

Groupe Rock Français composé du chanteur Jo Philippe Leb (né à Casablanca le 22 mars 1948), du guitariste chanteur Marc Tobaly (né à Fez le 1er janvier 1950) ; du bassiste Jacques 'P’tit Pois' Grande (né à Paris 19e le 21 janvier 1948) et du batteur Jacky Bitton (né Isaak Bitton à Casablanca le 2 décembre 1947)..
Formé à Paris en Septembre 1966 par des musiciens originaires d'Afrique du Nord influencés par les Rolling Stones et les Chausettes Noires, les Variations commencent tout d'abord à participer à des tremplins comme cela se faisait à l'époque en France. Ils évoluèrent entre Pop et Heavy Rock avec, ce qui est tout à fait personnel, l’incorporation d’éléments empruntés à la musique Arabe.
On leur colle alors rapidement l'étiquette "Premier groupe Rock Français". Pourtant, bien évidemment, les Variations ne furent pas le premier groupe à jouer du Rock en France, mais ils furent les pionniers incontestés d'un mouvement baptisé Pop Music Française, ouvrant grandes les portes à d'autres groupes comme Martin Circus, Triangle, Zoo, Dynastie Crisis, ou autres Alice, pour ne citer que les plus connus.
Leb, Tobaly, 'P'tit Pois' et Bitton ont dû affronté les routes, les concerts peu organisés et (ou) mal rétribués, une presse spécialisée parfois hostile, mais aussi l'indifférence des grands médias...
Malgré tout ça, ils ont toujours cru en leur capacité et leur talent.

En 1963, la famille de Marc Tobaly vit à Fez, au Maroc. Avec les frères Costa, dès l'enfance, ils baignent dans la musique car leur grandmère, Zohra El Fassia, fut une chanteuse orientale célèbre. D'Amérique, un oncle leur rapporte chacun une guitare électrique Kay. Marc possède aussi une guitare et, comme ils sont très copains, ils jouent très souvent ensemble.
Michel Costa et Tobaly ont exactement le même âge. Son frère Georges est son ainé de deux ou trois ans. Les Costa enseignent à Marc les premiers accords. Celui-ci adore les Chaussettes Noires à l'époque et il essaie de reproduire "Vivre Sa Vie" et "Dactylo Rock".
Comme d'autres apprentis guitaristes, il tente aussi de jouer "What'd I Say" de Ray Charles. Georges Costa officie alors dans un groupe qu'il baptise les Jeunes Loups (sans doute à cause de la célèbre chanson de Jean-Claude Annoux).
Michel et Marc montent aussi leur formation qu'ils appellent les P'tits Loups et ils se produisent un peu partout où l'on veut bien d'eux, dans les piscines en dehors de Fez, les bals, ou dans un cinéma...
Ils jouent alors beaucoup d'instrumentaux des Shadows et des Fantômes, "Cafard", ou "Shazam" par exemple, puis ils commencent à apprendre des titres des Beatles, "I Want To Hold Your Hand". "It's All Over Now" et "The Last Time" des Rolling Stones, etc. Les P'tits Loups durent trois ans.
En 1964, Tobaly rend visite à un cousin qui a son âge et qui habite Casablanca. Un ami commun lui présente alors un personnage assez fou, bien allumé même, qui casse tout quand il est sur scène, Jo Leb.
L'après-midi, celui-ci garde le garage de son père où ils vont s'amuser avec lui en jouant des trucs des Stones, alors bien peu connus au Maroc. Marc apporte une guitare, et, avec les règles qu'il emprunte dans le bureau, Jo tape sur des fûts.
Un soir, avec son cousin, ils vont voir les Shadows aux Arènes. A cette époque, les trois guitaristes jouent sur des Burns blanches, et, avec leurs costards, ils sont impressionnants.
En première partie passe l'un des plus importants groupes de Casablanca, les Jets, un peu dans le genre Shadows.
Ce soir-là, leur batteur fait un solo monstrueux. A la fin du concert, Marc n'arrive même pas à obtenir un autographe parce qu'il y a trop de monde et qu'il doit partir. Ce batteur s'appelait Jacky Bitton.

