un album modeste et sans prétention d’un extraordinaire musicien, très appelé, présent cette année sur « Since Time Is Gravity » du Joshua Abrams Natural Information Society, une belle référence à ajouter…

Ari Brown - Trane's Example


Venus


Rahsaan In The Serengeti


Baldhead Gerald
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 24 janv. 2024 04:12

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Duck Baker – Confabulations – (2021)

Duck Baker est un guitariste américain du style « fingerstyle », ce qui indique qu’il pince les cordes directement avec le bout des doigts (picking). Il adapte sa technique avec de nombreux styles différents de musique, allant du folk au blues, en passant par le jazz dit « classique » jusqu’au free jazz et à la musique d’avant-garde.

Cet album consiste en un ensemble de rencontres avec des musiciens différents, mais marqués par le goût de l’improvisation et de l’avant-garde, ce n’est pas pour rien que cet album est paru sur le label ESP. Il est donc constitué d’enregistrements compris entre quatre-vingt-quatorze pour le plus ancien, et deux mille dix-sept pour le plus récent.

Les invités forment le plus souvent des duos, mais il y a également un trio, et même un quartet. Duck Baker joue à priori de la guitare acoustique, peut-être parfois légèrement électrifiée. Il joue avec de sérieux clients, le premier duo est constitué avec le saxophoniste alto Michael Moore, ils jouent « Imp Romp 2 » une impro qui révèle la complicité et la concentration dans l’écoute de l’autre. C’est une constante de l’album avec des musiciens rompus à cet exercice.

La seconde pièce « Shenandoah » est jouée en compagnie du contrebassiste Mark Dresser qui utilise l’archet, ce qui se marie fort bien avec les cordes pincées de Baker, la pièce, improvisée, est lyrique à souhait. Le duo se reforme pour la neuvième pièce de l’album « Pope Slark » où Dresser joue pizzicato pour un échange chaud et touffu, très intuitif et chatoyant.

La troisième pièce consiste en un duo avec le grand Derek Bailey, dans sa propre maison, en deux mille deux. « Indie Pen Dance », on connaît la grande pratique de Bailey dans l’art de l’impro, que l’on entend légèrement à l’arrière de son interlocuteur, le soutenant tout en apportant des idées et des pistes, je suppose que tout cela a dû se terminer dans un grand sourire complice.

« East River Delta Blues » est également passionnante puisqu’elle met en piste le tromboniste légendaire Roswell Rudd, autour d’un thème qui met en place une chouette improvisation, les deux se retrouvent sur la dernière pièce de l’album « Signing Off », je dois bien admettre que je suis très sensible à la beauté des pièces jouées, ce blues déchirant et ce second titre enjoué et plein d’entrain.

« Ode To Joe » signée Glenn Miller est reprise par Alex Ward à la clarinette et Joe Williamson à la contrebasse, Duck Baker improvise encore mais dans la tradition. Il y a également un duo avec le pianiste Steve Beresford, puis encore un autre, avec le saxophoniste ténor John Butcher, les deux se sont déroulés au Cafe Oto de Londres. On voyage pas mal, entre Brooklyn, Stockholm et le Tonic de New York, que l’on a pas mal évoqué ces derniers temps.

Le quartet se forme autour de la clarinette d’Alex Ward, la contrebasse de John Edwards et la batterie de Steve Noble qui jouent « Tourbillion Air », qui constitue l’enregistrement le plus récent, daté de deux mille dix-sept, comme annoncé.

Cet album est donc l’occasion de rencontrer un grand guitariste américain, dont la réputation est sans doute à construire dans nos contrées, je suppose. Cette facette avant-gardiste n’est que l’une de celles qui le définit, j’imagine que chaque rencontre est restée dans son souvenir comme un moment privilégié…

Imp Romp 2


Shenandoah


Indie Pen Dance


East River Delta Blues
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 24 janv. 2024 17:18

Une petite remontée concernant le premier album de l'excellent Ari Brown:

Douglas a écrit :
jeu. 25 août 2022 03:45
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Ari Brown – Ultimate Frontier (1996)

En ces années-là le grand Ari Brown jouait avec le Kahil El’Zabar’s Ritual Trio ou encore avec l’Elvin Jones’Group, il avait également d’autres activités d’enregistrement mais peu de choses sous son nom en tant que leader. On remarque un album live de quatre-vingt-deux en co-lead avec Famoudou Don Moye, mais il semble assez peu courant et difficile à trouver.

