J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

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Douglas
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » lun. 5 févr. 2024 04:23

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John Handy. Ali Akbar Khan. Dr. L. Subramaniam – Rainbow – (1981)

Vraiment par hasard en fouillant dans mon fourbi, voilà que je tombe sur cet album, dont il ne me reste, véritablement, aucun souvenir ! Je connais John Andy qui est un saxophoniste alto, mais rien concernant cet album, ni le titre, ni la pochette, ni rien… La mémoire quand tu t’en vas… C’est un album Mps series, sous label de Verve.

Du coup me vient l’envie de l’écouter, mais aussi de vous en faire part car la musique indienne possède bien des charmes, et Ali Akbar Khan est un fameux joueur de sarod, quant au Dr. Subramaniam il joue du violon à la mode indienne, par ailleurs Shyam Kane joue des tablas et Mary Johnson, du tanpura.

Je ne crie pas au chef d’œuvre, mais la musique est tout de même sympa, cinq compos sont proposées, trois d’un côté et deux de l’autre, elles tournent entre six minutes trente et treize minutes, donc moyennement longues, de quoi laisser le temps au temps. Chacun peut jouer dans la durée, c’est d’ailleurs là tout le charme, laisser le climat s’établir, l’ambiance s’installer et les solistes s’exprimer, sur le tapis percussif et le sarod.

Les trois titres de la face une sont composés par chacun des trois leaders, on ne sent pas vraiment une grande spiritualité dans cette musique aux accents plutôt traditionnels, mais plutôt une certaine recherche du confort d’écoute, de la quête mélodique et d’un climat propice à ce qui pourrait relever du bien-être et de la relaxation, la recherche d’une certaine positivité et d’un certain relâchement.

« Garland of Flowers » qui ouvre la face B semble composée par les trois partenaires, ce qui suggère probablement une improvisation et une démarche commune, on remarque aisément le saxophone de John Handy qui se glisse avec aisance dans le flot musical où chacun s’exprime à tour de rôle, en gardant les bonnes manières et le côté respectueux du jazz.

L’album s’achève avec « Kali dance » signé du bon Dr. violoniste, dont on a pu goûter les saillies au fil de l’écoute, toujours impeccable, judicieux et au bon endroit. Très à l’aise pour les compos comme on le constate à nouveau, après le très beau morceau-titre de l’album.

Il est à noter que c’est la seconde collaboration entre John Handy et Ali Akbar Khan qui ont enregistré l’album « Karuna Supreme » en soixante-seize.

John Handy & Ali Akbar Khan - Rainbow Serenade


Rajashik - The Majesty of Wisdom


Garland of Flowers


Kali Dance
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Message par Douglas » mar. 6 févr. 2024 03:42

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Isaiah Collier – Parallel Universe – (2023)

Voici un album pas si facile à faire venir si on veut éviter les taxes d’importation, devenues trop souvent un appoint à la trésorerie de La Poste, voire une arnaque où l’on paie deux fois, à l’étranger lors de la commande puis en France à la réception, bref, mieux vaut faire gaffe !

Il faut dire que pour l’instant l’album est uniquement dispo en vinyle, mais l’objet est vraiment superbe, malgré une pochette simple grand format. A l’intérieur deux vinyles et un livret magnifique, avec des photos de tous les intervenants en grand format, les détails que l’on aime et une épaisseur qui témoigne du soin apporté à l’ensemble.

Les deux sous-pochettes sont également classieuses, avec à l’intérieur des protections antistatiques, la grande classe. Mais ce n’est pas tout, côté son c’est également superbe, les conditions du live grâce à la méthode « Direct To Disc Session », merci au label « Night Dreamer », de quoi vous éblouir ! Même moi j’en profite malgré que j’aie eu récemment un tympan percé, fort heureusement, depuis cicatrisé…

Côté répartition des pièces c’est assez simple, deux par face, ce qui fait huit au total, mais il faut peut-être évoquer également le style de l’album, car ce n’est pas véritablement du « pur » jazz, bien qu’on ne s’en plaigne pas. En effet le jazz d’Isaiah est mâtiné de soul, il penche vers ce côté souvent dansant, groovy, avec des chants ou des chœurs qui vous font chavirer.

Et comme le ténor est puissant, il en joue ainsi que de la flûte et du chant, ça balançait sévère, je suppose, dans les studios d’enregistrement, Jimetta Rose au chant, Julian Davis Reid aux claviers, Micah Collier à la basse électrique, Corey Wilkes à la trompette, Michael Damani à la guitare, James Russel Sims à la batterie, Ra au kalimba et Sonny Daze au chant « additionnel ». Ils sont tous, en gros plan, dans le livret…

Il faut également ajouter que notre musicien est originaire de Chicago et qu’il dédie cet album à la musique « soul » d’autrefois, retour au Rhodes et à la guitare « wah-wah » curieusement je ne vois pas l’auteur des compos, donc par défaut je les crédite au leader.

Un album très agréable sans véritable « coup de mou », il tient la distance et réussit son projet en proposant une musique soul sans prétention et plutôt bien fichue, qui fait plaisir et donne envie de frapper du pied !

Eggun


Parallel Universe


Retreat


Village Song
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Message par Douglas » mer. 7 févr. 2024 03:21

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Mary Halvorson – Cloudward – (2024)

Cet album sera la première parution, dans ce coin, d’un album paru cette année, malgré qu’il ait été composé et enregistré en mars deux mille vingt-trois. Bien que l’album soit au nom de Mary Halvorson et qu’elle en a écrit toutes les compositions et fait tous les arrangements, les musiciens qui jouent ici forment le sextet « Amaryllis ».

Mary est bien entendu à la guitare, Adam O’Farill à la trompette, Jacob Garchik au trombone, Patricia Brennan au vibraphone, Nick Dunston à la basse et Tomas Fujiwara à la batterie, il y a une invitée sur le titre « Incarnadine », c’est Laurie Anderson qui joue du violon.

Voici le décor bien planté, je peux déjà vous donner mon impression d’ensemble qui est très bonne, l’album est vraiment une belle réussite, il y a beaucoup d’équilibre et de justesse ici, que ce soit dans le jeu des musiciens, vraiment rutilant, ou dans les compos, qui brillent par la très grande qualité des arrangements, tout est lumineux ici.

On sent le travail dans les détails, la précision jusque dans la finesse, l’équilibre magique et le rôle extraordinairement pesé de chaque instrument, pour tout dire on est même ébloui ! Il m’arrive de penser à John Zorn, maître à ce jeu-là, ce premier album de l’année me semble tout bonnement extraordinaire !

Il est même difficile de sortir un titre, tant l’ensemble est parfait, avec quelque-chose d’hors-norme, ce sans faute probablement. Mary Halvorson joue du sextet dans son ensemble, jamais la guitare ne prend le dessus, plus qu’un autre instrument, il est même probable que ce soit le vibraphone de Patricia Brennan qui soit le plus en avant, mais rien n’est sûr, car il se passe tellement de choses autour, particulièrement ce jeu de guitare malin et roué qui occupe les espaces, pourtant serrés.

La sixième pièce « Incarnadine », où joue Laurie Anderson, est sans doute la plus ouverte, laissant une grande place à l’improvisation, desserrant le délicieux étau de ce contrôle, opéré par la précision chirurgicale de l’hôtesse, maîtresse des lieux, de l’ordonnancement, et garante de ce fol équilibre qui jamais ne branle.