Début Juillet 1966, ayant gagné un peu d'argent en jouant à la piscine du Zallagh, il part pour Paris rejoindre son frère Alain, qui a sept ans de plus que lui, pour les vacances. Dans le train, il achète une guitare acoustique à un beatnik, un bon instrument qu'il gardera longtemps.
Le jour de son arrivée à Paris, Marc apprend que son frère Alain et sa sœur Magda sont à Londres, où il part les rejoindre. Ils vivent dans un petit appartement et Alain travaille dans un coffee shop. Il est bien branché musique (il a vu les Rolling Stones à l'Olympia). Il aime danser le Rock mais c'est surtout un mod.
Armé de sa guitare acoustique, Marc joue à Piccadilly Circus avec des gars qui passent leurs journées là. Des Italiens l'engagent pour passer dans leur restaurant, le 'Papagayo'. Il y joue des chansons des Beatles qu'il lui faut agrémenter de quelques titres en italien comme "Come Prima" ou "Non Ho L'Eta"...
Ce petit engagement lui permet de tenir le coup, financièrement. A Londres, musicalement, c'est la grosse ambiance. Ils adorent le groupe "The Creation" et ils vont souvent le voir au Tiles. C'est l'effervescence, tous les soirs, partout, des groupes se produisent.
En Septembre 1966, après avoir ingurgité la scène Anglaise, et censé retourner au Maroc pour la rentrée des classes, il décide de rester à Paris. Alain reprend ses études de droit tandis que Marc essaie d'intégrer un groupe.
Ils habitent alors un petit studio, rue de l'Ouest. Premiers essais avec des formations de quartier très décevants car le niveau est bien bas. C'est la période des vaches très maigres.
Désolé de le voir végéter, Alain décide qu'il faut trouver des musiciens pour former un groupe autour de son frère.
Un jour, chez Paul Beuscher, Marc rencontre deux gars qui ont l'air sympathiques, avec une bonne allure. Ce sont le guitariste Jacques Micheli et le bassiste Guy de Baer qui reviennent aussi de Londres et ils se découvrent de nombreux points communs.
Après un boeuf mémorable, ils décident d'engager un batteur et mettent une annonce chez Pasdeloup, boulevard Saint-Michel. Sans téléphone, ils indiquent simplement l'adresse de Tobaly. Un jour qu'il neige à Paris, en Octobre, un batteur se présente rue de l'Ouest. C'est un certain Jacky Bitton!... Celui des Jets!. Il vient d'arriver à Paris pour suivre ses études. Récent acquéreur d'une Ludwig, il cherche à jouer, du Jazz ou du Rock.
Commencent alors les répétitions, avec Jacques Micheli, Guy de Baer, Jacky Bitton et Marc Tobaly.

Alain trouve un endroit sur les boulevards pour répèter appelé 'le Ranch'. A l'époque, les lieux possibles étaient encore très rares. Au bout d'un moment, il leur faut un chanteur. Auditions...de tout style. Aucun résultat! Marc pense à Jo Leb qui, lui, ferait l'affaire, mais où se trouve-t-il?
Un soir, Alain se pointe à 'La Musarde', un petit café en bas du boulevard Saint-Michel. Au fond de la salle, il repère un type avec une super gueule. Jamais timide, il va vers lui et lui demande: "Dis moi, tu ne serais pas chanteur, par hasard?".
Le gars: "Si je suis chanteur? Tu parles! J'ai ma sono à Londres "etc...
On ne peut plus l'arrêter. Alain lui propose de passer une audition et se pointe avec lui à la maison. Incroyable, car c'est Jo Leb. Après quelques mois a Nice, il venait juste d'arriver dans la capitale.
Les répétitions avec Leb, Micheli, de Baer, Bitton et Tobaly marchent formidablement bien. Jo, sans être un grand chanteur a plus que ce qu'il faut de folie et de présence. Comme chanteur de Rock, difficile d'imaginer mieux.
A cette époque, tout le quartier du Marais est transformé en Carnaby Street, avec des boutiques genre London. des pubs, etc. Le patron d'un restaurant leur propose de jouer dans sa cave, ce qui leur permet de repéter à fond les manettes et ce qui,en même temps, risque d'attirer des clients. Rémunérations: 30 Francs chacun, par jour, plus un hamburger le soir. Jacques Micheli et Guy de Baer, encore étudiants, décident d'arrêter là.