Par chance cet album existe, chez Delmark, le label historique de Chicago. Ari Brown possède cette qualité que beaucoup peuvent envier, il joue du post-bop, mais avec des accents free qu’il maîtrise à merveille, ils surgissent soudainement dans sa musique, subrepticement, juste au bon endroit, avec la durée qui va, sans jamais effrayer personne, mais en ajoutant ce petit grain de folie qui le rend inimitable.

Côté répertoire il est l’auteur de tous les titres ici, sauf de la dernière pièce, le traditionnel « Motherless Child » dont il nous livre une éblouissante version. Multi-instrumentiste, il joue des saxs alto, ténor et soprano, mais également de la flûte et du piano, c’est un maître à chaque instrument. Kirk Brown joue du piano, c’est le propre frère d’Ari, Yosef Ben Israel est à la basse, Avreeayl Ra à la batterie et Dr. Cuz & Enoch aux percussions sur la seconde pièce de l’album, « Lester Bowie’s Gumbo Stew ». Il est également membre éminent de l’A.A.C.M de Chicago.

Sa discographie étant ce qu’elle est, bien qu’il soit très écouté et aimé à travers les deux formations auxquelles il collabore, il apparaît presque comme un nouveau ou un jeune dans les sorties discographiques de la fin des années quatre-vingt-dix, pourtant des albums comme celui-ci, à l’époque, il n’y en avait pas des tonnes !

La maîtrise est totale et exceptionnelle, cet album je l’écoute assez souvent en ce moment et chaque fois, sans en avoir l’air, il charme. Je dois ajouter que je me suis procuré le Dvd « Live At The Green Mill » de deux mille sept où il joue avec quatre des musiciens présents ici et c’est une véritable fête ou tout brille et se sent, le plaisir de jouer, le respect entre les musiciens, la grande maîtrise…

Toutes les pièces sont très réussies, mais j’aime particulièrement le morceau titre et la reprise qui décoiffe, « Big V » également, mais il est difficile d’extraire une pièce tant l’ensemble est équilibré.

Ultimate Frontier


Big V


Motherless Child


One for Luba
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » jeu. 25 janv. 2024 04:34

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Rova – The Circumference Of Reason – 2021)

Connu également sous le nom de « Rova Saxophone Quartet » cet ensemble est formé de Bruce Ackley aux saxophones soprano et ténor, Steve Adams aux saxophones alto et sopranino, Larry Ochs aux saxophones ténor et parfois sopranino et Jon Raskin aux saxophones baryton et parfois sopranino également. Arrivé juste une année après le « World Saxophone Quartet », Rova, et son prédécesseur, tiennent une ligne de qualité et de rendu exceptionnel, propre à séduire les amateurs de jazz.

La stratégie d’enregistrement de Rova s’étale sur un temps long, en premier c’est la composition des pièces, avec un travail précis de mise en place des différents saxophones, vient ensuite le temps des répétitions, puis celui des concerts, ce n’est qu’après cette phase que l’enregistrement est envisagé, stade ultime d’un lent mûrissement.

Ces phases induisent beaucoup d’improvisations et de travail de groupe, ainsi la pièce « NC 17 » connaît ici deux versions ouvertes très différentes, les structures convenues et retenues, telles qu’elles se présentent, ouvrent à la quasi impossibilité de jouer deux fois la même pièce. En effet, nous sommes placés dans le cadre d’improvisations structurées. La première version est très atmosphérique alors que la seconde est bouillonnante et prenante.

« The Circumference of Reason » signée Steve Adams qui a donné son titre à l’album est une composition très free, mais minimaliste, sans balancement, dans l’esprit des années quatre-vingts, où les silences, les murmures et les chuchotements sont le corps de l’œuvre qui se débat dans une structure vivante et connue de tous.

« Xenophobia » qui suit en arrive à créer des structures plus rythmées, plus répétitives qui donnent à la pièce une énergie entraînante. On note une reprise ainsi qu’un hommage à Glenn Spearman, disparu en quatre-vingt-dix-huit. Une pièce ouvre l’album et l’autre le ferme. La reprise se nomme « Extrapolation of The Inevitable », très dynamique, et l’hommage « The Enumeration ».