Tout le monde comprend bien qu’ici se trouve le meilleur album de l’année, particulièrement par son unicité dans ces parages, mais il se pourrait que cet état de chose dure… c’est ce que pourrait laisser penser cette pièce, « Ultramarine », un poil plus longue que toutes les autres, qui ferme cet album hautement recommandable, si je puis me permettre !

Mary Halvorson - The Gate (Official Visualizer)


The Tower


Collapsing Mouth


Ultramarine
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Message par Douglas » jeu. 8 févr. 2024 03:43

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John Lewis : Jazz Abstractions - Compositions by Gunther Schuller & Jim Hall – (1961)

Ma version n’est pas celle de la pochette mais une réédition anglaise de soixante-six, qui ne figure même pas sur Discogs qui ne contient que la version mono. Mais qu’importe car l’album ne manque pas d’intérêt. Il s’ancre dans ce qu’on a appelé en ce début des sixties, « The Third Stream », ce troisième courant qui aurait aimé davantage se développer et devenir une véritable influence dans le jazz.

Mais cela ne se fit pas, malgré tout ce témoignage est l’un des plus aboutis du genre, et il mérite vraiment que l’on s’y intéresse. Rien que pour la qualité des musiciens qui se trouvent ici. John Lewis est le pianiste du Modern Jazz Quartet, c’est l’une des figures de proue de ce mouvement bien que l’on cite volontiers Gunther Schuller comme en étant le pivot central.

Le guitariste Jim Hall est aussi de la fête, lui aussi un cadre sur cet album où figurent d’autres totems, Ornette Coleman au saxophone alto, Eric Dolphy lui aussi à l’alto, mais aussi à la flûte et à la clarinette basse, il suffit de tendre l’oreille pour identifier qui joue, tant les styles de ces deux altistes sont différents. Bill Evans est au piano, Scott LaFaro joue essentiellement de la basse, mais par deux fois il laisse la place. Joseph Tekula joue du violoncelle et Stick Evans est à la batterie. On remarque également deux violonistes, « Third Stream » oblige. Je ne rentre pas dans les détails car ça bouge pas mal, mais on peut remarquer Eddie Costa au vibraphone sur « Django ».

Pour dire les choses simplement, ce troisième courant se voulait être une sorte d’union entre le jazz et certaines tendances de la musique classique, créant un genre un peu hybride, mais agréable à l’oreille et réunissant ce qu’il y a de plus agréable dans ces deux musiques, pourvu qu’elles soient « cherchantes ».

La première pièce « Abstractions » composée par Schuller qui a presque tout écrit ici, nous plonge directement dans ce monde réuni, où les cordes se font entendre, la forme est très contemporaine et le sax alto d’Ornette Coleman se plait et nous enivre. « Piece For Guitar & Strings » où brille Jim Hall évidemment, est également une belle réussite, les cordes tissent une formidable toile où se promène la guitare du jazzman qui se montre très pétillant, gravant ici un magnifique témoignage des possibles.

Arrive ensuite la pièce qui justifie le nom de John Lewis écris en gros sur la pochette de l’album, bien qu'il y ait là comme une sorte d'imposture. C’est le célèbre « Django », bien sûr, mais retravaillé par Gunther Schuller qui réinvente la compo pour la situer dans un écrin et une dimension autre, les quatre « Variant » qui se succèdent sont autant de faces différentes de la mélodie, accrochant à chaque fois un caractère différent au thème…

La face B est consacrée au seul Monk « Variants On A Theme Of Thelonious Monk (Criss-Cross) » voit arriver Eric Dolphy en excellente forme, tant à l’alto qu’à la flûte ou à la basse clarinette, dialoguant avec Ornette Coleman, c’est sûr l’affiche vaut le détour ! On baigne dans les mêmes eaux et ici, l’envers vaut l’endroit, car les solistes s’expriment abondamment, pendant le petit quart d’heure que dure la pièce…

A l’époque cette musique était probablement qualifiée d’avant-garde, aujourd’hui elle n’effraierait pas grand monde, car le temps a tendance à gommer certaines fulgurances, mais c’est bien du jazz qui s’entend avant tout, et du bon, car cet album est à redécouvrir !

Variants on a Theme of John Lewis (Django) : Variant I


Piece for Guitar and Strings


Variants on a Theme of Thelonious Monk (Criss Cross) : Variant I


Abstraction
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » ven. 9 févr. 2024 03:03

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Ambrose Akinmusire – Beauty Is Enough – (2023)

Voici le premier album du nouveau label créé par Ambrose Akinmusire, il inaugure « Origami Harvest » et porte le numéro de série « un ». Cet album est très particulier pour diverses raisons, quand on a comme lui joué sur le plus prestigieux label de jazz « Blue Note », on peut s’interroger sur le bien-fondé d’un tel acte.

La première raison est tout d’abord artistique car le projet qu’il porte avec cet album est peu compatible avec les préoccupations d’une major, qui réfléchit souvent avec des billets. En effet, cet album est voué à la trompette solo. Cette originalité ne le prédispose pas à un gros succès commercial, mais Ambrose place son art avant tout et tient à cet album.

Il en parle avec des mots qui éclairent son projet. Il faut s’imaginer qu’un musicien comme lui peut tout faire avec son instrument, la technique, l’oreille absolue, le bagage est immense et fabuleux, il n’y a pas de réelles limites à son savoir-faire. Il est largement reconnu par ses pairs comme un praticien exceptionnel.

La réponse à tout ça est contenue dans le titre de l’album : « Beauty Is Enough ». C’est le message qui le guide et qu’il entend faire passer, au-delà de la pratique de l’instrument et de sa capacité à jouer tout ce qui peut lui passer par la tête. D’ailleurs on peut remarquer la minceur relative de sa discographie, là où tant d’autres multiplient les albums, lui se consacre longuement à chacun, et chaque sortie est une fête.

La quête de la beauté, voilà ce qui le mène et le guide, au-delà du reste, du bagage et des moyens techniques. Voici ses mots : « Je voulais donc faire un projet solo qui consiste simplement à m'asseoir au centre de la beauté. Le centre de soi, qui est, pour moi, la beauté. »

C’est donc à l'Église Saint-Eustache, située dans le premier arrondissement de Paris, qu’Ambrose a souhaité effectuer l’enregistrement de l’œuvre, pour se faire il a loué l'espace lui-même, et a enregistré en présence d'un ingénieur du son, Julien Bassères.

Beaucoup de simplicité et pas d’esbroufe, de l’âme au souffle, et du souffle à l’âme, cette fois-ci la vôtre… Quatorze parties qui se succèdent, chacune différente des autres, avec sa vérité, son sens poétique, sa fêlure, son questionnement répétitif, son air badin où son air de quitter la piste… C’est également en ces moments que l’on pense à ceux que l’on aime, alors des dédicaces, des titres qui ne sont que des prénoms, des odes où s’ouvre le cœur.

Par ailleurs une simple citation de Joan Didion se trouve sur le verso de l’intercalaire se trouvant dans l’album : « Je veux dire, peut-être que je détenais tous les as, mais quel était le jeu ? »

To: Taymoor


Cora Campbell


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Self -Portrait


Launchpad
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » sam. 10 févr. 2024 04:28

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Ill Considered – Liminal Space – (2022)

Tiens ! Encore un drôle de truc qui m’arrive, par je ne sais quelle diablerie je viens de mettre la main sur cet album sous cello, mal rangé, et oublié dans un coin improbable, si, si, un vinyle, et un fameux encore ! Un p’tit mot pour fêter ça !

