oups!!
tu commence pas par l'album le plus facile!
néanmoins il fait partie des meilleurs du groupe et de la kosmich musik en général
voici une chro géniale d'un de nos amis citrolin" du site "poin-poin"
Nous sommes en 1972. Tangerine Dream après avoir déjà subi un certain nombre de remous au sein de son personnel, est alors composé de Christopher Franke, Edgar Froese et Steve Schroyder. Formation musicale berlinoise appartenant à la mouvance que les allemands avaient appelé Kosmische Musik mais que les journalistes anglais ont rebaptisé Krautrock, le groupe a déjà à son actif deux albums (Electronic Meditation et Alpha Centauri) et un bagage de prestations live de plus en plus conséquent. Mais Steve Schroyder, lassé de la tournure de plus en plus électronique que prend la musique du groupe, décide de lâcher l'affaire. Edgar Froese et Christopher Franke, les deux membres restants, se mettent alors à la recherche d'un remplaçant dont la moindre des qualités sera d'avoir un esprit ouvert et un certain goût pour l'expérimentation. Pour ce faire, des auditions sont organisées et c'est lors d'une de celles-ci que Peter Baumann, organiste alors âgé de 19 ans, se met à sortir de son orgue branché sur une réverbération, des myriades de sons incongrus et inhabituels. Il n'en fallait pas plus pour parvenir à séduire Froese et Franke qui décident de l'intégrer au groupe. C'était en 1972.
Fort de cette nouvelle mouture, Tangerine Dream publie d'abord un simple (Ultima Thule), puis enfin se met à l'oeuvre pour la création d'un double-album sans concessions : Zeit. C'était en.... en quelle année déjà ? 1872 ? 1972 ? 2012 ?
Aucune importance en fait, car Zeit, qui signifie Temps, est justement le manifeste parfait de l'absence de temps. Epaulés pour l'occasion par Florian Fricke (Popol Vuh) et de son Moog, d'un bref retour defricke72 Steve Schroyder et surtout de quatre violoncellistes, Tangerine Dream signe avec cet album le pendant musical parfait du grand chaos qui a ordonné le monde tel qu'on le voit. Les violoncelles, somptueux, ouvrent le bal de cet album qui est ce que j'appelle au sens littéral la musique des sphères. À très fort volume, cette musique pénètre chaque centimètre carré de l'endroit où elle est jouée. Tout n'est plus que flottaison, apesanteur. Ca donne l'impression que votre appartement est en train de décoller, lentement, puissamment, inexorablement, vers des mondes suspendus où plus rien n'existe que les résonnances de l'infini. Tout, tout autour de vous n'est plus que néant. L'espace entier est rempli par le vide intersidéral. Aucunes mélodies, rythmes inexistants, les sons ne sont que monolithes aux reflets ténébreux se déplaçant en strates glissantes et inaltérables. Tout semble figé dans un noir si profond qu'il en donne le vertige. Les seules lueurs encore perceptibles sont comme autant d'étoiles lointaines et innombrables renvoyant à nos yeux de poussière leur éclat glacé et inhospitalier. Le grand chaos des sons paraît être immobile, statique, perdu à tout jamais dans une éternité factice, immense. Tout n'est que paysages de désolation, où chaque élément se meut en de vastes mouvements, amples et majestueux, rendus imperceptibles de par leur permanence. Mais le chaos engendre la beauté ; du plus profond des ténèbres la lumière jaillit, saisissante, éclatante et son intensité est telle qu'elle vous happe, vous engouffre et vous absorbe inéluctablement. Le temps n'existe pas. Le passé n'existe plus et le futur pas encore. Plus rien d'autre que l'instant présent n'est réel. L'heure est un leurre monté de toutes pièces par une humanité si insignifiante au regard des immensités cosmiques qui l'entoure, qu'il lui a fallu créer une échelle pour mesurer ce qui n'est pas. Et Zeit, trosisième album du Rêve Mandarine s'en veut être le témoignage musical ultime, la preuve irréfutable que du plus abyssal des désordres peut naître la vie et son florilège d'émotions, que de la plus oppressante des immensités peut surgir la béatitude exaltante et sa cohorte de lumières.
Zeit. Le temps. Comme un vaisseau aux proportions gigantesques taillé dans une brume froide et pénétrante à vous glacer d'effroi, en route pour la matrice universelle d'où vous ressortirez groggys, anéantis, comme absorbés dans un trou noir où seul subsiste l'infini plaisir des sens.
Zeit. Chef d'oeuvre somptueux, enregistré en 1972 sur l'étalon des hommes, intemporel et immuable sur celui de la vie.