Sans surprise cet album ESP est globalement plutôt expérimental, et s’éloigne du funk-jazz prôné plus souvent par le World Saxophone Quartet.

The Extrapolation of the Inevitable


Xenophobia


NC 17, Version 2


The Circumference of Reason
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » ven. 26 janv. 2024 03:53

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Yussef Dayes – Black Classical Music – (2023)

Venu de la scène londonienne qui s’étiole un peu, voici un album du batteur Yussef Dayes qui se met en avant pour un projet de plus de soixante-quatorze minutes, de quoi donner libre court à sa fantaisie. Peut-être que certains se souviennent de l’album « Black Focus » de Yussef Kamaal qui avait bien cartonné en deux mille seize, et bien c’est le même Yussef …

C’est le genre d’album qui a pris le temps, les collaborations sont nombreuses et notées pour chaque pièce, de quoi donner l’envie, comme pour ce troisième titre « Raisins Under the Sun » où jouent Shabaka Hutchings, Sheila Maurice Grey, Theon Cross dans un nonette, mais c’est juste en passant, et ce n’est représentatif de rien, en fait…

Les collaborateurs les plus attitrés sont moins prestigieux mais plus impliqués dans l’album, comme Rocco Palladino à la basse, Charlie Stacey aux claviers et synthés, Venna au saxophone, Alexander Bourt aux percus et d’autres qui passent, et vont, et viennent…

L’album est plutôt groovy, mais genre cool, avec des humeurs chaudes et consensuelles, du genre plaisant, grosse basse ronde et bébé qui parle en sourdine, fondu dans la musique, c’est juste parfois sans doute un peu trop, mais ne boudons pas…

Il y en a qui passent également pour pousser la chansonnette et revendiquer ce côté pop qui s’installe sans gêne et sans prévenir, comme sur « Pon Di Plaza », légèrement crémeux. Juste après, les cordes arrivent, sans s’annoncer non plus, nous sommes un peu perdus, des violons, altos et violoncelles, mais que se passe-t-il ? Un interlude sans doute…

Retour au goût sucré, sur un fond sonore tapissé rose années soixante, batterie et basse qui groove encore, de ce côté tout fonctionne bien. Il faut bien convenir que les rares et brèves pièces un peu ethniques sont bienvenues, bien qu’inopinées… La signature fusion qui persiste semble vouloir nous figer dans l’ennui, et je m’interroge : y-a-t-il quelque chose à sauver ?

Que se passe-t-il sous cette épaisse chevelure moussue qui fait tant penser à Hendrix ? Rien ne surnage de cette pâte MTV, et plus j’avance et plus je respire : la fin bientôt, au bout du fil, tenir encore un peu… Le jazz s’est barré, hélas… il y a bien ce truc à deux qui est juste un peu bien, avec un peu d’énergie, répétitif mais bien pulsé par la batterie, « Presidential » ça s’appelle…

Je garde ma pièce et ne l’introduit pas dans le « Jukebox » qui arrive. Oui, oui je la glisse dans ma poche arrière, dans la tirelire… et je la joue numéro dix-sept sur Jamilah Barry qui chante « Woman’s Touch », juste parce que ça va, sans médiocrité, me semble-t-il, mais je ne suis plus sûr de rien, peut-être contaminé, faute d’avoir persévérer...

Bref, je cherchais un du genre pour remplir une case du classement deux mille vingt-trois, bref: voici ma déception de l'année...

Raisins Under the Sun (feat. Shabaka Hutchings)


Yussef Dayes & Chronixx - Pon Di Plaza


Presidential (feat. Jahaan Sweet)


Woman's Touch (feat. Jamilah Barry)


Yussef Dayes feat. Rocco Palladino - Tioga Pass [visualiser]
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » sam. 27 janv. 2024 04:53

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Brainville 3 – Trial By Headline – (2008)

Une plongée dans la musique RIO, entre rock et improvisations, avec des personnalités musicales de tout premier plan, songez-y : Hugh Hopper à la basse, Chris Cutler à la batterie et rien moins que Daevid Allen à la guitare et au chant ! Dans l’ordre il succède à « Live In The UK » par Brainville, avec Daevid Allen, Hugh Hopper et Pip Pyle, mais l’enregistrement de ce dernier est de moindre qualité technique. Par contre celui-ci est particulièrement satisfaisant de ce point de vue, et ce n’est pas négligeable.