Le 16 Décembre 1966, le trio restant pénétre pour la première fois dans le pub pour jouer. Un type, genre titi parisien descend les escaliers et leur demande:
"-Hé, les gars, vous ne chercheriez pas un bassiste, par hasard?"
"-Si, pourquoi, t'en connais un ?"
"-Oui, un mec super, iI habite dans ma rue, je vais vous le chercher!".
Naturellement, il s'agit de Jacques Grande. P'tit Pois vient juste d'apprendre sa réforme du service militaire. Sa grand-mère a promis de lui acheter la basse de ses rêves, une Gibson EB-3, ainsi qu'un amplificateur Fender Bassman s'il était exempté. Il n'avait certainement jamais fait partie d'un groupe avant et il traînait au 'Tour Club', rue de l'Ourcq, dans le 19e.
Ainsi sont nés les Variations!
Un moment plus tard, P'tit Pois amène l'un de ses copains, Jean-Pierre Azoulay, dit Rolling, futur musicien de Johnny Hallyday, pour assurer la deuxième guitare. Mais celui-ci, encore indécis, n'est pas prêt à s'engager, à se commettre. Individualiste, il a peur des choses sérieuses. Alors le groupe continue à quatre et Tobaly apprend vite à jouer à la fois rythmique et soliste.
D'après les membres du groupe, il faut prononcer le mot 'Variations', à la française. C'est le nom que la formation employait depuis les débuts, avec Jacques et Guy, probablement sous l'influence d'autres formations comme Creation, Action, etc. Mais, également parce que variations est un terme musical : variations sur un même thème.
Alain, commençant à sentir qu'il a entre les mains une unité plus que performante, cherche des endroits où produire les Variations. D'abord des petites choses en banlieue, puis le fameux 'Tremplin du Golf Drouot', le saint des saints, en Décembre 1966.
De nombreux personnages du métier du Rock Parisien sont présents. Serge Morali (frère de Jacques) directeur du magasin Music Center, rue de Douai, fait partie du jury et il leur dit, après leur prestation: "Dès la première note, nous savions qui allait gagner".
Henri Leproux, comme promis, les engage pour le week-end suivant: les gagnants du Tremplin passent systématiquement les vendredi, samedi et dimanche, en vedettes, rémunérés.
Les Variations deviennent des vedettes du Golf, des piliers, et les gens commencent à parler d'eux. Le groupe se produit également au 'Tour Club' où les responsables sont obligés de mettre des chaînes quand le public devient fou.
Compton, boutique de vêtements branchée du quartier Saint-Michel (surtout des vestes à quatre ou six boutons, croisées, à la manière des Kinks), équipe le groupe entièrement, en échange d'une photo style les Variations sont habillés par Compton.

En Mars 1967, ils achètent un bus Wolkswagen, sur lequel est écrit 'transport d'enfants', qu'ils bourrent de matériel et ils partent à l'aventure, avec Alain, Rob (l'un de ses copains, un genre d'as du volant) et un autre Jo (qui fut un temps le chanteur des P'tits Loups, qui voyage avec eix mais qui restera faire sa vie en Scandinavie).
Le matos étant au milieu, quatre gars s'asseoient derrière, les trois autres devant. Et vogue la galère. En bus! ...jusqu'à Hanovre.
Là-bas, dans les clubs, les boissons ne coûtent pas cher, peut-être un deutschmark le verre (à l'époque, environ un franc).
Une affiche annonce le passage de The Smoke le soir-même au Savoy, un club assez grand, comparable au Palace ou au Bataclan, avec une vraie scène.
Le groupe contacte immédiatement le directeur pour lui proposer ses services. Coup de chance, leur chauffeur parle allemand et un accord est pris pour passer, à l'essai, le soir-même.
En attendant, direction la gare. N'ayant pas les moyens de payer une chambre d'hôtel, c'est le seul endroit où ils peuvent faire un brin de toilette, se préparer, mettre les vêtements fournis par Compton, et même des chapeaux. De véritables personnages de dessins animés.
The Smoke, qui viennent juste d'avoir un tube grâce à "My Friend Jack", sont les joyeux possesseurs de beaux amplificateurs Marshall flambant neufs, mais ils refusent de prêter leur matériel. Ce qui met les gars dans une rage folle.
Du coup, ils font un véritable tabac. Les Variations jouent alors comme des dingues et les spectateurs sont comme hallucinés. Le patron, aux anges, les invite à une grande table, et leur paie le champagne et le cognac, et toutes les filles leur tournent autour.
Les Smoke sont verts, car, plus à l'aise en studio que sur scène, ils ne réussissent pas à s'imposer. Le public n'est intéressé que par "My Friend Jack" puis retourne au bar.
Les Variations sont invités à revenir jouer, quinze jours plus tard, dès que la programmation déjà établie le permettra. En attendant, ils repartent vers la Scandinavie.
Tout le monde couche dans le camion. A chaque étape, le scénario mis au point à Hanovre se répète: toilette dans la gare, visite au club du coin, etc. Heureusement, c'est une époque cool, relax: Vous venez pour jouer, alors, allez-y, jouez!
Engagés par le 'Hit House' et le 'Star-Club' de Copenhague, ils rencontrent beaucoup de gens, dont Steve Marriott jammant avec Jimi Hendrix, magnifique, ou Vanilla Fudge...Sans argent, ni hôtel, il leur faut attendre qu'une nana veuille bien les emmener chez elle.

