À contrario de Old School, j'ai adoré. Et j'avais aussi eu peur de la durée du film. 2H45 faut tenir. Alors que gamin, on m'amenait au cinéma. Plus le film durait longtemps, plus j'étais content. Le dernier film de cette durée fut, The Dark Knight Rises. Ce film m'a parut interminable. Au bout de 10 mn je m’endormais devant. Il a fallu 8 reprises pour le terminer. Et là non. Je n'ai pas vu le temps passé même si certaines longueurs peuvent transparaitre. Le trio d'acteurs est formidable. Tous les 3. Sans concession. Jamie Foxx, Christoph Waltz, Leonardo l'iceberg du Titanic est bluff
Le Blog de l'École des lettres. Un pur régal de cinéphiles
Le talent de Tarantino consiste à savoir parfaitement concilier une implication sincère et totale dans sa dénonciation et un travail de mise en scène qui la met à distance de toutes les façons possibles. Car Django Unchained comporte d’abord une triple mise en abîme : le titre est une allusion à la légende de Prométhée, enchaîné sur son rocher où un vautour lui dévore le foie, image symbolique de l’esclavage. Django apparaît comme un nouveau Siegfried à la recherche de sa Brunehilde, et sa quête chevaleresque, soutenue par les hallucinations qui lui font voir à tout moment son épouse idéalisée, évoque les trois épreuves de force et d’agilité à défaut desquelles le prétendant trouverait la mort. Schultz est un nouvel Odin, qui arme le chevalier et lui procure son cheval et son épée. Enfin, à la fin du film, la silhouette de Django triomphant est filmée sur le mode comique de la BD et l’assimile à Lucky Luke.
Surtout, le film se veut un hommage au grand western italien de Sergio Leone – reconnu par Tarantino comme un de ses maîtres – et de ses satellites. Il se révèle alors être, de surcroît, un tissu de références, un pur régal de cinéphiles : la reprise en est la figure de base. Car il y a chez Tarantino un véritable culte du passé :
– le passé historique de l’Amérique justifie une reconstitution soignée, qui n’exclut cependant pas ces anachronismes créatifs dont le réalisateur a le secret ;
– le passé du cinéma, dont il réactualise les genres mineurs et déconsidérés de la culture populaire.
C’est pourquoi il cite des noms marquants de l’Histoire ou de l’histoire du cinéma comme autant de signes de reconnaissance : le nom de Schultz est emprunté à To Be or Not to Be, d’Ernst Lubitsch (1942), celui de Franco Nero rappelle l’interprète du premier Django qui apparaît ici en patron de bar ; le nom de Léonide Moguy rend hommage au réalisateur français d’origine russe, actif entre 1936 et 1961, qui l’a influencé. Le nom complet du personnage joué par Kerry Washington dans le film est Broomhilda Von Shaft, parce que les esclaves campés par elle et Jamie Foxx seraient les arrière-arrière-grands-parents de John Shaft, personnage emblématique de la blaxploitation, dans Shaft, les nuits rouges de Harlem, de Gordon Parks (1971), film sur la guerre sanglante entre gangs blancs et noirs, qui a connu suites, remake, et série télé. Samuel L. Jackson, qui interprète le vieux majordome Stephen dans Django Unchained, a joué le rôle de Shaft dans le remake du film sorti en 2000.
De même que l’inspiration initiale de Pulp Fiction (1994) venait des Trois Visages de la peur (1963), film à sketches en trois parties de Mario Bava qui a également inspiré Reservoir Dogs (1992), Django Unchained est truffé de clins d’œil à Sergio Leone, aux Django de Sergio Corbucci (1966) et d’Alberto De Martino (1966) – dont Tarantino est un fan –, qui ont traité avant lui les thèmes des chasseurs de prime, du racisme et du Ku Klux Klan.
S’affichant comme ultime « sequel », le film joue sur la ressemblance et la reprise des motifs inter ou intra-textuels : Schultz met au point un plan quasi scientifique comme celui de Mathematicus, le premier Django, dont toute la stratégie est lisible sur le cadran d’une montre (l’une des parties de Pulp fiction s’intitulait déjà The Big Watch). De même que le motif de la hache dans Django tire le premier, d’Alberto De Martino (1966) a fourni une image forte à la séquence d’anthologie qui ouvre Inglourious Basterds, Leonardo DiCaprio ressemble beaucoup à Glenn Saxson, qui joue le rôle du fils de Django dans le western italien.
Tarantino honore ses racines italiennes en mixant les éléments des films qui l’inspirent pour créer son propre cocktail, plus explosif que le premier Django, pourtant réputé le film le plus violent de son époque. Le cinéaste sait comme personne ne pas se prendre au sérieux et jouer avec tous les codes, y compris ceux qu’il a lui-même créés. Il se moque de tout, des employés de la plantation, frustes et demeurés, du Ku Klux Klan, aux cagoules ridicules et mal adaptées, des planteurs esclavagistes, pervers, dégénérés et incestueux. Une fois de plus, entre western, film de Sécession, chasse à la prime, film gore, dessin animé et série télé, il montre que l’humour n’est pas incompatible avec un engagement réel et entier, dans la ligne de Lubitsch et de Mel Brooks.
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