Les fans de Gong et des groupes satellites reconnaîtront quelques titres bien identifiés, comme « Trial By Headline » qui ouvre l’album, ou « Didditagin » (« Did It Again ») qui le termine, il y a également « Ocean Mother » ou « Who's Afraid » et encore « I Bin Stoned Before » de quoi faire…

Mais il y a également toutes ces impros qui chamboulent l’ordonnancement, les paroles qui changent et évoluent, avec une guitare délicieuse et une section rythmique qui ne recule devant rien, c’est tout le charme de cet album qui puise dans le passé pour le faire évoluer et lui trouver un écho moderne et changeant, novateur, en gardant une grande ouverture d’esprit et s’ouvrant aux joies de l’impro et de la création spontanée…

Cette façon de reculer les limites est l’intérêt de l’album, car il est vain de quêter ce qui faisait autrefois l’intérêt des albums de Gong, par contre il y a une ouverture, par exemple sur « Basement Suite » et « Return to Basement », semblant totalement improvisés, avec un énorme Chris Cutter qui fait une démonstration éblouissante de son talent, Hopper est pas mal non plus à ce jeu, même si parfois le son de sa basse est un poil en retrait.

Il y a ensuite « I bin Stoned Before » qui vous rajeunira, car il ne faut évidemment par exclure le côté nostalgique qui fonctionne à fond avec les amateurs de « L’Ecole de Canterbury » qui ne peuvent jamais vraiment se détacher de la musique de ces groupes mythiques, bien plus que d’autres me semble-t-il, comme si le lien était plus fort et plus profond. Je pense que les amateurs de Soft Machine, Gong ou Henry Cow comprendront…

La tournée qui sert de support à l’album provient essentiellement du concert de Berlin, le dix juin deux mille sept, mais aussi de celui de Londres pour « Who’s Afraid ? » et de Tel Aviv pour « I bin Stoned Before » au « Zappa Club ».

Un album qui devrait plaire à quelques-uns sur ce forum.

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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » dim. 28 janv. 2024 04:23

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Erik Truffaz Quartet – Lune Rouge – (2019)

Un album assez réussi du « son » mis en bouteille par Erik Truffaz. Ce dernier possède une signature et un style assez consensuel qui plaît au public, une sorte de jazz atmosphérique, avec des repères mélodiques assez simples et une rythmique sans faille. Erik est habile et se plaît dans cette formule qui lui assure un certain succès.

Il ne faut pas croire qu’il soit si aisé de réussir sur un modèle qui paraît au premier abord assez simple, il faut de l’expérience et du talent pour arriver à une telle synthèse, mais, reconnaissons-le, ça fonctionne plutôt bien. Il y a un autre élément, qui n’est pas présent sur cet album, mais qui assure au trompettiste une autre partie de son succès, c’est sa grande ouverture d’esprit, il est toujours prêt à s’ouvrir aux autres et à partager la scène pour concrétiser des rencontres, par exemple avec le "rappeur" Nya au Festival de Montreal, ou bâtir des spectacles musicaux autour de projets, comme celui autour du dessinateur de BD Enki Bilal.

Concernant cet album, voici ce qu’il dit : « Nous avons confié les clés à Arthur Hnatek et lui avons demander de composer le matériel de base sur lequel le quartet a pu travailler le son, arranger puis déranger les éléments ». Hnatek est le batteur de la formation, il joue également du synthé. Son travail semble décisif pourtant les titres sont crédités au quartet en entier.

Il faut sans doute comprendre que ce qui fait la spécificité la plus importante de cette musique c’est, outre l’interprétation, le travail sur le son et les arrangements. Il y a cependant deux reprises, une chanson fort réussie, le troisième titre, « Reflections » avec Jose James au chant, et une autre, le titre neuf, « She’s The Moon » avec la voix d’Andrina Bollinger. Truffaz étant suisse, ça a été enregistré au studio du Flon à Lausanne. Marcello Giuliani est à la basse, Benoît Corboz joue du Rhodes, des synthés et du piano.

