Bonjour à tous, certains d'entre vous ont dus entendre parler du groupe The Absorptions. Il s'agit d'un groupe américain de rock psychédélique. Malheureusement, je n'arrive pas à trouver leur unique album :
The Absorptions - 1965 - Synthetic Absorptions
Si quelqu'un a déjà eu l'occasion d'écouter ce groupe ou a la possibilité de nous en donner l'occasion, je suis preneur!
Pour ceux qui n'ont jamais entendu parler de ce groupe, je vous transmets une chronique venant du dictionnaire du rock :
Groupe de rock psychédélique américain, 1965-1968: Charlie Shield [Karol Strzkl] (chanteur), né le 6-11-1945 à Prague, alors Tchécoslovaquie ; Peter DePaul (organiste et chanteur), né le 2-11-1946 à Budapest, Wisconsin ; Greco Syko [Vangelis Krakos] (guitariste), né le 25-01-1947 à Ann Arbor, Michigan ; Ginny [Genevieve] Boodakian (batteuse et percussionniste), née le 4-5-1950 à Wonga Wonga, Canada.
Une des plus mythiques et des plus oubliées des années 60, entre les Stooges* et le Velvet* Underground, cette formation a enregistré un album unique en 1965 considéré par Lou Reed* comme « le disque que toute ma vie j'ai essayé de faire ». Son leader Charlie Shield a suivi un des pacours les plus intrigants du rock américain. Né d'émigrés tchèques installés après la Seconde Guerre mondiale dans la banlieue ouvrière de Detroit, le jeune Karol Strzk se rappelle avoir découvert la musique derrière le comptoir de la buvette que ses parents tiennent dans diverses fêtes foraines. « Mes premiers souvenirs musicaux remontent à cette période : des airs folkloriques de la Bohême, que mes parents mêlaient à des tubes de Motown* pour attirer une clientèle d'ouvriers noirs », dira-t-il à Philippe Garnier dans Rock & Folk en 1974. Parallèlement, le jeune Karol fouille dans la bibliothèque de ses parents : il lit Camus, mais aussi Lautréamont, Mallarmé et Rimbaud. Avec son ami Vangelis Krakos, alias Greco Syko, fils d'un couple de trapézistes originaires de l'île de Paxos, il crée un duo de folk-blues traditionnel, les Bohemian Twins, inspiré par la vague du protest-song new-yorkais. « On jouait de vieux trucs de Leadbelly, bien sûr, mais aussi une adaptation du Bateau ivre de Rimbaud que j'avais traduit intégralement du tchèque ». Le duo parvient à enregistrer un 45 tours souple dans une cabine d'enregistrement automatique dont il envoie un exemplaire à Bob Dylan* : « Il nous a répondu au bout de quinze jours en nous disant qu'il n'avait jamais entendu un truc aussi génial. J'ai montré la lettre à mes parents, mais ils ne savaient pas qui était Dylan. Alors, avec Greco, on a décidé de partir de chez nous pour le rencontrer. »
En 1963, Strzk a dix-huit ans : il « fait la route » comme son modèle Dean Moriarty, goûtant à toutes sortes de drogues, surtout les amphétamines, rédigeant quantité de poèmes en écriture automatique. Arrivé à New York, il cherche à rencontrer Dylan qui lui fait répondre qu'il ne se souvient pas de lui. « Avec Greco, on a lavé les vitres, ciré les chaussures, fait n'importe quoi. J'ai même été l'apprenti d'un taxidermiste qui empaillait des autruches. » Dans un bar, il rencontre un couple de musiciens, Peter DePaul et Ginny Boodakian, qui divertit les touristes en reprenant des chansons de Herman's* Hermits dans un magasin de confiserie. Il décide de fonder un groupe avec eux, reprenant les tubes du hit-parade dans les bars de Long Island. Ces années de frustration nourriront un des albums les plus extraordinaires de l'histoire du rock : Synthetic Absorptions. D'abord appelé les Pilsen Four, puis The Aliens, le quatuor se transformera en Absorptions après une vision venue à Strzk au cours de son premier trip de LSD : « J'étais dans un magasin d'animaux à Long Island et, tout à coup, j'ai vu un hamster qui absorbait des graines de tournesol : j'avais l'impression que c'était moi qu'il avalait à des centaines d'exemplaires. C'était une expérience quasi cosmique d'être ainsi "absorbé ". C'est pour ça que j'ai appelé mon groupe les Absorptions. » Le style des Absorptions est révolutionnaire : Strzk, désormais « Charlie Shield », hurle ses poèmes sous un tonnerre de feedback, parfois en tchèque — quand l'alcool et les drogues font leur effet —, la batteuse Ginny Boodakian, l'air froid et menaçant, frappe debout sur un fût de métal, tandis que Peter DePaul se couche sur son clavecin électrique au clavier duquel il assène de violents coups de tête. À Long Island, les Absorptions retrouvent un ami de Detroit, Larry Shmirak, qui travaille alors pour un studio à Chicago, Michigan Magnetics. Celui-ci leur propose d'enregistrer un album là-bas. « Michigan Magnetics était dirigé par ce type de la mafia, Jack Fante, qui voulait qu'on enregistre des trucs à la Simon* & Garfunkel. Mais le premier jour de l'enregistrement, il a reçu un coup de fil : un de ses lieutenants venait de se faire buter pour une histoire de laverie automatique. Alors on a eu le studio pour nous tout seuls et on a fait ce qu'on voulait. Quand il a entendu le résultat, il paraît que c'est nous qu'il voulait buter. » Enthousiaste (il est alors bien le seul), Shmirak publie le résultat pour son label Smart. Une rumeur folle naît autour de cet album, dont tous les innovateurs des années 60, de Frank Zappa* à Lou Reed, reconnaîtront l'importance capitale. De « Sta.rt (Without Me) » à la célèbre suite « Agamemnon's Diary », sans oublier « Baby Gun » et « 1976 », Synthetic Absorptions, étrangement oublié de la plupart des listes des cent meilleurs albums de rock de tous les temps, anticipe à peu près, par bribes, toutes les tendances à venir : hard rock psychédélique des Stooges et du MC5*, saturations de feedback des titres expérimentaux du Velvet Underground, jusqu'au rock « cosmique » de Pink* Floyd. Pourtant, l'aventure restera sans suite. Shield sera envoyé au Vietnam, tout comme son alter ego Kmkos, alias « Greco » Syko, qui mourra là-bas des suites, dira Shield, d'« une intoxication alimentaire ».
L'aventure aura néanmoins un post-scriptum. En 1969, Shield, revenu du Vietnam, réapparaîtra à Paris, où il donnera quelques concerts, récitant ses poèmes accompagné du saxophoniste de Gong* Didier Malherbe. Ceux-ci se termineront tous en fiasco, Shield, alors fréquemment aviné et en proie à des visions, insultant fréquemment les spectateurs dans sa langue natale. Philippe Garnier le retrouvera dans la banlieue de Boston en 1974, où Shield travaille alors comme gar-dien d'une usine de produits chimiques. Il a depuis abandonné définitivement la musique, même si des rumeurs font régulièrement état d'un retour de plus en plus hypothétique. Aux dernières nouvelles, il vivrait de trafics divers dans la jungle thaïlandaise.
M. A.
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