Incroyable ! C’est un peu comme si un « moi-même » du passé avait envoyé un cadeau au « moi-même » du présent, en tous cas merci mon gars, t’es bien sympa, mais faudra à veiller que ça ne se reproduise pas trop, autrement le « moi-même » du futur, finira entouré de blouses blanches avant l’heure !

En plus il est très bon cet album, je suis d’assez près cette formation, bien qu’il ne soit pas toujours simple de se procurer les albums, la distribution étant plutôt aléatoire, certains se cachant même aux yeux du proprio ! L’ADN du groupe c’est de faire des enregistrements live et il semble qu’ici il y ait une modification dans la démarche, certaines parties semblant greffées à postériori.

Côté personnel on retrouve toujours le lead d’Idris Rahman au sax, clarinette et basse clarinette ainsi qu’à la flûte. Emre Ramazanoglu joue de la batterie et Liran Donin est à la basse. L’ancien tutulaire du poste, Leon Brichard, fait un retour sur « Sandstorm », la deuxième pièce de l’album.

La nouveauté c’est qu’autour de ce trio fantastique viennent se greffer d’autres musiciens, mais cette fois-ci pour un travail de studio, incorporés à la musique précédemment enregistrée : la flûtiste Tamar Osborn, les saxophonistes ténor Kaidi Akinnibi et Ahnanse, le tubiste Theon Cross, le trompettiste Robin Hopcraft et le percussionniste Sarathy Korwar.

Ainsi le trio se voit, au fil des pièces, transformé en quartet ou autre, jusqu’à l’octet pour certains titres. Ces transformations changent jusqu’à la personnalité foncière du trio, pourtant rien n’est à regretter car l’album est magnifique.

Il garde cette accessibilité qui est la marque du groupe, avec ce côté un peu rentre-dedans qui fait plaisir. Des influences orientales sont présentes, on pourrait se croire, à certains moments, au Maroc, à la recherche de la transe... Cette greffe est particulièrement prolifique et bien souvent on en redemande encore, alors que la pièce se termine.

De ce côté aussi nous sommes comblés, l’album dépasse en effet l’heure d’écoute, les pièces étant souvent assez conséquentes, il y a là un matériel à profusion pour alimenter les concerts. Je ne l’ai pas précisé mais l’album est double avec une face « Etched », c’est-à-dire non enregistrée, mais remplacée par une gravure sur le vinyle.

Un superbe album en même temps qu'une belle trouvaille !

Ill Considered - Liminal Space (2021) [Full Album]
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » dim. 11 févr. 2024 03:59

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Rahsaan Roland Kirk – Live in Paris (1970) – (RE-2024)

Cet album est en fait une réédition partielle d’un enregistrement paru à l’origine sur deux vinyles. Le son est signalé « restauré », pour cette occasion. Le concert s’est déroulé au Studio 104 de la Maison de la Radio, par « Rahsaan Roland Kirk And His Vibration Society ». C’est-à-dire en compagnie de Dick Griffin au trombone, Ron Burton au piano, Vernon Martin à la basse, Jerome Cooper à la batterie et Joe Texidor aux Percussions.

Roland Kirk, lui, joue du strich, un saxophone soprano droit, des Saxs alto, soprano et ténor, de la flûte, de la clarinette et du manzello, un saxophone soprano recourbé, il peut lui arriver également de jouer de l’harmonica, du kazoo, des sifflets ou de l’horloge à coucou, tendez l’oreille… En effet le musicien aveugle est réputé pour être un multi-instrumentiste remarquable et étonnant, il est également connu pour jouer de plusieurs instruments en même temps, y compris des instruments à anche par exemple.

Pour avoir vu des concerts filmés c’est assez étonnant, une fois guidé par un autre musicien qui lui prête le bras, et placé devant son micro, il semble jouer comme n’importe qui, sans entraves, avec tous ces instruments qui pendent à son cou ! Il fait évidemment parti des musiciens iconiques du jazz, de ceux qui sont reconnaissables immédiatement à l’écoute.

Ici le répertoire du concert original est amputé d’une bonne partie, les reprises, medley, mais aussi de versions plus essentielles qui ne sont pas présentes. Malgré tout, la sélection reste pertinente, la première face est occupée par « Sweet Fire », une entrée en matière idéale, puis « The Inflated Tears » une magnifique pièce en provenance de l’album qui porte ce nom.

Trois compositions se tiennent sur la face B, « Three for Festival », une pièce assez spectaculaire en live, « My Cherie d’Amour » une reprise de Stevie Wonder et enfin « Volunteered Slavery », une pièce épique jouée à tous les concerts !

Toutes ces pièces restaurées justifient l’achat pour ceux qui ne sont pas complétistes, d’autres préfèreront peut-être partir à la chasse aux originaux, ou d’autres complèteront leur discographie avec « We Free Kings », « The Inflated Tears », « Volunteered Slavery » et « The Case Of The 3 Sided Dream In Audio Color » qui méritent tous une petite place dans votre discothèque.

Sweet Fire (Live)


The Inflated Tear (Live)


Three For The Festival (Live)


Volunteered Slavery (Live)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » lun. 12 févr. 2024 03:49

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Muriel Grossmann – Quiet Earth – (2020)

L’attrait pour la musique de Muriel Grossmann que nous ressentons provient pour une large partie de son placement évident dans une lignée très coltranienne, dès les premières notes couchées sur la cire il n’y a pas l’ombre d’un doute. C’est un choix artistique qu’il ne faut pas blâmer, certes il ne fait pas avancer la musique et n’aide pas au développement de sa propre personnalité musicale, mais c’est tout de même très bien fait, et ça penche plutôt côté héritage que pastiche.

Ainsi, en conséquence, on peut parler de spiritual music très souvent, comme sur le titre « Wien » qui ouvre l’album, une reprise de son album de deux mille treize « Awakening », par ailleurs la face B commence elle aussi avec une autre reprise de cet album, « Peaceful River », les deux autres titres présents ici sont des originaux.

Le second titre « African Call », poursuit cette même trame, ici il n’y a pas de piano et McCoy est « remplacé » par l’excellent guitariste Radomir Milojkovic qui participe beaucoup à la réussite des albums de Muriel, il apporte cette différence et cette nouvelle coloration qui assoit la crédibilité du projet global. Gina Schwarz est à la basse et Uros Stamenkovic à la batterie.

La nouveauté de cet album c’est l’arrivée d’un organiste, Llorenç Barceló, qui apporte pas mal au son nouveau de cet album, comme sur ce second titre par exemple qui vire un peu « soul jazz » lorsqu'il prend la main. De son côté, Muriel Grossmann, outre les compositions, prend en charge différents saxophones, soprano, alto et ténor dont elle joue avec alternance, bien que le ténor soit son préféré.

« Peaceful River », la seconde reprise donc, ne varie pas dans son influence première, s’inscrivant dans les tourments du monument coltranien « A love Supreme » qu’elle décortique une nouvelle fois, sans jamais le dépasser, juste en prendre la couleur, la tournure et la sonorité, cette habileté à copier la quête coltranienne est du meilleur effet, bien entendu, ça marche forcément.