L’album est très bien distribué et se trouve à prix réduit un peu partout, pour ma part je possède mon exemplaire depuis pas mal de temps, alors si l’envie vous vient, profitez-en. Il n’y a rien de révolutionnaire mais un habile savoir-faire que l’on a pu remarquer à nouveau dans les deux derniers albums du trompettiste, autour du thème des musiques de film.

Pour avoir vu quelques concerts télévisés, je vous engage également à vous y rendre s’il passe par chez vous, le public est souvent très réceptif à son jazz-électro très bien ficelé… les titres les plus remarquables sont les titres chantés, qui saisissent d'emblée, mais aussi les instrumentaux, très habiles, « Reflexions », « Cycle by Cycle », « Lune Rouge », « Tanit », « Nostalgia » …

Lune rouge


Reflections (feat. José James)


Cycle by Cycle


She's The Moon (feat. Andrina Bollinger)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » lun. 29 janv. 2024 04:45

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Eugene Chadbourne – The Lost Eddie Chatterbox Session – (RE-2017)

L’album est de quatre-vingt-huit, il est sorti à l’origine sur support cassette, chez « No Prestige Records », avec une piètre qualité d’enregistrement, frôlant parfois le médiocre. Ça a été enregistré avec un matériel bon marché, sur un magnéto quatre pistes, le jour de Noël soixante-dix-sept, à San Francisco. Dans l’ordre des sorties, c’est le second album du guitariste. Il y a tout de même soixante-dix-huit minutes et trente-cinq secondes de zique calées sur le Cd.

Celui-ci est présenté comme étant remastérisé, bon, on remarque qu’Eugène a tendance à vocaliser en même temps qu’il joue, ce n’est pas forcément toujours du meilleur effet, bien que ça donne un peu de corps à la performance. Ses talents techniques sont par ailleurs exceptionnels et ses albums en solo sont assez recherchés, mais pas celui-ci, bien que cette dernière version, améliorée par « Corbett VS. Dempsey », soit la meilleure et pourrait prétendre à une certaine reconnaissance, car Eugène y est hors-normes.

Chadbourne joue exclusivement de la guitare acoustique solo, c’est très impressionnant car il est vraiment « d’dans », plongé à fond dans son truc. Ça se règle le plus souvent autour des trois minutes et souvent moins, avant de passer à la suivante. Il y a au total trente compos, dont un bon paquet de reprises de Thelonious Monk, une douzaine au compteur !

Les autres pièces sont également pour la plupart des reprises, ainsi il y en a trois de Charlie Parker, une d'Ornette Coleman, de Duke Ellington, Cole Porter, Coltrane et quelques-unes de signées par Chadbourne lui-même, une bonne huitaine. Il étonne, et stupéfie même, sur le répertoire de Monk qu’il maîtrise avec maestria, il se montre virtuose et intime de l’œuvre du moine, allant jusqu’à le personnaliser, comme sur les pièces « Criss Cross », « Hackensack » ou « Off Minor ». Il faut également signaler la présence de quatre titres supplémentaires, jusqu’alors inédits.

Évidemment, on ne peut conseiller un tel album pour faire connaissance, mais si vous tombez dessus, ne laissez pas passer, car du seul point de vue de la guitare, c’est tout de même exceptionnel. A l’époque Eugène enregistrait uniquement de la en guitare solo, et celui-ci, s’il n’y avait pas ce manque de définition, serait sans doute un des tout meilleurs !

Les seuls très courts extraits que j'ai trouvé se trouvent sur le site de vente Soundohm, ça se passe côté gauche, cliquer sur le "un" pour un extrait Monkien " Hackensack", puis sur le "deux"...

https://www.soundohm.com/product/the-lo ... chatterbox
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mar. 30 janv. 2024 05:50

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Steve Lacy – Shots – (1977)

Celui-ci je me le suis procuré lors de sa sortie ou pas loin, c’est dire si je le connais, je l’ai parcouru bien souvent autrefois, et j’en ai toujours gardé un grand souvenir, particulièrement pour le jeu de Steve Lacy, parfait, un son léché et très propre, si personnel qu’il en est inimitable. La pochette est également particulière avec toutes ces cibles, dont chacune correspond à un titre de l’album, le concepteur en est Brion Gysin .