Dans cette ambiance un peu dingue, ils croisent les gens de chez Triola, sympathique petite maison de disques locale, qui leur font enregistrer un single.
Leur studio est installé dans une salle de cinéma. Le groupe choisit "Mustang Sally". En revanche, reprendre "Spicks And Specks", est leur idée. Les Bee Gees sont très en vogue, mais ce titre, un de leurs premiers, est assez obscur.
Sur la pochette, les Variations arborent les costumes Compton, sauf la veste militaire, achetée au surplus.
Sorti en Octobre 1967,.le disque semble bien démarrer.
Au 'Hit House', des gamines, âgées de douze ou treize ans, pas plus, devenues folles, cassent la porte de leur loge pour les brancher.
Evidemment, le groupe se prend immédiatement pour les Beatles. Malheureusement, le Danemark est un pays plutôt fermé, du point de vue immigration. Après quinze jours, il leur faut quitter le territoire et formuler une demande pour pouvoir y revenir.
Retour alors, comme prévu, au 'Savoy' de Hanovre, Grandiose.
Durant dix mois, les Variations ne font plus que ça: Allemagne, Suisse, Scandinavie. Toujours en dormant dans le camion. La suite royale, c'est le siège arrière! Devant, c'est nettement plus dur à cause du levier de vitesses. Parterre, au milieu, ce n'est pas terrible, mais tout de même mieux que dehors, où il leur faut pourtant dormir, à tour de rôle.
Chaque matin, réveil par des motards de la police "raus ! raus!". Le groupe vit exactement comme des romanichels.
Les Variations jouent dans toutes les villes. Parfois une bagarre interrompt le concert, comme celle opposant des Gitans et des soldats anglais. Les types se cassent des tables sur la tête. Un soir, Jacky est même obligé de se battre comme un beau diable.
En Décembre 1967, finalement, retour en France pour faire le Golf Drouot, puis effectuer autant de concerts que possible un an durant.
Jamais un week-end ne passe sans que les Variations aient un engagement, mais toujours sans aucun contrat discographique, malgré leur réputation. Tout le monde les connaît, mais personne ne veut les enregistrer!
D'autres groupes sont dans la même position, dont Devotion, avec qui est effectuée une petite tournée durant l'été 1968: La Rochelle, l'île de Ré...
C'est un peu la genèse de ce qui va être appelé la Pop. Les autres formations sont celles de Richard Fontaine, Tribu, ainsi que Alice avec Alain Suzan, Présence peut-être... Puis viennent Alan Jack Civilization, DocDail, etc.
Les Variations furent incontestablement le groupe-phare de ce mouvement. Celui qui a ouvert les portes.