Je ne suis pas trop sûr qu’il y ait une réelle profondeur dans cette musique, probablement une réelle habileté par contre. Le texte accompagnant est vraiment très « baba cool » avec des vœux pieux et un peu de naïveté, un peu à l’image du reste, mais ça n’entache en rien l’efficacité de la musique qu’elle nous propose, elle n’est d’ailleurs pas la seule à rester stationnée au neuf décembre soixante-quatre, c’est devenu quasiment un genre. On peut penser par exemple à « Scatter The Atoms That Remain’s » également au top dans cette veine, particulièrement pour l'album avec Pharoah.

La dernière pièce ici « Quiet Earth », du nom de l’album est également une belle réussite, avec un solo de guitare assez incendiaire, il y a toujours ces réminiscences qui hantent l’album, mais c’est comme ça, c’est ce qui fait qu’on aime, alors…

Wien


African Call


Peaceful River


Quiet Earth
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mar. 13 févr. 2024 04:38

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Lol Coxhill, Raymond Boni, Maurice Horsthuis – Chantenay 80 – (1981)

Lol Coxhill est un spécialiste du saxophone soprano, un peu comme Steve Lacy ou Evan Parker, il joue parfois du sopranino ou du ténor, mais pas sur cet album. C’est lui l’attraction la plus connue de ce trio, il a en effet pas mal bourlingué, cet anglais anticonformiste, fréquentant même l’école de Canterbury à ses heures…

Ici c’est le label Nato qui rassemble, à Chantenay-Villedieu, le six septembre quatre-vingts, alors que le label n’est toujours pas dans ses murs… Un concert fut donné qui donna naissance à deux albums, celui-ci est le premier, il est enregistré par le trio réunissant Lol Coxhill, Raymond Boni à la guitare et Maurice Horsthuis pas tout à fait au violon, mais plus précisément à l’alto. L’autre sortie concerne le duo Beb Guérin et François Méchali.

Nous sommes dans la chapelle de Villedieu, c’est là que se joua cette musique conçue et interprétée par les trois musiciens, dans un mode totalement improvisé. Trois compos se dessinent, la première, simplement appelée « Chantenay 80 (1ère partie) » occupe la première face, les deuxième et troisième parties sont couchées sur la face B.

Il est dit que ce soir-là, la chapelle était pleine et qu’on s’y pressait, la qualité d’enregistrement est brillante et s’entend même le silence plein de respect de cette foule présente, attentive, presque recueillie… La première face nous plonge dans le cette « écoute » si particulière qui se déroule parfois lors de ces moments-là, c’est ici que tout se forme et se construit.

Chaque musicien joue sa partie, en osmose avec les deux autres, ou encore parfois en duo, chacun emmène avec lui sa part de poésie, de rêverie, d’un ailleurs pastel et doux. De l’autre côté c’est encore bien beau et on se sent bien, un peu piégé, un peu comblé, « bien pris » (comme ils disent dans la marine)…

La dernière pièce, sous l’influence du moins connu, Maurice Horsthuis, part en vrille et apporte en plus, de la joie, l’envie de bouger, de taper du pied et même de sourire, nous voilà bien gâtés ! Je n’ai pas trop parlé de Raymond Boni, peut-être parce que je l’aime trop, mais il est très bon également, comme à l’habitude…

Un chouette album encore pour ce prestigieux label, qui doit se trouver à pas trop cher car il a bénéficié d’une réédition.

(Hélas pas d'extrait, donc je vous posterai un autre album dans la matinée...)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mar. 13 févr. 2024 10:46

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Youn Sun Nah With John Cowherd – Elles – (2024)

Voici le nouvel opus de Youn Sun Nah, paru en janvier, la chanteuse continue sa route avec la même grâce coutumière, imprégnant de sa touche si singulière chacun de ses albums. Ou bien est-ce une fausse impression, est-elle hantée par l’ombre d’Ulf Wakenius, débarqué alors que certains l’accusait de plagiat ? Au fil de l’écoute de cet album le passé remonte et, parfois, et même assez souvent, l’impression de réentendre des trucs plus anciens…

Pourtant l’évolution dans la forme est importante, déjà l’accompagnement, presque un duo ici, avec Jon Cowherd aux claviers, grand piano, upright piano, Fender Rhodes et Wurlitzer. Mais aussi Tomek Miernowski au piano préparé, au prophet et à la guitare sur « White Rabbit ». Exit les accompagnateurs de « Waking World » paru il y a deux années, et l’équipe à Jamie Saft sur « She Moves on » …

Pour mieux se resserrer sur son projet, Youn Sun Nah choisit de faire ce qu’elle pratique à la perfection : les reprises de chansons. Il faut lui accorder cette faculté, elle est capable de se hisser au niveau des plus belles interprétations de hits ou de standards, se situant d’emblée à égalité ou même au-dessus des prestations originales, plus d’une fois les poils des bras se dressèrent sans autorisation !

Du coup nous voici plongés face au jeu du « qui a interprété quoi ? », « Feeling Good » de Nina Simone ouvre le bal, puis « Cocoon » de Björk, « I’ve Seen That Face Before » de Grace Jones, « White Rabbit de Grace Slick, « Baltimore Oriole » de Sheila Jordan, « Coisas Da Terra » de Maria Joao, « La Foule » d’Edith Piaf et « Killing Me Softly With His Song » de Roberta Flack.

Il y a également deux standards, « My Funny Valentine » et le traditionnel « Sometimes I Feel Like A Motherless Child ». L’album est forcément excellent car les interprétations sont magnifiques, Youn Sun Nah fait un peu plus que simplement chanter car elle joue du kalimba et de la « Music Box ». Cet album pourtant ne rajoute pas énormément à sa gloire car tout ce qui est là semble surgi du passé, comme je l’indiquais un peu plus haut…

De mon point de vue, un album pour ceux qui ont déjà exploré les albums plus anciens, et en veulent encore…

Cocoon


White Rabbit


Sometimes I Feel Like a Motherless Child


Youn Sun Nah – Feeling Good (Official Video)


Youn Sun Nah - I've Seen That Face Before (Libertango) (Official Video)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 14 févr. 2024 04:17

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Odyssey The Band – Reunion – (1998)

Il est probable que le nom de la formation ne parlera pas d’emblée à beaucoup de monde, sans doute que ceux qui l’ont découvert ont remonté le fil du guitariste, et même chanteur, James "Blood" Ulmer. Ce dernier mérite une certaine attention, même si, parfois, et même pas trop souvent, il se fourvoie un peu.

Ce n’est pas le cas ici de mon point de vue, l’album est ancien, environ vingt-six années au compteur, pourtant il ne compte pas les années, sans doute ce blues qui l’habite et qui le rend hors d’âge, les repères se modifient quand les racines sont profondes : on peut y puiser en tout temps. Certes les notes bleues n’y sont qu’un ingrédient, mais il est puissant, dès le premier titre « No Other Option ».

Ils sont trois ici, épiques et formidables, certes James "Blood" Ulmer c’est déjà beaucoup, mais ce n’est qu’un tiers. Charlie Burnham a sans doute moins de notoriété, mais il est l’éther et le sel, celui sans qui rien ne se passe, il joue du violon électrique avec un sens mélodique inné, véritable pendant à la guitare d’Ulmer, son crin-crin est terreux et précis, efficace et profond, il laboure profond les sillons…

Et puis il y a Warren Benbrow à la batterie, qui marque les temps et pioche comme il faut, sans bavardage ni fioriture, mais toujours pile au bon endroit au bon moment, juste essentiel, il marque le tempo de son énergie et construit les fondations.