D’ailleurs cet album c’est un peu plus qu’une étape à l’intérieur d’un cheminement, « Shots » fonctionne comme un « cycle », composé entre soixante-douze et soixante-quatorze, qui prend ici son premier envol discographique, mais il sera réinterprété plus tard en solo, de quoi recréer l’œuvre en lui donnant un nouveau souffle, plus aride, plus pur.

La particularité ici tient dans l’accompagnement de Masa Kwate qui joue des percussions traditionnelles japonaises. C’est très épuré, presque minimal, le percussionniste ne vise qu’à l’essentiel, loin de la frénésie africaine souvent associée aux percussions. L’épouse de Steve Lacy, Irène Aebi chante doucement et joue du violon sur la troisième pièce, « The Kiss ».

Je ne l’ai pas encore précisé mais Steve Lacy joue de son saxophone soprano qu’il aime tant, il se montre excellentissime sur cet album et les huit pièces s’inscrivent dans une parfaite continuité, s’enchaînant parfaitement avec une tendre proximité. Avec Steve on vit souvent le paradoxe du feu qui couve sous la glace, c’est exactement le sentiment qu’il donne.

Sur la pochette, des photos en noir et blanc sont incrustées dans les cibles, « Moms » avec la photo de sa maman, « Pops » avec celle du papa, « The Kiss » où un couple sculpté dans la pierre partagent un baiser, on voit aussi les enfants et les grands-parents, c’est assez intime, mais ce genre de photos se trouvent dans toutes les familles de ces générations-là.

C’est un album « Musica Records », enregistré aux Studios Grande Armée de Paris, le quinze octobre soixante-dix-sept. On signale que les masters ont disparu et que la réédition en Cd a été effectuée à partir d’une autre source. Mais l’original se trouve encore facilement malgré un tirage un peu restreint. Il est à noter que cet album reçut "Le Grand Prix De L'Académie Du Jazz 1980".

Un chouette album provenant d’une belle période pour Steve, très créative et pleine d’espoir.

Aucune trace sonore de cet album sur le web, enfin je ne trouve pas, alors je vous propose d'autres versions des pièces que je trouve, hélas bien différentes de celles de l'album qui sont plus courtes et ramassées, mais tout de même intéressantes, bien que dans un contexte bien différent:

Moms


Steve Lacy - The Kiss (1987)


The Wire
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 31 janv. 2024 03:58

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Second Brain – Kali Yuga – (2023)

Un vinyle qui se remarque par sa pochette assez originale, avec ce dessin style BD et ses multiples petits détails, elle est reprise intégralement sur un poster géant à l’intérieur du vinyle, côté verso des infos et des portraits, toujours dessinés, des musiciens jouant sur l’album, et il y en a pas mal…

C’est Adrien Pigeat qui lead ici, compositeur, guitariste, joueur de synthé, au chant également, il y a Nicolas Py à la batterie, Vincenzo de Fraia à la basse, Nikola Kovacevic aux claviers, synthés, Nick Linnik à la guitare électrique, Allan Tincrès aux percussions et Bioz au chant, mais ce n’est pas tout car il y a également une section de quatre cuivres et un saxophoniste…

Côté musique ça sonne de façon ordrée, les arrangements et les orchestrations semblent suivis à la lettre, incorporant des solos bien organisés. Le style semble prendre ses racines dans la période « jazz-Rock », tout semble dépoussiéré avec un son très clair, presque propre qui aimerait se situer dans une lignée Zapaïenne, mais sans le grain de folie ni la dextérité nécessaire, bien que l’essai soit tout de même bien tenté.

En invité de luxe il y a Mike "Maz" Maher, le trompettiste de Snarky Puppy, sur les deux parties de « Attitudes », il y aurait sans doute une analogie à faire entre ses deux formations, mais « Second Brain » ne dispose pas de guitaristes aussi exceptionnels que ceux qui animent la formation pléthorique de Brooklyn, Bob Lanzetti, Chris McQueen et Mark Lettieri, enfin c’est mon avis, même s’ils sont talentueux.

Ce projet a mûri, enregistré entre août 2019 et décembre 2021, de Londres à l’île de la Réunion où le groupe a été confronté aux musiques locales, bien qu'on n’entende pas la maloya par ici, mais tout de même un funk bien appuyé, propret et aisément accessible.