En Novembre 1968, le moral est au plus bas. Il est même question de séparation.
Un jour, pourtant, Richard Fontaine se pointe chez Tobaly et les houspille: "Alors les mecs, qu'est-ce que vous foutez. Il y a tous les groupes qui sont à Joinville, les Who, Small Faces, Fleetwood Mac, etc., et vous restez ici à vous angoisser!"
C'est le tournage d'une émission destinée à passer le 31 Décembre, 'Surprise-Partie', produite par Télé 2000: Michel Taittinger, Jean-Pierre Frimbois et Guy Job.
Alors, avec leur camion, ils se rendent sur place. Alain, Jo, P'tit Pois et Marc sont toujours fourrés ensemble, alors que Jacky Bitton, de caractère indépendant, mène sa petite vie personnelle et il n'est donc pas avec eux.
Les responsables du plateau les laissent pénétrer. C'est le dernier jour de tournage. En arrivant, ils tombent sur les Who en plein "Magic Bus" . Il y a là Rod Stewart, Ron Wood,.. du beau monde, ainsi qu'une flopée de jolies filles, des mannequins.
Vers sept heures du soir, il y a une pause et toute l'équipe passe à la cantine. Ils restent alors là, sans trop savoir quoi faire en attendant que les séquences reprennent quand, tout à coup, Tobaly aperçoit sur la scène une magnifique guitare Gretsch verte. Il s'approche, la prend et commence à gratouiller un petit peu.
Michel Taittinger demande:
"-Qui c'est ce mec qui joue?".
Leur road-manager, qui l'entend, lui dit:
"-C'est Marc Tobaly, le guitariste des Variations, le groupe Français".
"-Ah, pas mal" et, s'adressant à Alain:
-"Est-ce qu'ils seraient d'accord pour jouer! j'ai surtout besoin de plans de coupe, pour insérer au moment du montage, faire des liaisons".
Alain donne son accord. Venus avec leur camion, un classique Ford Transit, tout leur matériel est sur place, même les tenues. Toujours prêts à dégainer!
Plutôt hautain, Taittinger laisse tomber:
"-Très bien, branchez votre matériel, à 21heures c'est à vous".
Le roadie installe tout puis essaie de trouver Jacky. Il habite près de Clichy mais n'est pas chez lui. Il finit par le localiser dans un cinéma d'où il le fait sortir de toute urgence, comme dans un feuilleton! Ils arrivent à toute vitesse, il doit être environ 20 h 59... juste le temps de passer le gilet de base.

Pour commencer, on leur demande d'accompagner P.P. Arnold pour interprèter un morceau des Bee Gees, "To Love Somebody". Enfin, accompagner est un grand mot, car ils ne font que mimer en play-back. Simple figuration.
Traffic, prévu, ne réussissant pas à se libérer de tracasseries douanières, il reste du temps, de la place dans l'émission. Michel Taittinger, logique, leur propose de jouer un de leurs trucs. Acceptions unanime! Comme c'est la fin du tournage, tout le monde après avoir un peu bu à la cantine, a envie de s'éclater.
Jo est déchaîné. Au premier titre, le groupe casse la baraque et Taittinger leur demande:
"-Faites-en un autre!". Après le deuxième: "-Encore un autre!" Du coup, le titre 'Surprise-Partie' devient véridique: c'est la vraie fête.
Des gens prennent Jo sur leurs épaules, Jacky et P'tit Pois se déchaînent. Encore une fois, comme des fous. Finalement, le groupe jouera sept morceaux ce soir-là, SEPT Dont "Everybody Needs Somebody To Love", une très longue version de "Satisfaction", "Devil With A Blue Dress On" ,et "Mustang Sally"...
Pour la Saint-Sylvestre, les Variations se produisent pour le bal de HEC à Jouy-en-Josas. L'émission 'Surprise-Partie' est diffusée. Bien-sûr, chacun la regarde attentivement! Passent un titre des Who, un des Small Faces, etc., et les SEPT des Variations!
A la télé, le 31 Décembre 1968, devant plusieurs millions de téléspectateurs, générique de fin sur Jo. La totale!
Dès le lendemain, les maisons de disques appellent. De fait, le groupe signe un contrat avec Claude Ébrard (aujourd'hui décédé) qui représente Robert Stigwood Organisation en France.
Il a un petit bureau à Paris et s'occupe d'autres artistes comme Virginia Vee. Alain et lui s'entendent bien.
Claude les produit, financièrement, et négocie un contrat de licence avec Pathé Marconi. C'est le producteur, mais c'est Alain, l'agent, qui trouve les galas et qui s'en occupe. La promotion est assurée par Télé 2000.
A peu près à cette époque, Andrew Jakeman, rencontré au hasard, dans une boîte vient travailler avec eux. Il restera longtemps leur régisseur. C'est un vrai débrouillard, quelqu'un qui s'impose, d'emblée. Les Américains appellent ces personnages des 'hustlers', Ils sont capables de beaucoup de tchatche, mais aussi de réelle énergie, jusqu'à l'agressivité, pour parvenir à leurs fins. C'est un type de valeur, avec des idées. Il leur dit: "Il vous faut une image, mettez des capes". Ce genre de choses! Comme il est Britannique, il leur apporte une aide appréciable pour les paroles. Il est devenu, par la suite, Jake Riviera, manager de Elvis Costello, Nick Lowe, des disques Demon, etc.