Ceux qui connaissent Ulmer sont habitués à sa voix, à sa façon de chanter ou de bruiter, c’est assez personnel et souvent très groovy, comme sur « Online Junkie » par exemple. Mais il aime aussi le blues du delta, amour qu’il partage avec Burnham, l’autre sudiste ici. Alors parfois la voix s’échappe plaintive et sincère comme sur « I Am », qui vient du profond, de l’intérieur, et c’est beau…

L’album est assez long, cinquante-cinq minutes environ, il se structure en trois phases, des instrumentaux pour commencer, de la bonne zique épaisse que l’on peut écouter botté, ensuite viennent les titres chantés, où la tessiture maigre de « Blood » est du meilleur effet, puis les titres finaux plus posés, qui parfois countrysent très légèrement, teintés de bonne coolitude.

C’est là que l’on trouve le titre le plus long, pas seulement le titre en sept mots, une éternité, mais aussi la durée, huit minutes au compteur, « Where Did All The Girls Come From » qui est également chanté. La dernière pièce « Alham Du Allah » est prétexte à de superbes échanges guitare / violon qui renvoient aux bonnes intentions de l’album, placé sous le signe de l’amour et de la passion…

C’est enregistré aux Studios de la Knitting Factory, à New York, et, comme j’aime beaucoup, je recommande beaucoup également…

9 Odyssey The Band - Where Did All The Girls Come From - Reunion


I Believe In You, Odyssey The Band
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Message par Douglas » jeu. 15 févr. 2024 03:48

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Charles Lloyd, Maria Farantouri – Athens Concert – (2011)

Voici un double Cd ECM enregistré en concert au mois de juin deux mille dix, réunissant Charles Lloyd et la chanteuse grecque Maria Farantousi. Cette dernière est plus souvent cantonnée dans un registre plus classique, se spécialisant plutôt dans la musique grecque, du byzantin au rebetiko traditionnel, ou au blues urbain. Sa voix ne possède pas une immense tessiture comparable aux possibilités d’une cantatrice, mais, plus modestement, elle se présente plutôt comme une chanteuse folk.

Charles Lloyd, dans les notes de pochette, y entend des accents évoquant Billie Holiday, mais il est possible qu’il ne soit pas suivi par la foule dans cette comparaison très audacieuse. Le saxophoniste joue également de la flûte et du tárogató, l’excellent Jason Moran joue du piano, Reuben Rogers de la contrebasse, Eric Harland est à la batterie, Socratis Sinopoulos gratte la lyre et Takis Farazis joue également du piano.

Le concert a été donné à l'Odéon d'Hérode Atticus, au pied de l’Acropole, ce qui sied au projet qui entend évoquer la période qui s’étend entre l'Antiquité byzantine et nos jours. Je me bornerais à souligner la qualité du double Cd dans un registre très « ECM », c’est-à-dire plutôt contemplatif, tendance soft. Le premier Cd est passé assez vite, la fusion entre musique grecque et jazz se fait assez bien, encore que l’on passe parfois d’un style à l’autre, comme pour la reprise de « Dream Weaver ».

Le « Requiem » d’Agathi Dimitrouka est plutôt bien réussi, ainsi que les trois parties de la « Greek Suite » réparties sur le double Cd, très lyrique, toujours dans cette ambiance très cool, presque recueillie. La voix un peu voilée de Maria Farantousi est particulièrement en évidence dans ce cadre.

Charles Lloyd est exceptionnel tout du long, à chaque solo il est « dedans », emporté par ce flot qu’il alimente brillamment. Il faut également souligner le jeu toujours parfait de l’excellent Jason Moran, qui s’adapte à toutes les situations, tantôt pur et cristallin, et à d’autres moments percussif et rythmicien, ou bien encore économe et pointilliste…

Un beau voyage entre musique traditionnelle grecque et jazz atmosphérique, pour rêver un peu et partir, en laissant son esprit vagabonder et s’échapper à la pesanteur du quotidien…

Charles Lloyd & Maria Farantouri - Prayer / Prosefhi


Charles Lloyd & Maria Farantouri - Blow Wind / Fyssa ayeri


Charles Lloyd & Maria Farantouri - Dream Weaver / Hyfantis oneiron


Charles Lloyd & Maria Farantouri - Requiem Greek Suite, Part I
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Message par Douglas » ven. 16 févr. 2024 04:17

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Jan Garbarek, Egberto Gismonti, Charlie Haden : Magico – Carta De Amor – (2012)

Pour expliciter le menu, « Magico » est le nom du trio, et « Carta De Amor », celui de l’album. Ce dernier est une parution inédite et tardive d’un concert donné à « L ’Amerikahaus » de Münich, en avril quatre-vingt-un. Cette édition « ECM Records » revêt pas mal d’intérêt, le son a été retravaillé à partir des bandes originales, mais ce n’est pas une surprise car on connaît le souci permanent du label pour la quête du beau son.

La période à laquelle a été donné ce concert est également révélatrice d’une formation tournée vers les improvisations et une certaine audace musicale. Ces trois musiciens sont en effet emblématiques, chacun à leur façon, d’un « univers » du jazz, la rencontre entre les trois sera à l’origine d’une fusion particulièrement féconde.

Au moment du concert, le trio a déjà sorti deux albums, « Magico » en quatre-vingts qui se vendit très bien, et « Folk Songs » en quatre-vingt-un, prélude aux concerts qui suivirent. Le répertoire pioche pour partie dans les compos de ces deux albums mais il y a plusieurs inédits que l’on trouve sur ce concert.

« Carta de Amor » de Gismonti ouvre et ferme le concert, il a également écrit « Don Quixote » et «Branquinho ». « All That Is Beautiful » et « La Pasionaria » sont de Charlie Haden, le second est extrait du répertoire du « Liberation Music Orchestra », et enfin deux traditionnels dont le titre ici est « Two Folk Songs » sont arrangés et présentés par Jan Garbarek. Jan est aux saxs ténor et soprano, Egberto Gismonti joue de la guitare et du piano et Charlie Haden de la contrebasse.

Concernant la personnalité des musiciens il y a bien entendu le questionnement permanent sur le jeu de Jan Garbarek, un peu formaté, qui peut irriter parfois. Je suis moi-même parfois sujet à ces excès, mais ça ne dure jamais longtemps et je me laisse apprivoiser bien vite. Dès la seconde pièce sur le magnifique thème de « La Passionaria » que l’on pourrait presque classer lui aussi dans les « traditionnels », l’animosité s’échappe…

Egberto Gismonti est tout simplement magique dans cet environnement de haute volée, son jeu à la guitare est captivant et imaginatif. Que dire du géant de la contrebasse Charlie Haden à chaque fois captivant ? Par moments, et même très souvent, on pourrait presque parler de folk music sur cet album, les improvisations en plus.

Les pièces sont extrêmement ouvertes et donnent libre-cours à de multiples envolées, où chacun se livre à sa rêverie au fil de l‘eau, les portes de la créativité s’ouvrent grandes pour ces improvisateurs libres et débridés, sans contraintes semble-t-il, si on compare aux versions studios. Je crois que ce trio est resté très emblématique du son ECM, et même parmi les référents du genre, il ne faudrait pas oublier d’ajouter cet album à la galerie des « historiques », tellement il brille de façon personnelle.