Une musique agréable et sans risque, qui creuse son sillon tranquilou.

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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » jeu. 1 févr. 2024 02:58

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Frank Wright Quartet – Last Polka In Nancy ? (1973)

Je déterre ce vieux vinyle des rayons car il a la particularité de posséder sur la pochette la signature des musiciens, la petite, sur la partie blanche est celle d’Alan Silva, le contrebassiste, en face, plus imposante, celle de Muhammad Ali le batteur, un peu plus haut mais partiellement effacée celle de Franck Wright, le saxophoniste, et enfin un dessin avec un petit homme représenté, fumant la pipe et portant un nœud papillon style pales d’hélices, peut-être le pianiste Bobby Few, qui sait ?

C’est un enregistrement Live au Festival « Jazz Pulsations » de Nancy daté du dix octobre soixante-treize, c’est le volume deux des concerts, je possède bien le volume un, enregistré en soixante-douze à Rotterdam possiblement meilleur, bien que celui-ci soit bien fameux tout de même, et que certains le préfèrent. Je me suis donc décidé de vous présenter celui-ci, paru sur le fameux label « Center Of The World », il porte le sigle CW002 et se distingue par une pochette différente de la série "Center Of The World".

Ces enregistrements sont un peu mythiques car assez difficiles à trouver à l’époque, par chance parus en France, et depuis réédités sur Cd. C’est vraiment le free d’alors, comme on peut l’imaginer quand il est bon, puissant, nécessitant un engagement total et entier de la part des musiciens, très physique, brut et sans compromis, ceux qui ont goûté cette piqûre-là, en cette période, n’en sont que partiellement remis aujourd’hui !

Engagement total, ça commence par le drumming de Muhammad Ali qui tape sans cesse, les cymbales et les caisses, grosse et claire, souvent sans répit, avec une puissance qui met à mal le matériel, si la baguette se fend, il n’y a pas de hasard… Le Révérend Frank Wright, saxophoniste hurleur, leader dans sa catégorie, balance sans compromis, on l’entend également à la basse clarinette sur « Guanna Dance Part 1 », et Alan Silva, qui arrive à se faire entendre, au milieu de ce tintamarre, le free; il l’a dans le sang, il en est irrigué: c'est sa manière de vivre. Et puis il y a Bobby Few qui se prend pour Cecil Taylor, lui parfois si distingué, se défoule dans la sueur et l’abandon…

Bon, je vous rassure il y a des périodes plus calmes, comme celle où chacun joue des percus et fait place à la vérité des rythmes, à la fin du long « Winter Echoes » De Bobby Few. Il est le compositeur ici, avec Alan Silva également, mais les pièces sont tellement ouvertes qu’il est difficile d’en tirer des conclusions. C’est Jef Gilson qui enregistre tout ça.

Le titre de l’album prend sa source dans la dernière compo, « Doing The Polka » d’une bonne dizaine de minutes, on retrouve les signes distinctifs de la célèbre « danse » avec des « yo-yo » countrysants, un joyeux mélange …

Center Of The World (Frank Wright,Alan Silva,Bobby Few,Muhammad Ali) ‎– Last Polka In Nancy! Vol 2


Frank Wright Quartet - Doing The Polka
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » ven. 2 févr. 2024 03:16

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Don Cherry – Live In Ankara – (1978)

Parlons un peu de cet album qu’on évoque trop rarement, pourtant il n’est pas si mal ! Mon exemplaire est mono, un vinyle chez « Sonet » un petit label anglais. L’enregistrement présenté date en fait du vingt-trois novembre soixante-neuf, en live à l’ambassade américaine d’Ankara. Au début de ce même mois, Don Cherry avait en effet assisté à un concert de Miles Davis à Paris salle Playel. Selon les notes de pochette de Moki, épouse de Don, ce dernier est en quête d’écoute, de recherche musicale et de sons nouveaux, c’est ce qui motive son voyage en Turquie.

Don est pris en main par Okay Temiz avec lequel il joue fréquemment, pour ce concert il va s’entourer de musiciens turcs. Temiz joue de la batterie et des percussions, Selçuk Sun de la basse, Irfan Sümer des percus et du saxo ténor, Don, lui, utilise la trompette, la trumpet-zürna, un hautbois d’origine perse, le piano, la flûte et le chant.