Les Variations essuient les plâtres, comme on dit. En studio, les techniciens n'ont jamais travaillé avec un groupe Pop de leur vie. La période Chaussettes Noires est déjà assez lointaine.
Quand on sait qu'en Angleterre, ce sont les débuts de Led Zeppelin, et que, en France, personne n'a la moindre idée de la façon dont il faut enregistrer une batterie avec un gros son, ça fait peur!
Les guitares, disons que ça va encore, mais les batteries!
Certains studios comme ceux que possède alors Pathé, à Boulogne, sont très bons. D'ailleurs, Paul McCartney aime bien utiliser le petit, le niméro 4.
Mais les techniciens sont surtout habitués à travailler pour Gilbert Bécaud, Charles Aznavour, des artistes pour qui l'exigence de volume, en matière de batterie, n'a rien à voir avec celle de groupes comme les Variations.
Leur première séance a lieu au Studio des Dames, rue des Dames, dans le 17e arrondissement.
Habitués à la scène, le groupe ne connait strictement rien aux techniques d'enregistrement.
En dehors de "Mustang Sally" et "Spicks And Specks", qui ont été mis en boîte en une journée, ils n'ont pas la moindre expérience.
En résumé: les Variations sont conscients de ne pas entendre la batterie comme ils le voudraient, mais ils sont bien incapables d'indiquer comment obtenir l'impact désiré.

Pour toutes les premières séances Parisiennes, Pathé délègue un directeur artistique, Claude-Michel Schönberg.
A l'époque, il est difficile de débuter par un album, aussi ils acceptent de faire un simple et "Come Along / Promises" sortira en Mars 1969.
Johnny Hallyday, qui semble les apprécier, leur demande de participer à son spectacle au Palais des Sports fin Avril 1969.
En principe, il devrait y avoir les Aphrodite's Child, avec lui, sur la grande scène, tandis que deux scènes plus petites, de chaque côté, sont confiées l'une aux Variations, l'autre à Devotion. (En dépit de sa réputation, Devotion, groupe formé par le guitariste chanteur Paul Scémama, le bassiste Jean-Pierre Domboy,le claviériste Laurent Petit-Gérard, le batteur Alain Doudou Weiss et l'harmoniciste manager Patrick Gandolfi ne laisse aucune trace discographique).
Le jour venu, Johnny ne veut plus des Aphrodite's Child sur la grande scène et Vangelis l'envoie se faire voir. Du coup, les Variations et Devotion sont promus vedettes Américaines, ce qui signifie que le groupe est considéré comme au deuxième plan, par ordre dans le spectacle. C'est important pour des gens qui, finalement, n'ont qu'un 45 tours à leur actif!
Succès évident, tant et si bien que leur temps de passage est raccourci chaque soir! De 30 minutes au début, ils passent à 25, 20, 15, 12... Après cela, c'est justement pendant ces 12 minutes qu'un mec déguisé en ours vient distribuer des prospectus. Bon, c'est le jeu. En Amérique, systématiquement, la première partie n'a droit qu'à la moitié de la puissance pour le son comme pour l'éclairage.
L'expérience avec Hallyday leur est profitable: le magazine 'Salut Les Copains' consacre deux pages en couleurs chacun aux deux nouveaux groupes Français.
Ils enregistrent un nouveau 45 tours. "What's Happening" / "Magda", en Septembre 1969.
Pour la Saint-Sylvestre 1969, les Variations se produisent en deuxième partie de Led Zeppelin pour le bal 'Piston 70' à Châtenay-Malabry.
La carrière des Variations est définitivement lancée et ils passent, dès lors, la plupart de leur temps sur la route avec juste quelques haltes en studio marquées par les simples "Free Me" / "Génerations" en Mars 70 et "What A Mess Again" / "Nador" en Septembre 70, paru un mois avant leur premier album, "Nador", qui, outre ces deux 45 tours,contient également "Waiting For The Pope", "We Gonna Find The Way", "Completely Free", "Mississippi Woman" et "But It's Alright". Marc Tobaly y signe quasiment tous les originaux du groupe;