Plus d’une heure quarante-huit de musique enregistrée sont regroupé sur ces faces, témoignant d’une musique vivante et sans contrainte, parcourant les folklores du monde inlassablement, et créant sans cesse, avec de nouvelles idées, de nouveaux parcours sans entraves ni limites.

Garbarek/Gismonti/Haden - Carta de Amor


Garbarek/Gismonti/Haden - La Pasionaria


Garbarek/Gismonti/Haden - Don Quixote


Two Folk Songs
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Message par Douglas » sam. 17 févr. 2024 04:37

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Hailu Mergia – Pioneer Works Swing (Live) – (2023)

Hailu Mergia est un organiste Éthiopien ainsi qu’un joueur de synthétiseur. Après une assez peu intense carrière entre soixante-seize et quatre-vingt-dix-huit, où il grava quatre albums dans la cire, surnageant comme il pouvait, il se tourna vers le métier de chauffeur de taxi à Washington.

Il jouait ce qu’on appelait alors de l’Éthio-jazz, un genre qui prit ses racines dans la fin des années cinquante et se développa à Addis-Abeba, puis à l’international. Ce mélange entre les musiques traditionnelles éthiopiennes et le jazz refuse de mourir, tant il plaît, avec ses saveurs uniques et particulières.

Ce n’est donc qu’une demi-surprise que d’entendre à nouveau Hailu Mergia au-devant de la scène, depuis une dizaine d’années. Le voici donc enregistré en live au « Pioneer Works », à Brooklyn, le premier juillet deux mille seize, c’est un peu loin, mais l’album est paru finalement il y a peu de temps.

Hailu Mergia joue donc des claviers et plus particulièrement de l’orgue, de l’accordéon et du mélodica, il présente les titres également. Ses partenaires sont Alemseged Kebede à la guitare basse et Kenneth Joseph à la batterie. L’album dure presqu’une heure et est paru sur le label « Awesome Tapes From Africa ».

Avant tout, je conseille de pousser un peu le son afin de faciliter l’immersion dans la musique, son retour vers l’actualité s’est accompagné d’une campagne de presse dithyrambique, ainsi que de la réédition de ses albums anciens et de sa participation à de nombreux festivals.

Le concert qui nous intéresse s’appuie sur un répertoire composé à partir des œuvres anciennes de Mergia, comme « Yegle Nesh » ou « Hari Meru Meru », ainsi que de titres puisés dans la tradition comme « Tizita » ou « Anchihoye Lene », je vous écris ça sous toute réserves car les informations ne sont pas disponibles sur le Cd, à aucun endroit. Comme si seule comptait la musique jouée dans l’instant, ancrée dans le présent.

Les amateurs reconnaîtront avec plaisir des titres emblématiques du genre, c’est évidemment vif et sautillant, avec ce petit plus qui caractérise le genre, et qui donne envie de bouger, encore aujourd’hui, seuls seront rétifs les allergiques à l’orgue, mais les amateurs de jazz devraient se plaire ici, les amateurs de musiques puisant loin dans leurs racines également, d’autant que les pièces sont parsemées de soli bienvenus, les impros sont bien ancrées dans la façon de faire, légitimant le côté jazz.

Yegle Nesh (Live)


Belew Beduby (Live)


Anchihoye Lene (Live)


Hari Meru Meru (Live)
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Message par Douglas » dim. 18 févr. 2024 03:52

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James Newton – Toil And Resolution – (1980)

James Newton, en provenance de Californie où il a côtoyé David Murray, s’est installé à New-York en soixante-dix-huit, c’est là qu’il fit ses plus importantes rencontres, celles qui comptèrent pour lui. De grands noms comme Cecil Taylor ou Lester Bowie, mais sa rencontre la plus importante fut celle du pianiste Anthony Davis avec lequel il collabora énormément.

Cet album est pourtant celui d’un homme seul, puisqu’il s’agit d’un enregistrement de flûte en solo, enregistré à Hollywood en Californie, pourtant c’est bien en France que cet album fut réalisé sur un petit label, « Cobalt », dirigé par Philippe Conrath, un rennais qui lança également le fameux festival des Transmusicales.

Conrath s’intéresse à beaucoup de styles musicaux, le groupe « Le Marquis de Sade » par exemple, mais aussi les musiques du monde ou ethnique, également le free jazz et les musiques que l’on case difficilement dans les boîtes, comme celui-ci. Il est également en contact avec le journal « Libé » qui à l’époque était véritablement hors-normes, quasi libertaire, rien à voir avec ce qu’il est devenu, institutionnalisé…

C’est ainsi que Conrath rencontra les membres de « Bazooka » et Kiki Picasso qui composa cette formidable pochette, l’album est la quatrième sortie du label, d’après son numéro de série. Bien que cette musique en solo soit inclassable, imprégnée cependant de l’influence de la Loft Génération, sans pourtant s’inscrire dans la ligne de l’AACM, branchée alors sur les recherches sur les textures et les timbres.

On a souvent classé James Newton dans le genre « Third Stream » dont on a parlé il y a peu. Ce n’est pas faux mais un peu réducteur, car il s’est également beaucoup ouvert aux musiques du monde aux travers de multiples rencontres. Ainsi cet album est très personnel, ouvert aux influences indiennes ou africaines, on pourrait même évoquer à certains moments des influences japonaises !

Lui se veut le fils spirituel d’Éric Dolphy, de Charles Mingus et de Duke Ellington, auquel il a consacré un album. On comprend que sa route est très inhabituelle, sous l’influence des musiques européennes, tout en refusant le free de l’école de Chicago, mais intégrant le mouvement des lofts, tout en s’ouvrant de plus en plus aux musiques du monde…

Il y a un peu de tout ça sur cet album qui devrait plaire aux amateurs de flûte, personnellement le côté « solo » ne me gêne absolument pas, j’y trouve même un grand intérêt car nous sommes débarrassés des ancrages habituels, ainsi s’ouvre à nous un étonnant et vaste territoire à découvrir, en suivant avec application le fil déroulé par James Newton, un maître.

Il enregistrera par la suite deux autres albums solos, Axum et Echo Canyon, créant une voie originale mais peu suivie…

Y'a pas d'extrait dispo semble-t-il...
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Message par Douglas » lun. 19 févr. 2024 04:56

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Roy Campbell, William Parker, Takeshi Zen Matsuura – Visitation Of Spirits (The Pyramid Trio Live, 1985) – (2023)

Le label « NoBusiness Records » est en train de passer de vie à trépas, comme une truite clapotant dans l’eau devenue rare, il saute et se débat, espérant trouver une flaque qui lui permettra de tenir encore un peu… Tout y passe, jusqu’aux Test Pressing qui sont vendus un par un, histoire de récolter quelques fonds susceptibles de renflouer les caisses pour sortir un album, puis un autre, encore et encore…

Celui-ci fait partie de ces miraculés, alors il faut choyer le client, l’amateur, devenu rare lui aussi, le flatter, lui donner le meilleur, la crème de la crème, pour qu’il rachète et qu’il revienne, et ainsi, peut-être, sortir un nouvel enregistrement, une nouvelle perle, dénichée on ne sait où, une merveille de plus…

Celui-ci fait incontestablement partie de cette catégorie, c’est l’enregistrement d’un concert donné le vingt et un février quatre-vingt-cinq au « Joint », au Centre estudiantin, à la « Brandeis University » de Waltham, dans l’état du Massachusetts. Ce concert est, parait-il, de temps en temps retransmis sur une radio communautaire, par là-bas, à partir d’un vieux bootleg, le voici désormais à notre portée, et avec un son formidable, s’il vous plaît !