Ce qui est remarquable c’est le nombre de pièces, quinze au total, dont deux qui dépassent légèrement les cinq minutes, cinq sont autour des trois minutes et les autres beaucoup plus courtes, souvent créées autour d’un chouette thème, on connaît le don de Don pour trouver rapidement de belles mélodies qui vont bien.

Malgré cela on ne ressent pas du tout à l’écoute une impression hachée, car toutes les pièces sont agencées en un long fil qui s’arrête à la fin de chaque face, aussi, l’impression sonore semble nous placer face à deux longues pièces consécutives. Ainsi, en vérité, l’album est vraiment agréable, dépaysant, bourré de petites merveilles cachées et d’idées nombreuses et dépaysantes.

Le répertoire est assez diversifié avec six thèmes de Don Cherry, deux d’Ornette Coleman, « Ornette’s Concept » et « Ornette Tune », la reprise de « The Creator Has a Masterplan » de Pharoah Sanders et Leon Thomas. Il y a également beaucoup de matériel folk, d’origine turc, arrangé par le trompettiste de jazz turc Maffy Falay, six pièces au total.

C’est Moki qui est à l’origine de cette belle pochette, voici ce qu’elle confie à la fin du concert : « La soirée s’est terminée sur un sentiment incroyable. C’est ce dont je me souviens de ce concert : un sentiment de liberté et de fun. »

Nous n'en doutons pas, alors profitons, nous aussi, de ce bel album, à rapprocher de « Mu ».

Don Cherry - Live in Ankara(1969)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » dim. 4 févr. 2024 04:43

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The John Carter Quintet – Night Fire – (1981)

C’était une époque où le clarinettiste John carter était internationalement reconnu, c’est en novembre quatre-vingt-neuf qu’il enregistre cet album chez Black Saint, le quarante-septième du label. Il est accompagné par le trompettiste Bobby Bradford, le flûtiste James Newton, le contrebassiste Roberto Miranda et le batteur percussionniste William Jeffrey, une formation de très haut niveau.

Les compos sont toutes de John Carter, il possède un goût pour l’écriture et compose facilement, il a joué avec Ornette Coleman et Charles Moffett dans les années … quarante ! Imaginez ! Et le voici au début des années quatre-vingts, reconnu, venu en Italie, à Milan, comme tant d’autres, pour y enregistrer de la musique d’avant-garde, du free, cette musique un peu bizarre parfois pas facile à écouter, ou même à entendre, diront quelques-uns…

Pourtant l’album est beau et les musiciens exceptionnels, même si chacun semble parfois suivre son chemin, il n’en est rien, la route est balisée et les sorties ne sont pas toutes bienvenues. Pourtant les impros sont la règle et on entend la ligne, comme sur « Morning Bell » qui ouvre lentement l’album, avant d’accélérer, clarinette, flûte et trompette poussées par la rythmique qui se tend, les trois corps périphériques explosent en improvisations plus ou moins coordonnées, jusqu’à l’explosion finale.

Le groove est là, essentiel, qui maintient les impétuosités, « Sweet Sunset » repart avec calme, mélodique et harmonique, à un moment la clarinette s’échappe tout doux, elle part à la découverte et s’en va, badine, la rythmique semble perdre, elle aussi, ses repères, derrière la belle qui batifole… Viennent bientôt la flûte et la trompette, apporter soutien et montrer chemin… Tout s’énerve un peu avec « Juba Stomp » où chacun s’en va dans une course folle.

La seconde face s’ouvre avec « Bucking » qui, après un démarrage ordré se lance en épisodes free, où chacun improvise dans son espace sonore, avant de se regrouper vers un motif unitaire. La dernière pièce est le morceau titre « Night Fire » sous-titré -An American Folk Suite- entre tirets. C’est sans doute en rapport avec le Grand Œuvre de James Carter, « Roots and Folklore : Episodes in the Development of American Folk Music » qui raconte l’histoire Afro Américaine en cinq albums qui furent acclamés alors par la critique musicale unanime.

John Carter Quintet "Morning Bell"


Sweet Sunset


Juba Stomp


Night Fire
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