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Après de nombreux spectacles, notamment en ouverture de Steppenwolf ou Led Zeppelin, sort leur très attendu premier album, "Nador" en Octobre 1970. Mick Fowley, de Grape fruit, y participe.
Le passé Marocain des musiciens ouvre la porte à des influences (moult percussion, Youssef Berrebi au darbouka) alors peu communes pour une formation de Rock dur.
D'entrée, on est frappé par la maturité du groupe, son professionnalisme, et son absence de complexe, surtout pour l 'époque.
Les Variations ont un son cent pour cent Anglais, avec chant en Anglais, à l'exception d'une chanson.
Leur musique puise ses origines dans les Who, les Kinks, les Stones, Cream, les Yardbirds, les Small Faces, sans omettre, bien sûr, le Rythm'n'Blues de Otis Redding ou de Wilson Pickett. On pense également parfois à Led Zeppelin ou même Mountain.
Joe Leb sait se montrer exubérant, explosant littéralement, possédé par les vibrations du Rock dur. Marc, grâce notamment à une immersion totale dans le Swinging London en 66, sonne comme les meilleurs guitaristes Anglais des années 60, avec un son graisseux, sans effet apparent, hormis une wah-wah pour le break de "Completely Free", sachant se faire tantôt incisif, tantôt mielleux, tantôt intimiste (en acoustique).
Quant à la section rythmique, elle n'est nullement figurative, partant à l'assaut, tout en restant en cohésion, plutôt que retranchée.
Leur musique sait se parer d'atouts plus exotiques, notamment dûs à l'adjonction occasionnelle d'instruments Maghrébins (la darbouka, et la taarija, darbuqqa, et des percussions du crus).
Trois des membres étant originaires du Maroc, ils se servent de leur patrimoine culturel pour enrichir judicieusement leur musique aux consonances et constructions essentiellement Anglo-Saxonne, plus naturellement, et bien avant Led Zeppelin.
Le meilleur exemple en est le splendide titre instrumental, "Nador", un Folk oriental avec du darbouka, quelque part entre "Black Mountain Side" et "Friends".
Parfois l'album penche complètement vers une British Pop des années 60, comme sur l'excellent "We're gonna find the way".
On pourrait certes reprocher une production un peu touffue, manquant de définition sur les titres les plus Heavy, mais cela ne devrait pas occulter le fait que Les Variations soit un grand groupe, paré d'indéniables qualités de compositeur et d'interprètes. Un classique.
Le groupe est alors de tous les festivals. Marc Tobaly y est puissant, inspiré, racé, omniprésent comme Jacky Bitton, spectaculaire.
Jo Leb, un cas spécifique, appréhende les planches avec une férocité qui évoque, sans conteste, Mick Jagger.
Leur show est musclé, plein de bruit et de fureur, pourtant, “Down The Road”, publié en Mai 1971 montre une volonté de sophistication grâce à l’apport de cordes.
Au sortir d’une tournée en Espagne en Août 1971, Jo Leb annonce son départ.
“Only You Know (And I Know)”, emprunté à Dave Mason, et “I Was Down” sont enregistrés sans lui. Il est remplacé par David Chevalier du groupe Palois Shakes en Octobre 1971.
En Février 1972, Jo Leb revient. P’tit Pois est lui aussi temporairement remplacé par Alain Suzan du groupe Alice, mais il revient à temps pour une première tournée aux Etats Unis.
À Cincinnati est enregistré “Je Suis Juste Un Rock’n’Roller” (sur des paroles du journaliste Patrice Michel), considéré comme l’une des meilleures plages du groupe.
Carven crée “Variations, le seul parfum vraiment actuel” en Février 1973.

