Cher Monsieur-Hulot,
J'ai pris ton attente de retours aussi sérieusement que tu as fait ton film.
Voici donc mon sentiment que je ferai présider de l'ineffable citation de Beaumarchais qui fait dire à Figaro que sans la liberté de blâmer tralali-tralala.
La photo, les plans, le montage
C'est juste magnifique. Le tout premier plan avec l'arrosoir ! Et la trouée de verdure lorsque les épouvantails s'en vont comme des mariés avec leur bébé ... Les couleurs !
(Le problème de raccord n'est-il d'ailleurs pas dans cette scène ?).
C'est monté avec beaucoup de justesse et les enchaînements font qu'on ne s'ennuie pas un instant (ce qui aurait été assez malvenu pour un court-métrage il faut bien l'avouer. Mais ça existe des courts-métrages chiants).
Les acteurs
Parfaits, mais plombés pour certains par le grimage ; j'y reviendrai.
L'histoire
Elle est poétique mais elle manque un tout petit peu de densité. Mais rien de grave

.
Il y a 2 moment assez forts :
- La carte postale avec le Christ Rédempteur qui combine l'humour et l'intention philosophique (si, si ! Moi j'ai vu une sorte de rédemption pour ces deux créatures !).
- L'arrivée du bébé citrouille ça c'est pas intello, c'est juste un joli moment de grâce.
Le style
La référence au cinéma muet m'a laissée de marbre et c'est un euphémisme. Je n'ai pas aimé les fausses moustaches du jardinier et du facteur ; l'histoire aurait été tellement différente avec des gens ordinaires !
Conjuguer irréalité de l'histoire et réalité des personnages aurait apporté une toute autre dimension. Un peu comme dans Ricky, tu vois ce que je veux dire ?
Du coup le choix d'un jeu à la Chaplin pour la moitié des acteurs m'a semblé incongru ; le jeu burlesque n'allait pas à cette histoire.
Quand j'y réfléchis, il me semble que c'est la cohabitation de l'expressivité corporelle extrême du jardinier et du facteur avec le jeu très retenu, très doux, de l'épouvantail (ses regards) et de l'épouvantaille (ses gestes). Voilà ce qui a fait que je n'ai pas adhéré à 100 % : le mélange de genres opposés qui finalement se nuisent mutuellement.
Bon, faut dire que pour moi le cinéma muet c'est comme les clowns : ça me fait peur (traumatisme d'enfance ?

).
Je peux néanmoins admettre et comprendre que cette sorte de "double langage" puisse être une volonté artistique ...
En ce sens, mes critiques ne sont que l'expression de mon ressenti, évidemment.
Sinon, j'ai deux questions :
Pourquoi l'acteur qui joue l'épouvantail est-il ton acteur fétiche ?
Pourquoi tu as fait ce film ?
Ah ! J'oubliais ! J'ai adoré les aventures en bonus de Russell (Russell ...) l'escargot !
