Bon, mea-culpa, je vais parler de quelqu'un qui ne fait pas partie de nos décennies de prédilection, mais pour une fois ce sera un artiste antérieure aux années 60. Il est né en 80, oui... en 1880. C'est un poète libertaire et anarchiste. Son inspiration elle est autour de lui, chez les petites gens, dans la ruralité. Né dans le Loiret, il devient journaliste et décide à 18 ans d'aller à Paris et se produit dans les cabarets de Montmartre. En 1907 il ouvre avec d'autres chansonniers le cabaret "La truie qui file"... pour quelques mois seulement. Vie de bohème et alcool... quelques années plus tard il participe au revues La barricade et La guerre sociale. Il meurt à 31 ans, tué par l'alcool et la misère. Il sera condamné pour Chanson révolutionnaire" Post mortem".
Ce n'est pas un intellectuel, un agitateur d'idées, un penseur. Non, c'est un témoin de son temps, un observateur méticuleux, un scrutateur aiguisé de la misère humaine. Il décrit de façon scientifique ce qu'il voit. Mais pas de froideur, bien au contraire: il nous touche directement, sans fioriture, sans fard. Un texte de Gaston Couté ça vous remue, ça vous bouscule et ça fait du bien !
Attention, il faut dire Gaston Couté !
LES PETITS CHATS
Hier, la chatt' gris' dans un p'quit coin D' nout' guernier, su' eun' botte de foin, Alle avait am'né troués p'quits chats ; Coumm' j'pouvais pas nourri' tout ça, J' les ai pris d'eun' pougné' tertous En leu-z-y attachant eun' grouss' piarre au cou.
Pis j' m'ai mis en rout' pour l'étang ; Eun' foués là, j' les ai foutus d'dans ; Ça a fait : ppllouff!... L'ieau a grouillé, Et pis pus ren !... Ils 'tin néyés... Et j'sé r'parti, chantant coumm' ça : "C'est la pauv' chatt' gris' qu'a pardu ses chats. "
En m'en allant, j'ai rencontré Eun' fill' qu'était en train d' pleurer, Tout' peineuse et toute en haillons, Et qui portait deux baluchons. L'un en main ! c'était queuqu's habits ; L'autr', c'était son vent'e oùsqu'était son p'quit !
Et j'y ai dit : "Fill', c'est pas tout ça ; Quand t'auras ton drôl' su' les bras, Coumment don' qu'tu f'ras pour l'él'ver, Toué qu'as seul'ment pas d' quoué bouffer? Et, quand mêm' que tu l'élév'rais, En t' saignant des quat' vein's... et pis après ?
Enfant d' peineuse, i' s'rait peineux ; Et quoiqu'i fasse i' s'rait des ceux Qui sont contribuab's et soldats... Et, - par la tête ou par les bras ou par... n'importe ben par où ! - I' s'rait eun outil des ceux qu'a des sous.
Et p't-êt qu'un jour, lassé d' subi' La vie et ses tristes fourbis, I' s'en irait se j'ter à l'ieau Ou s'foutrait eun' balle dans la pieau, Ou dans un bois i' s'accroch'trait Ou dans un "cintiéme" i' s'asphysquerait.
Pisqu' tu peux l'empêcher d' souffri, Ton pequiot qu'est tout prêt à v'ni, Fill', pourquoué don' qu' tu n' le f'rais pas ? Tu voués : l'étang est à deux pas. Eh ! bien, sitout qu' ton p'quiot vienra, Pauv' fill', envoueill'-le r'trouver mes p'tits chats !... "
LE PETIT QUI PLEURE
Un gosse qui n'a pas sept ans Chiale au sortir du vieux faubourg Où ça serti la peine et l'amour Et je m'arrête, là longtemps : Moi, dont le coeur saigne ce soir Tout rouge, en un silence atroce. Je m'arrête sur le trottoir A regarder chialer ce gosse...
Refrain
Pleure, pleure mon petit gâs Dis, pourquoi pleures-tu ? Pour rien ! Mais pleure : ça me fait du bien ! Pleure pour moi, qui ne peux pas !
LE site référence sur Gaston Couté, tout y est: biographie paroles, interprètes etc...
Un lien pour écouter "Gérard Pierron chante Gaston Couté"
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