Celui qui lead c’est l’exceptionnel Roy Campbell, je l’ai découvert assez tard, on n’en parle quasi jamais, son nom est rare dans les magazines, même les spécialisés, et sa musique n’est pas diffusée dans nos régions, je n’ai aucune souvenance, même lointaine, d’un souvenir radiophonique. Par bonheur, je l’ai souvent entendu aux côtés de Jemeel Moondoc…

Sur le moteur de recherche du site, son nom apparaît sept fois dans cette rubrique, la dernière fois pour « Akhenaten Suite » de deux mille huit, je confesse être à la recherche de ses enregistrements, n’ayant jamais été déçu par ses prestations musicales souvent extraordinaires, comme ici…

Il est l’auteur des cinq pièces de l’album, chacune prend son temps, un quart d’heure en moyenne, entre neuf et dix-huit minutes pour être plus précis. Du véritable bon jazz, à trois, avec William Parker à la basse et Zen Matsuura à la batterie, Roy joue de la trompette, du bugle et de la flûte. Il aime prendre son temps, trouver le thème et broder autour, il aime également asticoter la mélodie, en tirer le maximum, son jeu est aisé à suivre, il ne vous perd jamais et sait trouver les notes qui vont, celles qui sont justes, surprennent, et en même temps ravissent.

Il y a également beaucoup de clarté dans sa sonorité, très droite, claire, il nous parle et joue à la façon d’un mystique, il croit aux esprits et les côtoie, les fréquente, et sa musique est une prière. C’est ainsi qu’il improvise, avec son âme et son cœur, nous emmenant, à travers son chant, en des territoires musicaux profonds et émouvants, avec naturel et simplicité, en nous prenant par la main…

Ses deux partenaires sont exceptionnels, William Parker est grandiose et Takeshi Zen Matsuura le batteur idéal pour une telle musique. D’ailleurs ils renouvèleront la formule et d’autres albums sortiront…

Je suis vraiment heureux d’entendre ce jazz sincère, et je pense à ceux qui l’ont fait vivre, au loin, à travers les ondes, pour que cette musique jamais ne meurt, le vieux « boot » à fait la place, grâce à un label qui lutte encore pour sa survie, là-bas à Vilnius… Place à la sœur de Roy qui confia aux membres du label (Valerij Anosov) : « Roy spoke to me in a dream years ago and said, it’s all about the music ».

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Message par Douglas » mar. 20 févr. 2024 03:15

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William Parker – Long Hidden: The Olmec Series – (2006)

Celui-ci je l’ai écouté et réécouté avant de vous le présenter, par plaisir, histoire de bien me l’approprier, ce n’est pas toujours comme ça, et bien souvent ça roule, garder le rythme, faire tourner, et, en cas d’urgence, l’album court, souvent écouté, puisé dans les écoutes anciennes, celui sur lequel les mots viennent et se bousculent…

Je ne sais toujours pas ce qu’il faut penser de cette pochette, ni même ce qu’elle signifie, sans doute en rapport avec les Olmèques de l'ancien Mexique, semblent indiquer les notes de pochette, l’illustration est de John Feel Ryan, indiquent les écrits. Par contre le Cd est fort cartonné et bien solide, sur Aum Fidelity, le label.

Il est curieux cet album, il contient quatre merveilleux titres enregistrés à la basse solo, le premier, le sixième et le septième. Bon, c’est vrai ça ne fait que trois, c’est parce qu’il y a un titre bonus, c’est indiqué dans le coin, en bas et à gauche du verso, plus : « in case Of Accident ». C’est le producteur de l’album qui a voulu le rajouter, la pièce dure quatorze minutes et neuf secondes, ça provient d’une cassette de quatre-vingt-quatorze, enregistrée à Montréal, et c’est un titre gigantesque, comme William Parker était d’accord pour le mettre sur cet album, ce fut fait !

Bon ! Là il y a déjà de quoi rendre heureux n’importe quel mélomane un peu amouraché du jazz, mais ce n’est pas tout. Il y a également trois enregistrements avec le Doson Ngoni , le deuxième, le cinquième et le dixième. Bon, me direz-vous : « Qu’est-ce que c’est que ça que c’est que ce Doson Ngoni ? » Et bien c’est un instrument traditionnel d’Afrique de l’Ouest, à huit cordes, qui ressemble un peu à une «guitare de chasseur», et dont joue William sur ces trois superbes pistes.

« Bon ! Il y a encore des trous dans ton énumération ! » Me direz-vous avec bon sens, et oui, il manque la troisième, la quatrième, la huitième et la neuvième pièce qui sont consacrées cette fois-ci à « The Olmec group », sept musiciens réunis pour illustre cette fois les Caraïbes et l’Amérique centrale, et donc les Olmèques ! Je ne vous énumère pas le nom des musiciens mais plutôt celui de quelques instruments représentatifs, car on n’a pas deux heures à passer ensemble non plus !

Le Doson Ngoni à six cordes, le congo, güiro, timbale et bongos, accordéon, divers saxs, basse et percus… Connaître le nom des instruments c’est déjà un peu entendre la musique jouée, la force de l’esprit donne le pouvoir à l’imaginaire… Alors, cet album est une merveille, ces troupes disparates pourraient augurer d’un album à plusieurs facettes ou décousu, c’est l’inverse, tout s’incruste avec justesse et le puzzle se reconstitue en donnant du sens à l’ensemble.

« C'est le son des hiéroglyphes qui sortent du rouleau ou du mur de pierre et marchent sur des bateaux qui vont bientôt mettre les voiles. Je ne sais pas où ces bateaux atterriront, ce nouveau voyage ne fait que commencer » nous confie William dans les notes de pochette, ce qui est sûr c’est que ce voyage est magnifique !

There Is A Balm In Gilead


Long Hidden Part Three


Codex


In Case Of Accident
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » mer. 21 févr. 2024 04:08

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Joëlle Léandre – No Comment – (Re – 2016)

Cet album est donc une réédition de la part du label « Fou record » qu’anime et dirige le musicien Jean-Marc Foussat. L’original, sur le label canadien « Red Toucan Records » est « sold out », et une réédition s’imposait, car l’album est véritablement magnifique. En fait, il y en eut même deux, la première en deux mille seize, puis une seconde en deux mille vingt.

Pourtant, à première vue, rien d’évident. Ce « No Comment » est entièrement consacré à la basse en solo, Joëlle face à sa basse, et c’est tout, ou presque, car il faudrait de temps en temps ajouter la voix, le chant, les borborygmes, et autres facéties vocales ! Neuf parties composent l’œuvre, chacune appelée « No Comment », suivit du numéro d’ordre, n°1, n°6 et ainsi de suite…

L’album est réalisé à partie de deux concerts, l’un au « Vancouver Jazz Festival » au Western Front, en juin quatre-vingt-quinze. L’autre live à IBLEO Jazz Festival, à Ragusa, Italie, en octobre quatre-vingt-quatorze. Il n’est pas précisé les lieux d’origine concernant les parties, mais l’ensemble est extrêmement cohérent et forme un tout insécable.

