Mais que s'est-il passé entre 1974 et 1978 pour que le rock partagé par toute une génération issue de mai 68 et de woodstock ne puisse trouver sa place dans les programmes de la télévision française? Restées sur leur faim d'utopisme et d'inventivité portés par les Anglo-Saxons, les musiques, autant que leurs audiences, se spécialisent, adoptant des voies diverses. Les uns tentent la fusion, avec les univers extra- occidentaux ou le jazz, d'autres creusent le sillon "folk" ou se perdent à répéter leur propres figures de style, avec d'interminables solos de "lead guitar" à la clef. Alors que la disco commence à pointer son nez, le rock est comme une mer, étal. La tempête est venue d'Angleterre, avec les punks, vrais faux musiciens réussissant l'exploit de radicaliser le genre. De surcroît, ce mouvement musical a engendré de nouvelles postures sociales. En 1978, pour le plus grand bonheur des téléspectateurs, l'émission d'Antenne 2 "Chorus", dotée de moyens importants et portée par un tout jeune Antoine de Caunes, s'embarquait dans l'aventure… sur le toit du Théâtre de l'Empire, à Paris. Don Kent, à la réalisation, transcendait l'art de filmer les concerts : Clash, Elvis Costello… Les punks ont été des passeurs. Leur irruption a renouvelé les formes d'expression musicale portées par des artistes issus de cette mouvance. Exit "Chorus", les années 1980 festoient sur la même chaîne autour des "Enfants du rock", lancée en 1982 à l'initiative de Pierre Lescure (futur patron de Canal+). De nouveau, le rock fédère. "On était passé d'une petite case à l'idée d'une programmation générationnelle", commente Patrice Blanc-Francard qui faisait partie de l'équipe aux côtés d'Antoine de Caunes, Philippe Manœuvre, Bernard Lenoir, Jean-Pierre Dionnet et Yves Bigot. En 1984, "Les enfants du rock" remportait le Prix de la meilleure émission pour l'enfance, dans la catégorie des 12-16 ans, puis, l'année suivante, un Sept d'or de la meilleure émission de variétés. Après sa disparition en 1988, le magazine essaimera de manière plus confidentielle sur d'autres chaînes. De 1987 à 1992, on retrouve le très "frenchy" Antoine de Caunes à la tête de "Rapido", diffusée sur Canal+, ainsi que sur Channel 4, en Grande-Bretagne. Puis la révolution FM est arrivée, faisant passer la musique "de la normalisation à l'hyper-marketing, soupire Patrice Blanc-Francard. Je ne connais pas d'émission musicale à la télé aujourd'hui." Jean-Jacques Larrochelle - Le Monde.Fr
_________________ Il est parfaitement superflu de connaître les choses dont on parle. Je dirais même que la sincérité en général dénote un certain manque d'imagination.
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