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"Take It Or Leave It", produit à Memphis par Don Nix, sort en Avril 1973.
Ce second opus du groupe est une œuvre forte et cohérente qui, artistiquement, installe les Variations en bonne place sur la scène internationale.
Le groupe délivre encore un Rock tranchant et agressif précurseur qui passe du Rythm & Blues (le vrai) speedé au Heavy Rock.
Le talent de Marc Tobaly à la 6 cordes donne aux titres une dimension mélodique incontestable tandis que la voix rocailleuse et agressive de Joe leb apporte la puissance qui forgera l’ame du Hard Rock puis du Métal 'made in France'.
Le son est gros pour l’ époque, voire énorme.
Grosse claque d’entrée de jeu avec "Silver Girl" où Tobaly démontre que sa guitare vaut bien celles des Américains par des pointes de solo qui rappellent par bien des points les futures productions Australiennes de la grande époque.
Changement de rythme avec "Help me Marianne" où Leb arrive à nous faire oublié que l’enregistrement n'est fait qu'en studio tellement la rage contenue dans sa voix sonne 'live', il nous accroche et nous emmène dans leur univers où la mièvrerie sonore n’a pas droit de citer.
Seuls, les chœurs féminins seuls sont un peu datés.
Chaque titre porte en lui le germe qui a fait éclore le Hard Rock loin des média et de la récup’ mercantile.
Pour conclure, encore un album indispensable bien au delà des 'styles', de la technique et du son.
Les Variations repartent en Amérique en Juin 1973 et assurent de fréquentes premières parties: New York Dolls, Tim Buckley, et buen d'autres.
En Décembre 1973, un Pop 2 (unique show rock de la télévision française) leur est consacré.

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Leur album suivant "Moroccan Roll" est commencé à Atlanta, et terminé à Boulogne en Février 1974. Jo Leb n’y chante que sur quatre plages.
On y découvre Maurice Meimoun, excellent violoniste, et l’organiste Jim Morris.
Le disque est publié aux USA par Buddah, provocant un nouvel aller-retour.
Une tournée française avec Le Poing en première partie passe par l’Olympia (juin 1974).


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Pour "Café De Paris", réalisé au studio Bell de New York par Michael Wendroff en 1975, Jo Leb est remplacé par Robert Fitoussi, ancien des groupes Trèfles et Boots qui fait aussi une carrière solo sous le nom F. R. David.
La pochette est de Guy Peellaert.
Après la dissolution du groupe, Marc Tobaly fonde King Of Hearts avec Robert Fitoussi, Michael Wendroff et Carl Storie pour enregistrer l'album "Close, But No Guitar" sorti en 1978 dont l'une des chansons, "Just Because", est reprise par Ray Charles quelque temps après.
Il joue un temps avec le groupe Nantais Taurus 5, participant au simple “Y’a comme un train qui m’fend la tête" publié en 1980. En solo, il enregistre “Time to Get Better” paru en 1981.
Jacky Bitton,quant à lui, réalise "Raya Mehemna — Songs For A Brother, Vol.1" en hommage à son jeune frère, David Chai, décédé en 1982.
Jo Leb chante sous son nom “Faut qu’ça passe ou qu’ça casse” publié en 1983 qu’il défend dans un show télévisé de Johnny Hallyday. Il est soutenu par les meilleurs musiciens de studio issus du Rock, ceux-là mêmes qui accompagnent Marc Tobaly, quelques semaines plus tard, sur "Nightmare" édité en 1983.
Fin Novembre 2006, les Variations se reforment exceptionnellement pour un concert à Paris, mais sans lendemain.
Jacques Grande, connu aussi sous le nom de P'tit Pois, est décédé le 16 juin 2011.
DISCOGRAPHIE:
1969 Nador
1973 Take It Or Leave It
1974 Moroccan Roll
1975 Café de Paris
Sources: Attention, ceci est l'adaptation libre d'une interview de Marc Tobaly par Jean William THOURY!