« Alors, me direz-vous, quel est donc ce besoin de mettre à disposition du public cet album, avec un tel entêtement ? » Il est vrai que la question se pose et la réponse suit presque naturellement : la très grande qualité de l’album. Ceux qui connaissent Joëlle Léandre le savent, c’est une des meilleures de l’instrument, bien qu’elle soit femme et baignant dans un univers presqu’exclusivement masculin, elle a su imposer sa marque, son savoir-faire, son immense talent, avec autorité, n’ayant lésiné sur aucun sacrifice pendant son apprentissage, elle est tout simplement admirable !

Aujourd’hui elle est respectée de tous et mériterait d’immenses égards pour ce qu’elle a apporté à l’art. Écoutez cet album, vous ne risquez aucune seconde d’ennui, il est plein de bonne musique, il semble que l’immensité de son savoir est ici condensée, tout y est passionnant et véritablement « sans commentaires », car la leçon est belle.

J’imagine que les contrebassistes se passent le mot, et que la recommandation continue à tourner de par le monde, il y a comme ça, des albums qui font somme et valent plus que les meilleurs conseils !

Joelle Leandre - No Comment 6


Joëlle Léandre en solo - Eglise Saint-Eustache - 28/11/2016 (ce n'est pas un extrait de l'album!)
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » jeu. 22 févr. 2024 03:21

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Sam Rivers, Ben Street, Kresten Osgood + Bryan Carrott – Purple Violets – (2005)

L’histoire de cet album commence par la volonté de Kresten Osgood, batteur danois, bien content de son groupe « Purple Violets » qui tournait vraiment bien, mais, allez comprendre pourquoi, probablement une mouche qui le piqua, le voilà parti en quête de Sam Rivers, quatre-vingt-deux ans au compteur, stationné en Floride !

Cette idée est évidemment folle, née sûrement dans un esprit décalé, enfin pas ordinaire, mais ce qui suivit donna raison à la déraison, enfin vous me comprenez… La « chose » se fit, le vénérable Sam Rivers, héros du jazz, du free, de la Loft Génération, accepta un rendez-vous à New York, et une session fut organisée aux « Kampo Studios », les quatorze et quinze octobre de l’année deux mille quatre !

La musique fut si bonne et l’ambiance si chaleureuse, autour de l’immense Sam pourtant resté simple, qu’il y eut assez de musique pour remplir deux volumes, celui-ci est le premier. Le second prendra le nom de « Violet Violets » et paraîtra dans la foulée, mais je ne l’ai pas encore dans les rayons.

Sam Rivers joue du sax ténor, ainsi que du soprano et de la flûte, Ben Street de la basse, et Kresten de la batterie, sur certaines pièces de ce volume le vibraphoniste Bryan Carrott apporte sa couleur, les albums paraîtront sur le petit label danois « Stunt Records », le projet est parfaitement bien ficelé.

C’est évidemment un privilège que d’écouter cet album enregistré dans la grande maturité de Sam, il est toujours vaillant et maîtrise parfaitement les instruments qu’il utilise. Il y a énormément d’improvisations tout au long de l’album et il brille comme il a toujours su le faire. Ce qui change c’est le « lead » et le répertoire, ou plutôt la forme dans laquelle il se livre.

En effet, et ce n’est pas une surprise pour qui écoute les « anciens », souvent ceux-ci aiment à retrouver l’esprit de leur jeunesse, ainsi que les frissons qu’ils ont connus alors… Aussi c’est avec naturel que l’on assiste à une prestation plutôt post-bop, à savoir pas très free, mais absolument réussie de bout en bout, et pour tout dire : une merveille d’album !

On remarque la reprise de « The Mooche » de Duke Ellington avec Sam au soprano, un grand moment, l’interprétation du très beau « Moderation » avec Sam à la flûte, le superbe « Solace » qui ouvre les hostilités, sans doute quelques pièces ont-elles été improvisées sur place également.

Juste un régal !

The Mooche


Solace


Moderation


Abalone
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Re: J A Z Z et musiques improvisées - C'est ici qu'on en parle

Message par Douglas » ven. 23 févr. 2024 04:04

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Gunter Hampel Quintet – Legendary: The 27th Of May 1997 – (1998)

Encore un album qui a sa petite histoire, mais il faut remonter assez loin, jusqu’en mille neuf cent soixante-cinq, lorsque parut le tout premier album de Gunter Hampel, « Heartplants ». Ce dernier a été enregistré alors par Gunther Hampel au vibraphone et à la flûte, Manfred Schoof à la trompette, Alexander Von Schlippenbach au piano, Buschi Niebergall à la basse, et le néerlandais Pierre Courbois à la batterie.

Ce premier album est historique, par son millésime, mais également par sa qualité. En quatre-vingt-dix-sept Gunter fit une sorte de retour en arrière en reconstituant le quintet, avec Arjen Corter à la basse remplaçant le défunt Buschi Niebergall. Gunter Hampel ajoute à sa panoplie l’usage de la clarinette basse qu’il maîtrisait déjà, lors du premier album, peut-être même l’utilisa-t-il alors, mais rien n’est spécifié. Manfred Schoff lui aussi ajoute un nouvel outil, le bugle !

Ce pèlerinage est bien entendu free, il ne pourrait en être autrement, il est également excellent, ce n’est pas pour rien que Gunter Hampel l’a appelé « légendaire » ! L’enregistrement de cette réunion s’est déroulé lors d’un concert à la « Triennale » de Cologne à la date indiquée dans le titre, bien des années après le tout premier essai.

Il s’ouvre au son de la flûte lors de la pièce « Legendary » d’une durée inférieure aux quatre minutes et d’une très grande beauté, la pièce est vive et envoutante, hélas trop brève. Des réminiscences de bop surgissent d’un peu partout, une façon de faire le lien avec l’histoire et de se positionner dans une sorte de continuité temporelle, ce qui se manifeste avec une particulière acuité sur la seconde pièce « Spielplatz », l’une des deux pièces les plus imposantes de l’album puisqu’elle se prolonge jusqu’à vingt et une minutes et quarante secondes.

Cette durée est mise à profit pour laisser place à de superbes improvisations, mais aussi au groupe pour présenter sa cohérence et la formidable dynamique qui l’habite, c’est une machinerie très au point qui se lance et se déverse à nos oreilles ébahies, beaucoup d’intensité et de forces sont mises à profit dans cette fougue combattante, où chacun libère des solos plus intrépides les uns que les autres !

Mais la pièce principale est encore à venir, « All the Things You Could Be if Charles Mingus Was Your Daddy » qui s’étale sur plus de vingt-sept minutes, nous emporte comme une tempête, et la référence au Grand Charles n’est pas veine, tant il nous semble être embarqués dans un tourbillon de type mingusien, où les fantômes d’alors semblent renaître, Dannie Richmond, Eric Dolphy, Johnny Coles, Clifford Jordan ou Jaki Byard, tirés par la loco Mingus, les images défilent et revivent sous l’impulsion du Quintet de Gunter Hampel !

Un enregistrement de haute volée, à recommander aux amateurs du genre qui ne seront pas déçus !

(Hélas pas d'extrait, donc je vous posterai un autre album dans la matinée...)
We will dance again...

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